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Invitée : Marion Cotillard au cinéma dans "Deux jours et une nuit" des frères Dardenne

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Article rédigé par franceinfo
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Certains évoquaient un film risqué pour elle mais des risques, elle en prend depuis déjà longtemps. C'est d'ailleurs ce qu'elle aime: ne pas ajouter des lignes sur un CV mais y ajouter des personnages, des facettes différentes. C'est chose faite une fois de plus. Bonsoir Marion Cotillard. Merci d'être avec nous ce soir. Vous avez tourné avec de grands réalisateurs, mais cela FGSÎG une surprise pour VOUS quand VOUS recevez cette reste une surprise pour vous quand vous recevez cette proposition des frères Dardenne.

M. Cotillard : Oui, parce qu'ils n'ont pas l'habitude de tourner avec des gens qui ont déjà traversé plein d'univers cinématographiques, travaillé avec plein de metteurs en scène. Et puis je suis française, ils ont généralement l'habitude de travailler pour les rôles principaux avec des acteurs belges.

L. Delahousse : Vous aimez le cinéma.

M. Cotillard : Oui, je suis une grande fan, j'ai vu tous leurs films et je les ai tous aimés.

L. Delahousse : Qu'est-ce qu'ils ont de si particulier, ces frères Dardenne? Ils ont ce souci du détail, il faut être au diapason.

M. Cotillard : Ils ont surtout un amour du spectateur, ils ont envie de le surprendre, de l'emmener dans leur cinéma qu'on peut qualifier de cinéma d'auteur. Je trouve d'ailleurs que cette qualification est très réductrice.

L. Delahousse : C'est un cinéma très populaire en fait, d'une proximité folle.

M. Cotillard : C'est un cinéma d'une richesse. Il y a tellement de choses, du suspense, une forme de thriller, des histoires d'amour, et aussi un cinéma social, très proche des gens. C'est un cinéma du réel. Mais en même temps, tous leurs scénarios sont purement cinématographiques. D'ailleurs, c'est la première fois que je tourne avec des réalisateurs qui parlent autant du spectateur sur le plateau. Dans "Le Fils", un de mes films préférés, ils nous emmènent dans une histoire et à un moment donné, on se retourne et on découvre une histoire totalement différente de ce que l'on avait pu imaginer. Ce sont des sensations, en tant que spectateur.

L. Delahousse : En vous écoutant, on comprend que vous qui n'aimez pas trop la promotion, vous avez ce film là en vous. "Deux jours et une nuit", un film signé des frères Dardenne, déjà récompensés de deux Palmes d'or. Un drame social, et au coeur de cette histoire, Sandra, ouvrière qui le temps d'un week-end va tenter de convaincre ses collègues de renoncer à leurs primes de 1.000 euros pour garder son emploi.

Marion Cotillard est une Sandra bouleversante, une jeune ouvrière licenciée après un long arrêt maladie, à moins que ses collègues acceptent de renoncer à une prime de 1.000 euros en échange de son retour.

"Je veux juste te dire que je voudrais que tu votes pour moi, pour que je garde mon travail.

D'un côté, Marion Cotillard, de l'autre, les frères Dardenne. Ils ont souvent monté les marches de Cannes mais jamais ensemble. On pensait même la rencontre impossible entre les deux cinéastes engagés et la star française oscarisée de "La Môme" devenue la nouvelle petite fiancée de l'Amérique, l'héroïne de "lnception", "L'Immigrante" de James Grey. Mais elle a prouvé qu'elle veut et peut tout jouer, et au cinéma, tout est affaire de désir.

Elle nous a captés, voilà! Il y a eu un coup de foudre cinématographique.

Cette comédienne, qui est tellement chargée déjà, une espèce d'icône, comment on va faire pour que le jour où on va la filmer, elle soit le plus nu possible.

Sandra a un week-end, "Deux jours et une nuit", pour convaincre ses collègues. Une jeune femme fragile qui va devoir surmonter ses blessures et retrouver confiance.

"Excusez-moi mais pour moi, c'est important de le voir, il peut m'aider a ne pas perdre mon travail.

La prime, c'est parce qu'on a bossé, t'as pas honte de venir nous piquer notre fric.

Combien acceptent de perdre la prime.

Quatre avec toi. J'en ai encore neuf à voir.

Tu vas y arriver.

C'est une histoire d'aujourd'hui, un film lumineux, le parcours d'une femme modeste à la reconquête de sa dignité et l'un des plus beaux rôles de Marion Cotillard.

