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Au Ghana, les Afro-Américains retournent sur les traces des esclaves déportés Outre-Atlantique

Article rédigé par Laurent Filippi
France Télévisions
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Le Ghana fut l'un des principaux points de départ des navires négriers vers le Nouveau monde.

L'année 2019 marque les commémorations du 400e anniversaire de l'arrivée des premiers esclaves africains en 1619 aux Etats-Unis. Pour marquer cet évènement, le Ghana, aujourd'hui l'une des démocraties les plus stables du continent africain, a déclaré 2019 "Année du retour". Le pays espère ainsi atteindre le chiffre de 500 000 visiteurs (350 000 en 2018), dont 45 000 Afro-Américains. Et inciter nombre d'entre eux à s'installer définitivement dans le pays.

Ce "concept de retour n’est pas neuf au Ghana. Le premier président du Ghana, Kwame Nkrumah (1960-1966), prônait déjà l’idée de faire revenir 'à la maison' les membres de la diaspora, incarnant ainsi la vague de panafricanisme et d’unité noire qui a submergé le continent dans les années 1950 et 1960, lorsque la plupart des pays africains ont obtenu leur indépendance de leurs colons européens", précise le site Equal Times.  (AFP)
A l'occasion de ce 400e anniversaire, le Congrès américain a créé une commission spéciale. La présidente démocrate de la Chambre des représentants des États-Unis, Nancy Pelosi (en jaune) et une délégation du Congressional Black Caucus, le groupe parlementaire composé uniquement de membres élus de la communauté afro-américaine, se sont rendus au Ghana en juillet 2019. Ils se sont arrêtés à la tristement célèbre forteresse de Cape Coast, à 150 km au sud-ouest de la capitale Accra, là où les esclaves étaient enfermés avant d'être transportés vers le Nouveau Monde. (NATALIJA GORMALOVA / AFP)
En 2009, le président américain Barack Obama s'était rendu avec sa famille à Cape Coast. "En tant qu’Afro-Américains, nous ressentons dans cet endroit d’un côté une profonde tristesse, et de l’autre le sentiment que le voyage d’une multitude de (futurs) Afro-Américains a commencé ici", avait-il alors déclaré. Depuis, chaque année de plus en plus de citoyens américains noirs se rendent au Ghana pour mieux connaître leurs racines. (REUTERS/JASON REED)
"Au Ghana, les forts et les donjons construits le long de la côte Atlantique témoignent encore aujourd'hui du sort des esclaves envoyés par bateaux en Amérique. Pendant trois siècles, la Côte-de-l'Or britannique, ancien nom du Ghana, a été l'un des principaux points de départ de ce trafic" explique franceinfo Afrique. Les hommes, les femmes et les enfants capturés par les négriers, pouvaient parfois parcourir enchainés 200 km à pied avant d'être enfermés dans ces lieux de détention. Puis montés à bord des navires, ils ne revoyaient jamais leur pays, raconte Reuters. D’après les estimations de l'Unesco, cette traite a déraciné 15 à 20 millions d’Africains. (DAVID LIVINGSTONE / DOMAINE PUBLIC)
Plus de 40 forts et châteaux ont été utilisés comme centres de négoce, et en particulier pour le commerce des esclaves. Trois de ces châteaux: Cape Coast, Saint-Georges et Saint-Jago, situés à Elmina sur la côte Atlantique, sont inscrits par l'Unesco au Patrimoine mondial de l’humanité. (REUTERS/LUC GNAGO)
"Le commerce triangulaire, aussi appelé traite atlantique ou traite occidentale, est une traite négrière menée au moyen d'échanges entre l'Europe, l'Afrique et l'Amérique, pour assurer la distribution d'esclaves noirs aux colonies du Nouveau Monde (continent américain), pour approvisionner l'Europe en produits de ces colonies et pour fournir à l'Afrique des produits européens et américains", explique le site de l'académie de Poitiers. (AFP/LEEMAGE/PHOTO JOSSE)
Quand Nana Assenso, 68 ans, chef du village d'Adidwan, dans l'arrière-pays ghanéen, se recueille sur la tombe de son oncle, il se rappelle de l'homme qu'il aimait mais aussi du passé qui hante sa famille depuis des générations. Son oncle s'appelait Kwame Badu, un nom qui a été transmis par la famille en souvenir d'un ancêtre, ancien esclave, il y a très longtemps. Il a suivi la tradition familiale et a nommé son fils cadet Kwame Badu."En grandissant, on m'a raconté l'histoire de deux de mes arrière-arrière- grands-oncles, Kwame Badu et Kofi Aboagye, qui ont été capturés et vendus comme esclaves", raconte Nana Assenso à Reuters. (REUTERS/FRANCIS KOKOROKO)
Durant les longs siècles de traite et d’esclavage arabo-musulman (à partir du VIIe siècle) puis occidental, des Etats négriers d’Afrique ont participé et se sont enrichis grâce à ce commerce, comme les royaumes africains d’Ashanti ou d’Abomey (actuels Ghana et Bénin), ajoute Outre-mer la 1ere. (DAVIDYORK/DOMAINE PUBLIC)
Kwaku Agyei, 71 ans, est pasteur à Obuasi (Ghana). Il raconte l'histoire de la traite négrière à de jeunes travailleurs de son quartier. "Nos aînés ont échangé leurs enfants contre de jolies choses, comme des boîtes d'allumettes". Mais il ajoute avec fierté: "Je peux dire que nos ancêtres ont construit l'Amérique". (REUTERS/FRANCIS KOKOROKO)
Abdul Sumud Shaibu vit également à Obuasi. Lui aussi est fier de ses ancêtres. Il montre une photo de son grand-père qu'il a sauvegardée sur son téléphone portable. "Mes ancêtres étaient des géants, ils étaient bien bâtis et forts. Regardez la taille de mon grand-père sur cette photo. Ils se sont battus avec des chasseurs d'esclaves. Quand, parfois, ils perdaient les combats. Ils étaient capturés et réduits à l'esclavage." (REUTERS/FRANCIS KOKOROKO)
Dans le cadre de cette "Année du retour", des stars noires d’Hollywood devraient effectuer un pèlerinage au Ghana pour clôturer la fin des commémorations en décembre 2019. Mais comme le précise Nancy Pelosi, la présidente de la Chambre des représentants des États-Unis, dans un entretien publié sur le site de la BBC: "Certains experts affirment qu'il ne faut pas trop insister sur l'importance de l'année 1619 car à cette époque, les Africains étaient déjà utilisés dans les plantations de tabac de la colonie anglaise des Bermudes. (…) On pense aussi qu'il y avait des Africains dans des missions d'exploration d'aventuriers anglais et espagnols en Amérique du Nord et en Amérique du Sud au XVIe siècle. Et les commerçants portugais emmenaient des esclaves dans leurs colonies depuis le XVe siècle" (ANN RONAN PICTURE LIBRARY / PHOTO12)

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