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Alain Juppé questionné par un collectif sur son rôle pendant le génocide rwandais

Dans une lettre adressée à celui qui était ministre des Affaires étrangères à l'époque des événements qui ont fait 800 000 morts, des associations demandent la levée du secret défense.

Article rédigé par franceinfo avec AFP
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Alain Juppé, le maire de Bordeaux, ancien Premier ministre (1995-1997) et ancien ministre des Affaires étrangères (1993-1995 et 2011-2012), photographié ici le 19 mars 2014. (NICOLAS TUCAT / AFP)

Un collectif de citoyens a décidé d'interpeller le maire de Bordeaux, Alain Juppé, vingt ans après le génocide rwandais, durant lequel 800 000 personnes ont été tuées. Dans une longue lettre ouverte, la trentaine de signataires questionnent le "rôle politique" de l'ancien ministre des Affaires étrangères (1993-1995) d'Edouard Balladur pendant ces événements, et ses positions sur le sujet.

"Selon vous, la France n'a rien à se reprocher, bien au contraire", écrivent les signataires. Ceux-ci se présentent comme des "habitants de Bordeaux et citoyens attentifs au respect de la mémoire des victimes", auxquels se sont joints des journalistes, intellectuels et membres d'associations.

"Oser regarder le passé en face"

"Oseriez-vous encore, M. Juppé, laisser entendre qu'en 1994 plusieurs génocides étaient commis au Rwanda ? (...) Continuez-vous à prétendre, contre l'évidence des faits, que l'Etat français s'est opposé à la passivité de l'ONU devant le génocide des Tutsi ? Et que l'opération Turquoise n'était qu'une opération humanitaire, dont le but était de lutter contre ce génocide ?", interrogent-ils dans cette lettre relayée par l'association Survie, à l'origine d'une pétition "pour lever le secret défense" sur le rôle de la France au Rwanda.

"N'est-il pas grandement temps d'oser regarder le passé en face ?" ajoutent les signataires, expliquant leur démarche en disant souhaiter que "l'Etat qui nous représente ait la dignité de reconnaître ses erreurs".

"Incompréhension" et "indignation" d'Alain Juppé

Alain Juppé était chef de la diplomatie française à l'époque du génocide de 1994, stoppé par le Front patriotique rwandais (FPR aujourd'hui au pouvoir) de Paul Kagame. "J'ai moi-même dénoncé solennellement le génocide dont des centaines de milliers de Tutsi étaient victimes. J'ai été le premier responsable politique français à le faire devant le Conseil des ministres de l'Union européenne d'abord puis à l'Assemblée nationale le 18 mai 1994", a déclaré l'ancien ministre dans une réponse à cette lettre des associations.

Il a aussi souligné que la France avait, de son côté, lancé l'opération Turquoise "face à l'inaction internationale". Selon Alain Juppé, l'opération a permis de "sauver des centaines de milliers de vie" et avant le génocide, entre avril 1993 et avril 1994, la France a "tout fait pour réconcilier les parties en présence".

Il a enfin dénoncé "l'opération de falsification historique dont la France est régulièrement la cible depuis vingt ans", une opération suscitant "l'incompréhension" et "l'indignation", avant d'exprimer son "admiration" et sa "reconnaissance" pour "les soldats et diplomates qui ont permis à la France de sauver l'honneur".

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