Pour les «Nappy» d'Abidjan, «black is beautiful»
Les «Nappy», mélange de «naturel» et de «happy», de «Babi», un surnom d'Abidjan, se veulent un groupe 2.0 de réunions entre filles. 2400 membres et des convocations via facebook pour des réunions dans des lieux publics. Les femmes y échangent trucs, astuces, petits secrets et problèmes capillaires.
En Côte d'Ivoire, le cheveu disparaît généralement à l'adolescence sous les rajouts et les perruques. Artifices pour ressembler aux occidentales. Il n'est pas rare d'y voir des gestes plus extrêmes comme le blanchiment de la peau. Synonyme de réussite comme le cheveu lisse. Les «Nappy» prônent le retour au naturel, aux racines africaines. Des ateliers pratiques se tiennent pendant leurs réunions, des ateliers capillaires aux airs de groupe de paroles. «Comment fais-tu pour savoir si tes cheveux sont hydratés?», demande une jeune participante à Bibi Gagno, une juriste américano-ivoirienne de 29 ans. «Et bien... quand ils sont durs et secs, ça veut dire qu'ils ne le sont pas du tout», lui répond-elle. Avant de proposer ses propres produits cosmétiques à base de beurre de karité, d'huile de coco et de jojoba.
Mais aller à l'encontre de la tendance dominante peut provoquer des réactions inattendues. «Les gens ont du mal. Quand ils voient vos cheveux naturels, ils vous regardent comme si vous étiez une paria, comme s'il y avait un souci, alors que ça devrait être normal», s'indigne Liliana Lambert. Cette métisse européenne de 27 ans, d'origine ivoirienne, à la chevelure fournie est un «ovni» à Abidjan. «Les gens veulent tout le temps toucher mes cheveux. Ils ne connaissent pas. C'est juste de l'ignorance.»
Les femmes africaines ne savent «plus s'occuper de leurs cheveux crépus» qu'elles ont «des problèmes à sublimer», selon Miriam Diaby, l'une des fondatrices des «Nappy» de «Babi». Mais si «black is beautiful» fut le cri de ralliement des Américaines noires en 1960, les Africaines doivent encore s'affranchir du modèle blanc dominant. «La société n'aime pas les cheveux afros, qui débordent de partout. Les femmes sont donc obligées d'arborer des coiffures un peu plus conventionnelles, soit défriser ou tisser les cheveux», ajoute Miriam Diaby. Bibi Gagno, après une jeunesse passée aux USA, a créé une site omgilveyourhair.com (oh mon Dieu-j'aime tes cheveux.com). «Quand je suis arrivée à Abidjan, j'ai remarqué, et ça m'a marquée, que toutes les pubs montraient des femmes au teint clair avec les cheveux longs et lisses. Pourtant, ici, les femmes ont le teint noir chocolat.»
Cocody, quartier huppé de la capitale ivoirienne, a accueilli début février son premier forum dédié à la beauté africaine.
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