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Invité : Francis Huster

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Article rédigé par franceinfo
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L'heure de notre invité. Il rêvait de devenir footballeur, ses parents le voyaient chirurgien. Il est depuis 40 ans sur scène presque tous les soirs. Des centaines de rôles et autant de personnages et de masques. En ce moment, il est au théâtre à l'affiche de 3 pièces. 14 représentations par semaine, une course effrénée pour un homme, un comédien. Bonsoir Francis Huster. Merci d'être avec nous. Vous aimez ces grands hôtels parisiens qui ont une âme, qui se transforment et qui deviennent parfois insipides.

F. Huster : Je les adore. Je passe mon temps très souvent dans les hôtels en France, en Suisse, à Bruxelles aussi. Ce sont des endroits où les fantômes se baladent et j'adore les fantômes.

On va revenir sur votre vie de comédien. Quelques mots sur l'actualité. C'est une étrange scène de théâtre, la politique.

F. Huster : C'est ce que disait Shakespeare, "Le monde est un théâtre". Le succès de la pièce sur Einstein vient du fait qu'il dit la vérité. Je n'oublierai jamais que Roosevelt est resté les bras croisés pendant deux ans, en 39 et en 40. L'Amérique ne s'est levée que quand Pearl Harbor a eu lieu. Là, je suis tétanisé par Barack Obama. Je le trouvais vraiment magnifique, extraordinaire, enfin un Noir à la tête des Etats-Unis. Et que fait-il? Il a les bras croisés avec ce qui se passe en Ukraine. On va se retrouver face à un Anschluss russe? Poutine est-il en train de prendre la main sur les territoires voisins de façon volontaire ou involontaire? J'ai toujours soutenu Manuel Valls pour une raison très simple: je trouve qu'il a du caractère. Sur un terrain de foot, il y a un sélectionneur. Tant qu'il y a eu Didier Deschamps, on a gagné, et je pense que le monde a besoin en ce moment d'un patron. Je suis estomaqué par le fait que Barack Obama a peut-être oublié d'être ce patron.

L. Delahousse : Il ne peut pas être patron du monde.

F. Huster : Il doit l'être! Et l'Europe? Aime-t-il vraiment l'Europe? Est-ce que Roosevelt aimait vraiment l'Europe? Je pense aux 57 millions de morts pendant la Seconde Guerre mondiale. Einstein a été élu la personnalité du siècle, il y a le drame épouvantable de la bombe atomique, mais n'oublions pas qu'il nous a prédit ce XXIe siècle. On n'a pas le droit de croiser les bras.

L. Delahousse : Restez avec moi, on revient sur votre carrière.

Entrée en scène dans cinq minutes, Cristiana Réali est prête, où est Francis Huster? Le voilà enfin, concentré. Dix-huit ans de vie commune avant de se séparer. Cinq ans plus tard, ils lisent ensemble une correspondance amoureuse entre un homme et une femme tout au long de leur vie.

Je ne m'attendais pas à être aussi émue en jouant. Pas seulement par mon rôle, également par ce qui se disait par rapport à nous.

Francis Huster a aussi été le professeur de théâtre de Cristiana. Ils ont joué dix pièces ensemble. Le théâtre, une longue histoire. Francis Huster a 17 ans, il est au cours Florent. Suivront dix ans à la Comédie-Française et plus d'une centaine de pièces de théâtre.

La première fois que je l'ai vu, je pensais que c'était un hurluberlu, je me suis dit qu'il serait peut-être acteur de cabaret, qu'il ferait rigoler tout le monde.

Au cinéma, en tout cas. On se souvient du fou rire du "Dîner de cons". Romantique aussi, dans "Qu'est-ce qui fait courir David?". Et toujours un boulimique de travail. Et pour jouer "Love letters", il a même accepté de mener trois pièces de front.

