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Les pêcheurs sénégalais en danger de mort dans les eaux de Mauritanie

Dans la nuit du 3 au 4 février 2018, une pirogue sénégalaise était arraisonnée par les garde-côtes mauritaniens, alors qu’elle pêchait dans les eaux territoriales de Mauritanie Un jeune pêcheur a été tué par balle. Cela a provoqué de violentes manifestation à Saint-Louis du Sénégal, le port de l’embarcation. Un fait-divers tragique qui révèle la situation critique de la pêche sénégalaise.
Article rédigé par Jacques Deveaux
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 3min

La ressource au large du Sénégal a été épuisée par la surpêche des bateaux-usines étrangers: chinois, russes, européens. La pêche traditionnelle sénégalaise a donc jeté ses filets dans les eaux plus poissonneuses de la Mauritanie voisine. Mais depuis janvier 2016, l’accord de pêche signé entre les deux pays est caduque. La Mauritanie impose désormais que le poisson pêché dans ses eaux soit débarqué dans ses ports. De plus, les bateaux étrangers doivent employer un équipage exclusivement mauritanien. Et il n’y a aucun passe-droit pour le voisin sénégalais.


Sur son site internet, La Tribune interrogeait Momar Seyni Ndiaye, un politologue sénégalais. Il note combien cette nouvelle donne imposée par Nouackchott est déséquilibrée. «Cela équivaut à inciter les pêcheurs sénégalais à adopter la nationalité mauritanienne et à résider dans le pays. La législation permettrait aussi à la Mauritanie de permettre à ses ressortissants de maîtriser les techniques de pêches pour lesquelles leur expertise est faible.»

Ainsi, la Mauritanie essaye également de conserver chez elle la plus value liée au mareyage et au travail du poisson. Et enfin de gérer les stocks, parmi les plus importants au monde.
 
Négociations en cours
Depuis 2016, selon le responsable des pêcheurs et mareyeurs de Saint-Louis, des négociations sont en cours entre les deux pays. En attendant un accord, le ministre sénégalais de la Pêche et de l’Economie maritime, Oumar Guèye, invite régulièrement les pêcheurs sénégalais à s’abstenir d’opérer dans les eaux mauritaniennes, le Sénégal n’étant «pour le moment» lié à la Mauritanie par aucun protocole d’accord de pêche.



Mais quand le poisson se fait rare, la tentation est grande. Les pêcheurs sénégalais jettent leurs filets dans les eaux territoriales mauritaniennes, où les garde-côtes font bonne garde. Selon La Tribune, 4800 bateaux de pêche sénégalais ont été arraisonnés. Les amendes pleuvent, «exorbitantes, plusieurs millions de francs CFA». Faute de solutions, plus de 10.000 bateaux restent à quai.
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Apaisement
«Il n'existe pas d'accord, mais cela ne doit pas justifier l'utilisation de balles réelles jusqu'à que cela entraîne mort d'homme», a déclaré le ministre Oumar Guèye, réagissant à l’incident du 3 février. Mais les deux pays jouent l’apaisement.

Le porte-parole du gouvernement mauritanien, Mohamed Lemine Ould Cheikh, a exprimé ses regrets suite à la mort du jeune pêcheur. Quant aux manifestations anti-mauritaniennes qui ont suivi à Saint-Louis, le porte-parole considère que «la situation n’est pas aussi tendue comme l’avancent certains».

Mais pour ce qui est du fond du dossier, silence radio.

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