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Coup d’Etat au Burkina : la presse africaine affligée pour l'image du Continent

La majorité des médias africains est vent debout contre le coup d’Etat perpétré le 16 septembre à Ouagadougou. Les éditorialistes ne trouvent aucune excuse au général Diendiéré, révoltés par l’image que donne ce coup de force de l’Afrique. Seule la presse ivoirienne observe un silence assourdissant.
Article rédigé par Mohamed Berkani
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Le général Diendiéré au Palais présidentiel, le 17 septembre 2015. (AHMED OUOBA / AFP)

Le pléonasme «retour en arrière» revient comme un leitmotiv dans de nombreux journaux. Le coup d’Etat au Burkina Faso révolte de nombreux éditorialistes africains. Ils insistent pour la plupart sur cette image détestable d’une Afrique immature, habituée aux bruits de bottes, où le treillis remplace le costume ou le boubou à la tête de l’Etat.
 
«Quelle qu’en soit la raison, l’effet de coup de force contre la transition à quelques semaines seulement de son terme est désastreux. Désastreux pour notre démocratie malgré tout ce qu’on pouvait en dire. Désastreux pour nos maigres finances publiques puisqu’il faut tout recommencer dans la perspective de nouvelles élections, sans compter les préjudices des sanctions de la communauté internationale qui pourraient tomber. Désastreux pour l’image du pays dont l’insurrection avait été saluée quasi unanimement partout en Afrique et ailleurs», se désole le quotidien burkinabè L’Observateur Paalga.

 
Le journaliste malien Tiémoko ne cache son indignation dans un édito, Mille pas en arrière ! Il appelle à arrêter le coup d’Etat en cours. «La manœuvre de ces militaires nostalgiques doit être arrêtée. Par tous les moyens. Le Burkina et les Burkinabè ne méritent pas ça. La démocratie burkinabè ne mérite pas de subir de telles attaques déshonorantes. Il faut arrêter le coup d’Etat en cours au Burkina. Et vite. L’Afrique va mal à cause des agissements néfastes de ses dirigeants qui s’accrochent au pouvoir et à ses délices et qui n’hésitent pas à tuer pour préserver leurs acquis. Assez déstabilisé à cause des richesses de son sous-sol par les Occidentaux, le continent africain n’a que faire des coups d’Etat perpétrés uniquement pour préserver les intérêts d’un seul homme, d’une seule famille, d’un seul clan», s'étrangle d'indignation Tiémoko Traoré.
 
Gilles Olakounlé Yabi, initiateur du think tank citoyen pour l’Afrique de l’Ouest, WATHI (www.wathi.org) et ancien directeur du Projet Afrique de l'Ouest de l'International Crisis Group (ICG), ne cache pas son écœurement. «Comme l’an dernier (insurrection d’octobre 2014 qui a débouché sur l’exil du président Compaoré à Abidjan, NDLR), tous ceux qui croient en la possibilité de construire, dans les pays africains, des systèmes démocratiques authentiques, exigeants, complexes, capables de produire à la fois de la stabilité, de la sécurité, de la liberté et du progrès économique et social, doivent se mobiliser pour faire échec à la restauration autoritaire en cours à Ouagadougou. Comme l’an dernier, l’épilogue des événements au Burkina Faso sera crucial pour toute l’Afrique de l’Ouest et au-delà. Comme l’an dernier, nous sommes tous des Burkinabè», dit-il dans Jeune Afrique.
 
Pour Zine Cherfaoui, c’est un «retour à la case départ». Le journaliste d’El Watan s’étonne de la crédulité des autorités de la transition. «Au Burkina Faso, le temps a fini par donner raison à la petite poignée d’observateurs qui s’étaient montrés persuadés ces derniers jours que Blaise Compaoré, le président chassé du pouvoir par la rue au mois d’octobre dernier, et ses fidèles lieutenants n’allaient pas assister, les bras croisés, au démantèlement du régime qu’ils ont mis 27 ans à bâtir. Pour eux, il était certain qu’ils tenteraient une ultime tentative de reprise en main de la situation.» 

Silence étonnant à Abidjan. Premier pays concerné directement par les soubresauts politiques de son puissant voisin, la Côte d’Ivoire est restée étrangement silencieuse. La presse ivoirienne s’est contentée de reprendre quelques dépêches, sans apporter aucun commentaire.

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