Invité : Claude Brasseur au théâtre dans "La colère du Tigre"
M. Drucker : Il est l'un des plus grands acteurs français, sa voix est reconnaissable entre mille, chaque génération a son film culte, et sa filmographie, qui lui a valu deux César, est très éclectique. Il aimé autant Ié cinéma que la télévision ét Ié théâtre, trois genres qui le lui rendent bien. A 78 ans, il remonte sur les planches pour un face-à-face Clemenceau/Monet, avec Michel Aumont, "La colère du Tigre". Bonsoir Bonsoir Claude Brasseur. Merci d'être avec nous. D'abord, un mot sur l'actualité, on dit souvent que les politiques sont des acteurs. Un commentaire sur la semaine écoulée.
C. Brasseur : Les comparer à des acteurs, c'est les diminuer. Notre métier en tant qu'acteurs, c'est de mentir. C'est le contraire des hommes politiques. Ils ont un besoin de savoir s'exprimer, bien sûr, mais nous, on ne raconte que des histoires.
M. Drucker : A partir du 5 septembre prochain au Théâtre Montparnasse, vous incarnerez l'un des plus grands politiques de l'Histoire de France: Clemenceau, dans "La colère du Tigre". Qu'est ce qui a changé depuis cette époque? Vu d'aujourd'hui, nous avons le sentiment qu'il y avait plus de grandeur.
C. Brasseur : On dira la même chose des politiques d'aujourd'hui dans plusieurs années. Il y a toujours une nostalgie du passé. Je fais remarquer que Manuel Valls est un admirateur de Clemenceau.
M. Drucker : Alors, cette pièce, mais aussi "Merci", votre autobiographie sont l'occasion de revenir sur votre carrière.
En villégiature au soir de leur vie, deux vieux amis: Claude Monet, le peintre impressionniste, et Georges Clemenceau, l'ancien président du Conseil. Monet, c'est Michel Aumont, et Clémenceau, Claude Brasseur. Même âge, 78 ans, et même complicité sur scène.
Il a une puissance formidable, une virilité impressionnante, comme probablement Clemenceau. Alors que Monet, c'est un artiste. Mais ils s'entendent très bien.
Claude Brasseur renoue ainsi avec ces dialogues ciselés qui ont fait le succès du "Souper" entre Fouché et Talleyrand.
"Plus les temps sont troublés, plus l'amitié est précieuse.
Je dirais même nécessaire entre certaines personnes.
Mais ses premiers grands rôles, Claude Brasseur les devait à la télévision, quand Rouletabille et Vidocq touchaient un large public.
"Entre hommes, on pourrait se comprendre!.
Il enchaînera près de 90 films. Parmi eux, d'énormes succès.
Et dans la tradition de Pierre Brasseur, son père, c'est au théâtre que Claude se retrouve toujours. Et aujourd'hui encore, après 60 ans de carrière.
"J'ai trouvé mon titre cette nuit: "Au soir de la pensée." Avec mon visage de plus en plus crépusculaire.
Vous avez un visage splendide de vieux tigre.
M. Drucker : Vous portez un regard très tendre sur votre.
C. Brasseur : Il y a quelque chose de merveilleux dans le métier d'acteur, c'est un refuge. Lorsqu'on suit l'actualité, c'est bien de se réfugier au théâtre, cela permet de s'évader de l'actualité. C'est plus agréable de vivre cela sur scène que ce qui se passe dans les différents conflits dans le monde.
M. Drucker : Vos parents, Pierre Brasseur et Odette Joyeux, parrain Ernest Hemingway, famille d'artistes, de saltimbanques. Chez les Brasseur, on est comédien de pere en fils depuis 1820, c'est extrêmement rare. Avez-vous le sentiment d'être un artisan.
C. Brasseur : Oui. Un artiste se retrouve seul devant le mystère de la feuille blanche. Pour moi, c'est un travail d'équipe.
M. Drucker : Quel est votre savoir-faire à vous.
C. Brasseur : C'est de batifoler, de changer de rôle. J'ai été Fouché, Napoléon, homosexuel, je suis passé par tous les états. Je ne peux pas m'empêcher de penser à mon adolescence. Lors des récréations à l'école, on joue aux gendarmes et aux voleurs. C'est ce que je fais en ce moment. Un coup je suis le gendarme, un coup je suis le voleur.
M. Drucker : C'est d'ailleurs en tête de "Merci", votre autobiographie parue chez Flammarion avec Jeff Domenech: "Brasseur père et fils, maison fondée en 1820", dans laquelle vous vous livrez aussi des confidences souvent taboues. Vous dites que vous n'avez jamais connu l'amour de votre père, que vous n'avez jamais pardonné à votre mère d'avoir écrit que le pire jour de sa vie est celui où elle a appris qu'elle était enceinte. Pourquoi était-ce une nécessité pour vous d'écrire cela à 78 ans? Je ne sais plus qui a dit qu'on devenait adulte quand on a pardonné à nos parents le mal qu'ils nous ont fait. J'ai volontairement fait cela sous forme de dialogue. Dans une autobiographie, on cache beaucoup de choses. Là, je préférais avoir quelqu'un qui me posait des questions.
C. Brasseur : Quels sont vos excès aujourdhui? Vous aimez bien comme vous le dites vous "faire sauter la tête" de temps en temps? Ce qui me plaît le plus, dans le métier, c'est le déguisement.
M. Drucker : A qui s'adresse le "Merci" de votre autobiographie.
C. Brasseur : Vous êtes bien placée pour savoir tout ce qui se passe dans le monde. Il s'adresse au fait que je suis là. Je dis merci, merci d'être là avec tout ce qui se passe dans le monde. Et il y a une petite différence. J'aime bien dans la rue lorsqu'il y a des gens qui m'arrêtent et qui me disent merci, cela me touche. C'est une satisfaction qu'a un médecin lorsqu'un malade vient lui dire merci.
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