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Fuyant la "Corée du Nord africaine", des Erythréens affluent en Europe

Le nombre de migrants originaire de ce petit pays de la Corne de l'Afrique a fortement augmenté en 2014 en France. Arrivés d'Italie, ils transitent le plus souvent vers le nord de l'Europe.

Article rédigé par Louis Boy
France Télévisions
Publié Mis à jour
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Des migrants à Calais, où des affrontements ont éclaté le 5 août entre des groupes d'Erythréens et de Soudanais. (FRANCOIS LO PRESTI / AFP)

Ils fuient une des pires dictatures du monde. Les Erythréens immigrent en masse en Europe et notamment en France, un phénomène qui s'est surtout intensifié ces derniers mois, et qui inquiéterait la police aux frontières, selon un rapport que s'est procuré Le Figaro, lundi 4 août. Voici ce que l'on sait de ces flux migratoires.

Le nombre de migrants arrivés en Italie explose

Le phénomène part d'Italie. Entre le 1er janvier et le 30 juin, le pays a accueilli plus de 60 000 migrants en situation irrégulière, contre 8 000 l'an passé sur la même période. Près d'un tiers de ces migrants viennent d'Erythrée. Ils traversent la Méditérranée par voie maritime : le bateau naufragé le 3 octobre 2013 au large de l'île de Lampedusa, faisant 366 morts, transportait en grande partie des Érythréens.

Cet afflux se reporte ensuite en partie sur la France. Alors que 68 Erythréens avaient été interpellés en France entre janvier et mars, ce chiffre est passé à 694 en avril, 1 845 en mai, et 2 628 en juin. Des migrants qui arrivent "principalement par TGV, avec des billets en règle" selon un agent "en poste dans la région niçoise" et cité par le quotidien national.

La France, destination de transit pour les Erythréens

"Ils ne cherchent pas une demande d'asile en France, selon le préfet des Alpes-Maritimes. On voit qu'ils cherchent à gagner des pays d'Europe du Nord", comme le Royaume-Uni, l'Allemagne ou la Suède. Si ces migrants ne créent selon lui pas d'incidents particuliers, des heurts entre Erythréens et Soudanais ont fait plus de 50 blessés entre lundi et mardi 5 août à Calais, où les candidats à la traversée de la Manche sont devenus "trop nombreux", de l'aveu même des associations de soutien aux migrants.

Ce phénomène est la conséquence "du refus de l'Union européenne de venir en aide à l'Italie, qui l'a demandée", sans réponse, d'après le porte-parole de l'association France Terre d'Asile. Pour lui, Rome "laisse passer un certain nombre" de migrants. Et, côté italien comme côté français, on rechigne à renvoyer les Erythréens dans leur pays. Selon le préfet des Alpes-Maritimes, les deux tiers des interpellés sont "réadmis en Italie", et, explique Le Figaro, plus de 800 d'entre eux ont fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français "libres", c'est-à-dire par eux-mêmes.

Un régime qui viole les droits de l'homme

Il faut dire que l'Erythrée, petit Etat de la Corne de l'Afrique, est considérée comme un des pays les plus fermés et secrets du monde, souvent comparé à la Corée du Nord. Fin mai, l'ONU a adopté une résolution condamnant fermement "la poursuite des violations généralisées et systématiques des droits de l'homme et des libertés fondamentales commises par les autorités érythréennes". Arrestations et exécutions arbitraires, torture, restrictions de la liberté d'expression, service militaire forcé et à durée indéterminée : la liste des exactions du pouvoir de l'inamovible Isaias Afwerki est longue, et la situation aurait empiré depuis une tentative ratée de coup d'Etat il y a deux ans. 

Ils sont donc nombreux, plus de 4 000 par mois selon l'ONU, à tenter de quitter le pays, bravant les gardes-frontières qui ont pour consigne de "tirer à vue". Des camps de réfugiés répartis entre l'Ethiopie et le Soudan accueillent plus de 200 000 Erythréens, mais pour ceux qui voient plus loin, la région est de plus en plus inhospitalière. La Libye, l'Egypte ou Israël sont des destinations de moins en moins accueillantes, ce qui explique que les Erythréens arrivent, de plus en plus nombreux, aux portes de l'Europe.

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