Accord de paix entre 14 groupes armés et le gouvernement de la République centrafricaine
Depuis le 24 janvier 2019, des négociations de paix se tenaient à Khartoum au Soudan. L’accord a été ratifié le 5 février. Mais ce septième accord ne doit pas faire illusion, selon les observateurs. Comme les précédents, il est peu probable qu'il permette la reconstruction du pays.
Les négociations se déroulaient sous l’égide de l’Union africaine. Son commissaire à la paix, l’Algérien Smail Chergui, a salué «un grand jour pour la République centrafricaine». De son côté, la mission de l'ONU, la Minusca, dans un compte-rendu, mettait en avant le climat de sérénité qui régnait lors de la signature de l’accord : «Des visages radieux, des embrassades, des photos pour immortaliser l’instant »…
Cet accord tiendra–t-il dans la durée ? Depuis 2013, pas moins de sept accords de paix ont été signés sans autre succès que de diviser les groupes rebelles en de multiples éléments armés. Ils contrôlent aujourd’hui entre 70 et 80% du territoire, laissant la portion congrue au gouvernement régulier.
Selon l’AFP, les accords ont longtemps achoppé sur la question de l’amnistie des responsables de crimes et d’exactions, notamment des chefs de guerre, dont plusieurs sont sous le coup de sanctions des Nations Unies, ou cités dans des affaires de violation des droits de l’homme. Un comité de suivi doit être installé pour faire revenir la paix dans ce pays ravagé par la guerre depuis 2012. L’ONU envisage même un allègement de l’embargo sur les armes, établi en 2013 pour permettre aux forces gouvernementales de sécuriser le pays.
En avril 2014, une force d’interposition de 14 000 hommes a été déployée par l’ONU. Une force qui a perdu 80 de ses hommes lors de multiples accrochages, sans parvenir à rétablir la paix dans le pays. En 2016, avec le désengagement de la France liée à la fin de la mission Sangaris, la Minusca s’est retrouvée bien seule.
#ConfPress| #MINUSCA condamne la tension intercommunautaire qui prévaut à Carnot. Elle salue le rôle actif joué par les autorités locales afin d’apaiser les tensions. La force @UN_CAR est intervenue pour empêcher une nvelle tentative de représailles contre la mosquée. #CARpeace pic.twitter.com/xdnAccWbmx
— MINUSCA (@UN_CAR) 30 janvier 2019
Depuis 2013 et la chute du président François Bozizé, la République centrafricaine est un pays fracassé par la guerre civile. Des forces paramilitaires musulmanes et chrétiennes font mine de protéger leur communauté respective, mais commettent plus d’exactions qu’elles n’en évitent.
Les deux fractions de 2013, musulmans et chrétiens ont essaimé, explique l’AFP. Les milices antibalaka, créées en réaction à la prise de Bangui par la Séléka musulmane, sont aujourd'hui divisées en deux branches.
Quatorze groupes armés
L'une est emmenée par Patrice-Edouard Ngaïssona, réputé proche de l'ex-président François Bozizé en exil. L'ancien "coordinateur" des milices a été transféré à la Cour pénale internationale (CPI) début janvier. L'autre branche dépend de Maxime Mokom (sous sanctions américaines). Pour compliquer un peu la donne, il a créé une alliance avec des groupes de l'ex-Séléka en 2015 en signant les accords de Nairobi.
Côté Séléka, le camp est divisé en deux groupes armés, le FPRC et l’UPC, dirigés par d’anciens généraux du mouvement. Depuis octobre 2017, ces groupes ont passé un accord de paix entre eux. Mais leurs deux dirigeants encourent des sanctions de l’ONU. Un troisième mouvement, le MPC, contrôle le nord du pays, près de la frontière tchadienne.
Futur échec?
Les commentaires sont en tout cas peu complaisants à l’égard de cet énième accord de paix. C’est un accord de façade car beaucoup de participants avaient trop à perdre, disent-ils. Et de citer l’ONU, l’Union africaine, la Russie, et bien sûr les belligérants. Le site Mondafrique estime qu’il est autant voué à l’échec que les précédents. "La recherche de l’intérêt général, la volonté politique de sauver l’unité nationale, le renoncement à la captation des richesses et ressources du pays sont absents aussi bien du côté des gouvernants que des groupes armés."
Peu d’éléments ont filtré de cet accord de paix. Selon l’AFP, les groupes armés réclamaient "la dissolution du gouvernement et la formation d’un gouvernement de sortie de crise". Ils voulaient également la mise en place de patrouilles mixtes avec l’armée régulière. Sans doute pour pouvoir contrôler au mieux cet embryon d’armée.
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