A l'occasion du cinquantenaire de l'indépendance, le Sénégal a repris les bases militaires françaises de Dakar
Le président sénégalais Abdoulaye Wade a annoncé samedi que le Sénégal, ancienne colonie française, reprenait "à partir de ce jour 4 avril toutes les bases antérieurement détenues par la France pour y exercer sa souveraineté".
La France et le Sénégal ont un accord de défense depuis 1974, avec 1.200 militaires français "pré-positionnés" à Dakar.
Fin février, le président français Nicolas Sarkozy avait annoncé que seulement 300 soldats resteraient à Dakar.
Au passage du détachement français participant au défilé militaire du cinquantième anniversaire de l'indépendance du pays, un Sénégalais déclarait au milieu de la foule : "c'est une bonne chose que les militaires français partent. Je l'ai toujours souhaité".
Sur le boulevard général de Gaulle, une des principales artères de Dakar, le passage des militaires français s'est effectué sans manifestation particulière d'approbation ou de désapprobation. "Je veux que les militaires français partent. Autrement, c'est comme si le Sénégal n'avait pas d'armée (nationale) pour assurer sa sécurité", affirmait un maçon de trente ans. "Maintenant que nous sommes indépendants, ils doivent partir. S'ils restent (au Sénégal), c'est comme si nous étions toujours colonisés" par la France, disait de son côté un agent de sécurité d'une vingtaine d'années.
Outre la France, plusieurs pays africains dont les voisins du Sénégal participaient à ce défilé de quelque deux heures en présence de plusieurs chefs d'Etat africains et du ministre de l'Intérieur français Brice Hortefeux.
Présence militaire mais aussi socio-économique
Les bases françaises au Sénégal font actuellement travailler au moins "3000 civils" sénégalais, dont 400, sous contrat, sont payés directement par l'armée française, selon l'ambassade de France.
Un administrateur civil à la retraite remarque : "Quel va être le point de chute de ces travailleurs (sénégalais) dans les bases françaises ? Les deux gouvernements (français et sénégalais) doivent se pencher sur cette question sociale". "Si ça ne dépendant que de moi, ils resteraient. Nous avons toujours vécu en bonne entente" avec les militaires français au Sénégal, ajoute-t-il.
Un monument polémique
Le cinquantenaire de l'indépendance sénégalaise a été marqué samedi par une polémique autour d'un monument commémoratif.
Le monument de la Renaissance africaine a été inauguré à Dakar en présence de 19 chefs d'Etats africains, point d'orgue des commémorations au Sénégal, ancienne colonie française. La statue, haute de 52 mètres, sculptée en Corée du Nord, est comparée par ses promoteurs à la Tour Eiffel, la Statue de la liberté, ou le Corcovado de Rio de Janeiro.
Le président sénégalais Abdoulaye Wade a appelé à cette occasion à la mise en place d'"Etats-Unis d'Afrique". Il a affirmé que "le temps du décollage était arrivé" pour un continent de plus en plus courtisé pour les richesses de son sous-sol et son marché d'un milliard d'habitants. Après "cinq siècles d'épreuves, d'esclavage, l'Afrique est toujours là, pliant parfois mais sans jamais rompre. Elle est debout et décidée à prendre son destin en main", a-t-il assuré.
Le coût de la statue, qui domine la capitale, est estimé à plus de 15 millions d'euros (20 millions de dollars), mais c'est surtout l'idée qu'un tiers des recettes puisse revenir au président Wade au titre de droits d'auteur comme concepteur de la statue qui a été vivement critiquée.
Le monument en bronze représentant un couple et un enfant, construit par des Nord-Coréens dans un style vaguement soviétique, "n'a rien d'africain et le président Wade cherche à l'imposer au Sénégal et aux Africains", selon Moustapha Niasse, ancien ministre passé dans l'opposition.
Dans la matinée, plus d'un millier d'opposants avaient battu le macadam pour signifier leur colère: "Signons le départ de Wade", "Le peuple exige une éthique de gouvernance et rejette la gestion mafieuse du clan Wade", pouvait-on lire sur des banderoles.
Plusieurs leaders de l'opposition étaient présents, notamment le chef du Parti socialiste (PS, qui a dirigé le Sénégal de 1960 à 2000) Ousmane Tanor Dieng, ainsi que d'anciens Premiers ministres du chef de l'Etat passés à l'opposition comme Moustapha Niasse et Macky Sall.
Le président français Nicolas Sarkozy, absent à la cérémonie, a envoyé un message écrit à son homologue sénégalais.
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