L. Delahousse : Acomprendre vous avez fini par comprendre pourquoi cette course effrénée sur la scène.

F. Huster : Je suis juif, une partie de ma famille est morte dans les camps de concentration. J'ai toujours trouvé dans la France quelque chose d'extraordinaire, de pouvoir devenir français par mon métier, c'est-à-dire de consacrer toute ma vie à la culture française. J'ai eu la chance de croiser des hommes extraordinaires. Jean-Louis Barrault, Jean Villard. Ils m'ont appris a aimer la France. Et le public français est extraordinaire parce qu'il est en arc-en-ciel. Ces trois pièces me touchent beaucoup, elles sont très émouvantes. Elles parlent de la chose principale: on n'a pas le droit de baisser les bras face à la guerre, à l'amour, à Dieu. J'ai la chance d'avoir des partenaires extraordinaires. J'ai accepté ce projet avec Cristiana pour nos filles. On est merveilleusement dirigés. J'étais au début un acteur très théâtral, très "Comédie-Française". Mais on m'a redressé les bretelles, et je suis très heureux au Théâtre Rive Gauche.

L. Delahousse : Cela vient contredire une citation étonnante. "J'ai toujours détesté la vie, sinon je n'aurais pas fait ce métier".

F. Huster : Je suis très heureux sur scène et très malheureux dans la vie. Dans le sens où je ne sais pas où est ma place. C'est un bonheur total, là, j'adore mes filles, elles me le rendent, mais je ne suis heureux que sur scène dans le sens où j'ai l'impression de servir à quelque chose. C'est pour cela que j'aime Eric-Emmanuel Schmitt. J'aime Shakespeare, Musset, Giraudoux. J'ai l'impression de servir à quelque chose quand je suis aussi dans les films, les comédies de Lelouch ou de Francis Weber. Je ne peux pas supporter les faux culs, notamment dans mon métier ceux qui au lieu de passer leur temps à servir les grands textes qui élèvent l'âme du public, sans prétention, se servent eux-mêmes. Je ne suis pas un homme d'argent ou de pouvoir, sinon j'aurais dirigé des théâtres. Mais j'essaye de défendre les jeunes, de leur faire apprendre leur métier et surtout d'aimer la France. En 98, on a demandé comment allait s'appeler le Stade de France, et c'est ma proposition qui a été retenue car la France est tellement extraordinaire, elle représente des valeurs essentielles, extraordinaires. Ce n'est pas vrai que les Français sont racistes, ils aiment la France, ils aiment aller vers l'autre. vivez toujours avec passion, que c'est viscéral. Il n'y a pas eu à un moment donné une forme de prison qu'est devenu le théâtre, comme cela a pu l'être pour d'autres? Pour Jean-Louis Barrault, c'était devenu une prison.

F. Huster : Oui, c'est pour cela que je suis sorti de la Comédie-Française, que j'ai pensé que je ferais mieux de consacrer ma vie au théâtre des années 50 et 60. Mais maintenant, je ne peux qu'exploser en vol.

L. Delahousse : Avec des sacrifices, vous êtes passé à côté de beaucoup de choses.

F. Huster : Des sacrifices d'amour, on n'aurait jamais dû se séparer avec Cristiana. C'est ma faute, je suis complètement invivable, complètement fou! Les femmes de ma vie m'ont toujours foutu à la porte. C'est pour cela que je souhaite à mes filles de réussir dans leur vie.

L. Delahousse : On va regarder quelqu'un que vous aimez beaucoup je crois.

Vous avez déjà travaillé dans ce métier.

Non, mais j'ai des dons naturels. Je sais tout faire! Tout.

Qu'est-ce que vous avez comme formation.

Athlétique.

Et vous pensez qu'avec un physique pareil, vous pouvez faire du cinéma.

Je ne pense pas, j'en suis sûr.

Il a confiance en lui.

L. Delahousse : Justement, pourquoi lui? Vous l'aimez plus que tout, c'est pour vous le plus grand.

F. Huster : Le plus grand, c'est à la fois Jean-Paul Belmondo et Alain Delon. On a tort d'attaquer Alain, c'est un acteur exceptionnel, une lumière fabuleuse, un homme qui a consacré sa vie au cinéma. Quant à Jean-Paul, c'est un être humain bouleversant. Ce qu'il a fait est extraordinaire, revenir après ce qui lui est arrivé. On a eu la chance d'avoir Belmondo et Delon.

L. Delahousse : Merci. On va regarder quelques images de sport, vous êtes passionné de football. En Ligue 1, Saint-Etienne s'éloigne de l'Europe. Les Verts n'ont obtenu qu'un but partout en déplacement à Reims. Ce soir, le PSG se déplace à Lyon pour tenter de retrouver un peu de souffle.

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