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Bras de fer autour du projet de taxe sur les téléphones reconditionnés

Les entreprises de reconditionnement des smartphones, un secteur qui se développe en France, refusent de payer une taxe sur les produits numériques d'occasion. L'organisme qui doit la collecter a porté plainte.

Article rédigé par franceinfo - John Timsit
Radio France
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Temps de lecture : 2 min
Des téléphones en reconditionnement (illustration). (VINCENT ISORE / MAXPPP)

Les smartphones d’occasion coûteront-ils bientôt plus cher ? C'est en tout cas l'objet d'un bras de fer, entre d’un côté, les vendeurs de téléphones portables reconditionnés, un secteur en plein essor, et de l'autre, Copie France, un organisme chargé de récupérer une redevance sur le partage d'œuvres culturelles.

Louis, salarié d’une boutique de téléphones de seconde main, refuse de payer la redevance dite "copie privée" sur les smartphones reconditionnés. Avec un assujettissement de 10% sur le prix des téléphones, il craint une baisse de ses ventes : "Pour les appareils chers, comme 800 euros, 10%, c'est 80 euros de taxe en plus, moi en tant que consommateur, je me pencherais sur le coût : 'Est-ce que je prends vraiment un reconditionné ou est-ce que je prends du neuf ?'"

Une plainte pour tenter de récupérer les taxes

En clair, la redevance copie privée permet de rémunérer les artistes, auteurs et producteurs en droits d’auteurs. Smartphones, clés USB, ordinateurs... Tout produit numérique est normalement assujetti. Mais certains reconditionneurs ont décidé de ne pas payer. Ils avancent principalement des raisons économiques et écologiques. Benoît Varin, président de la fédération Rcube (la fédération professionnelle du réemploi et de la réparation), a écrit une lettre ouverte à Jean Castex : "On attend que le Premier ministre arbitre, pour dire qu'un produit qui a déjà été taxé ne doit pas être de nouveau taxé."

"On ne va pas payer plusieurs fois une taxe quand vous vendez votre téléphone sur Leboncoin ou dans une brocante."

Benoît Varin, président de la fédération Rcube

à franceinfo

L’organisme qui récolte la redevance, Copie France, a porté plainte pour tenter de récupérer la taxe sur les téléphones déjà vendus. Au total, 28 millions d’euros sont en jeu. Pour Bruno Bouthleux, président de l’organisme, tout produit reconditionné est une remise sur le marché : "Nous les avons assujettis, comme nous assujettissons tous ceux qui mettent à la disposition des consommateurs des appareils qui permettent de faire des copies. Qu'il y ait une, deux, trois, dix remises sur le marché, parce que l'appareil serait reconditionné plusieurs fois, ne change rien. Chaque mise sur le marché ouvre droit, parce qu'il s'agit d'un nouvel usager, à une nouvelle rémunération pour copie privée."

Le syndicat professionnel regroupant les entreprises spécialisées dans le réemploi des smartphones et autres produits électroniques et informatiques (Sirrmiet) dénonce de son côté les "paradoxes" du gouvernement, qui avait annoncé vouloir encourager le secteur. "Une belle filière vertueuse et pourvoyeuse d'emplois en France s'est constituée en quelques années. Cette nouvelle taxe est sur le point de la détruire en contradiction totale avec la volonté affichée du gouvernement", fustige l'organisation dans un communiqué.

Pour départager reconditionneurs et Copie France, le ministère de la Culture a sollicité la commission de la copie privée. Elle travaille actuellement sur un barème différencié, avec une redevance plus faible pour les smartphones reconditionnés. Son rapport est attendu en avril prochain. Plus de deux millions de téléphones reconditionnés ont été vendus en France l'an dernier, dans un marché estimé à 500 millions d'euros par les entreprises du secteur.

Projet de taxe sur les téléphones reconditionnés : bras de fer entre les acteurs du secteur

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