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"L'ambiguïté des politiciens africains" qui dénoncent l'ingérence de la France : le cas de la Côte d'Ivoire

Face à la crise électorale qui se profile en Côte d'Ivoire, Paris ne sait plus sur quel pied danser. Entre ceux qui pressent le gouvernement français de prendre position dans le débat houleux sur la présidentielle et ceux qui dénoncent son ingérence en Afrique. 

Article rédigé par Martin Mateso
France Télévisions
Publié
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Le président Emmanuel Macron reçoit son homologue ivoirien Alassane Ouattara sur le perron de l'Elysée le 9 juillet 2019 à Paris. (LUDOVIC MARIN / AFP)

Les commentaires vont bon train à Abidjan depuis que le chef de l'Etat ivoirien, Alassane Ouattara, a été reçu à Paris par son homologue français Emmanuel Macron. Cette rencontre qui a eu lieu le 4 septembre au palais de l'Elysée, a laissé un goût amer aux opposants ivoiriens. Ils avaient multiplié les appels au président français, en lui rappelant le message de félicitations qu'il avait adressé à son homologue ivoirien Alassane Ouattara. A l'époque, ce dernier venait d'annoncer solennellement qu'il renonçait à briguer un troisième mandat. Mais il a changé d'avis au mois d'août après la mort de son dauphin désigné.

"Le silence de la France vaudrait complicité"

"Le silence assourdissant de la France serait incompréhensible et vaudrait complicité", avait écrit dans une lettre ouverte l'opposant Guillaume Soro, ancien allié du président ivoirien qui espère lui succéder à la tête de l'Etat. Un autre opposant et candidat à la présidentielle du 31 octobre, Pascal Affi N'guessan, avait exhorté le président Emmanuel Macron à sortir du silence et à "ne pas cautionner le coup de force institutionnel" perpétré, selon lui, par Alassane Ouattara. A l'époque, avait-il rappelé au chef de l'Etat français, "vous aviez chaudement salué la décision historique d'un homme de parole et d'honneur", qui annonçait aux Ivoiriens qu'il renonçait à briguer un troisième mandat.

Emmanuel Macron s'est gardé de prendre publiquement une quelconque position sur la question. Certains analystes soulignent l'embarras de Paris, à quelques semaines de la présidentielle ivoirienne. Quoi que fasse le président Macron, on lui reprochera sa position d'ingérence, explique Gilles Yabi, analyste politique et directeur du Think Tank citoyen Wathi.

"Cette ambiguïté de certains politiciens africains est effectivement récurrente. Ils appellent à ce qu'il y ait moins d'ingérence ou pas d'ingérence de la France dans les affaires politiques internes. En même temps, dans des situations de crise politique ou autour des élections, des acteurs politiques appellent Paris à prendre position", observe-t-il.

Emmanuel Macron ne peut qu'être embarrasé, estime Gilles Yabi, d'autant plus qu'il avait salué la décision de son homologue ivoirien de ne pas briguer un nouveau mandat. Il est persuadé que le chef de l'Etat français gardera sa neutralité dans "le bourbier ivoirien", pour laisser aux Ivoiriens le soin de règler leurs problèmes.

Il faut sortir de cette ambiguïté. Je ne pense pas qu'il faille aller demander une prise de position de la France, chaque fois qu'il y a un problème dans un pays d'Afrique francophone, même si il y a des liens historiques avec la France

Gilles Yabi, analyste politique et directeur du Think Tank citoyen Wathi

à la BBC

C'est aussi l'avis de l'opposant ivoirien Mamadou Koulibaly qui défendra les couleurs de son parti (Lider) à la présidentielle du 31 octobre. Dans un message posté sur son compter Twitter, il s'est totalement désolidarisé des appels lancés à Emmanuel Macron par ses collègues de l'opposition.

Je ne fais pas partie de cette opposition qui demanderait à la France de jouer les arbitres dans le jeu politique ivoirien

L'opposant ivoirien Mamadou Koulibaly

Sur son compte twitter

La presse ouest-africaine suit attentivement les prémices d'une crise post-électorale qui risque d'éclater en Côte d'Ivoire. Le quotidien burkinabè Le Pays explique que si l'opposition ivoirienne a activé la fibre de l'ancienne puissance colonisatrice, c'est en raison du poids encore intact de la France, soixante ans après les indépendances, dans le choix des dirigeants devant "présider aux destinées de nos républiques bananières".

"On peut tout de même relever l'incohérence de la classe politique africaine, souvent prompte à pointer du doigt le paternalisme de la France, et qui se retrouve parfois paradoxalement à demander à Paris de se prononcer sur des affaires purement internes", déplore notre confrère.

Dans ce débat politico-ivoirien, explique le journal, les interpellations de l'oppostion ivoirienne "sonnent comme un cas de conscience posé à Paris" dont la logique, dans la défense des principes démocratiques en Afrique, "manque parfois de lisibilité, au point que l'on se demande si elle n'est pas faite par moments à la tête du client", observe le quotidien de Ouagadougou.

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