L. Delahousse : Un des plus beaux rôles.

M. Cotillard : C'est une de mes plus grandes aventures.

L. Delahousse : Vous avez beaucoup travaillé pour ce film, car ils sont exigeants. Parfois, il y a eu 56 prises! Juste pour avoir l'émotion au moment précis.

M. Cotillard : Il y a eu beaucoup plus que ça! Mais on tournait en plans séquences. Cela amène une dynamique, une difficulté pour obtenir la justesse, l'authenticité tout au long de la scène. Et des scènes qui peuvent parfois faire 6 ou 7 minutes. Cela demande déjà beaucoup de prises. Après, les frères ont un niveau d'exigence inégalé mais c'est tout ce que j'aime. Ils m'ont offert mon rêve de relations avec des réalisateurs.

L. Delahousse : Il y a un travail souvent incroyable en amont. Vous prenez toujours des notes dans la nuit pour préparer votre personnage.

M. Cotillard : Je ne travaille jamais de la même façon. La méthode de travail naît du projet, des rôles, des metteurs en scène. Certains ne proposent pas de travail de préparation, dans ces cas-là, j'invente ma propre méthode de travail. Avec les frères, on avaü avait un mois de répétitions dans les décors, avec les acteurs, presque dans les costumes. Les répétitions, c'était surtout pour trouver la dynamique entre l'acteur et la caméra. Comme ce sont des plans séquences, il ne fallait pas perdre de temps dans cette recherche-là. Ce n'était pas focalisé sur le jeu mais tout était interdépendant. Je travaillais dans mon coin à l'intérieur dé ces répétitions aussi. Sur le tournage, ils se concentrent entièrement sur Ie le jeu.

L. Delahousse : Un travail sur le phrasé, le mot, le verbe? Sur la gestuelle, l'attitude, la façon de se mouvoir.

M. Cotillard : Cela, c'est un travail que je fais sur tous les personnages. Je veux trouver leur manière de respirer, de se comporter et de parler. Quelqu'un qui parle fort ou pas, qui se tient droit ou pas. Cela en dit beaucoup sur la personnalité d'un personnage. La, les frères m'avaient demandé de perdre mon accent français parisien. Je n'avais pas envie de prendre un accent belge pour autant. Il fallait que je trouve une teinte.

L. Delahousse : Il fallait être sur le fil pour ce personnage, Sandra. Elle peut basculer, elle se bat, elle va voir les autres pour essayer de les convaincre et en même temps de ne pas les forcer.

M. Cotillard : Oui, ce n'est pas elle contre les autres. Les gens qui ont voté pour leurs primes en ont besoin, ils sont tous dans la même économie. Elle sait très bien que ce n'est pas contre elle mais pour sa survie, la survie de sa famille, c'est quelqu'un qui sort d'une dépression et qui est en train de reconstruire, qui peut facilement vaciller. Elle a des gens autour d'elle qui vont la soutenir et qui vont l'aider à découvrir la force qu'elle a, pour faire de cette simple personne une héroïne.

L. Delahousse : Une héroïne de la solidarité, de l'émotion, de l'amour de son mari. Il y a 20 ans, vous rêviez de devenir comédienne. Avez-vous été au-delà de vos rêves.

M. Cotillard : Oui.

L. Delahousse : Si on vous demandait de choisir entre faire 50 nouveaux films ou bien 5 films avec les Dardenne? Vous choisissez quoi.

M. Cotillard : Je rêve de retourner avec les frères. Ils m'ont offert tout ce que j'attendais d'une relation de travail, d'aller dans la profondeur, d'aller le plus loin possible dans le détail pour qu'on oublie le travail, pour qu'on dépasse tout et qu'on reste en même temps dans le cinéma. Pour moi, ils sont parmi les plus grands réalisateurs au monde.

L. Delahousse : Vous n'avez plus jamais de moments de panique, de doute? Vous avez parlé de cela avec un homme en Inde, de la reconnaissance.

M. Cotillard : J'associais l'ambition à quelque chose de négatif alors que j'en avais. J'avais l'ambition de grands rôles, d'une grande carrière, de reconnaissance. Mais j'avais du mal à gérer cela, ce besoin de reconnaissance, ce besoin d'être aimée qui était pour moi un peu honteux. J'ai effectivement rencontré quelqu'un en Inde, lors d'un voyage personnel. Il m'a dit que si je n'acceptais pas mon ambition, qui n'était pas négative, je n'irais jamais nulle part. Je resterais toujours bloquée avec mon questionnement. J'ai toujours eu envie de jouer mais quelque chose était bloqué.

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