Les 10-15 ans majoritairement séduits par les théories du complot, selon une étude
Les jeunes sont exposés à ces théories largement relayées sur les réseaux sociaux. Un quart d'entre eux pensent que les médias traditionnels les "manipulent".
Dans une étude publiée mercredi, et réalisée par l'institut de sondages CSA pour Milan Presse, 85 % des jeunes de 10-15 ans interrogés sont séduits par au moins une théorie du complot et un quart estiment que "ce n'est pas impossible que les médias nous manipulent". Il y a une certaine porosité des théories du complot parmi ce public, car les jeunes "s'informent sur les canaux de diffusion privilégiés" par les complotistes (réseaux sociaux, YouTube...) pour faire prospérer leurs théories, explique Jérémie Peltier, directeur des études à la Fondation Jean-Jaurès. Il y a par ailleurs "quelque chose de gratifiant à croire dans une théorie du complot".
Jérémie Peltier a réalisé plusieurs études sur le complotisme, avec l'Observatoire du conspirationnisme Conspiracy Watch. Son directeur, Rudy Reichstadt, intervient régulièrement dans le podcast Complorama de franceinfo.
franceinfo : Les jeunes sont-ils particulièrement ciblés par les diffuseurs de fausses informations et ceux de théories du complot ?
Jérémie Peltier : Oui, parce que ces fausses informations et ces théories du complot sont relayées sur des canaux de diffusion privilégiés par la jeune génération : YouTube, les réseaux sociaux. Certes, les jeunes sont conscients que ces théories existent. Mais il y a quelque chose de gratifiant à croire en une théorie du complot. À la Fondation Jean-Jaurès, nous avons fait des études sur le sujet, montrant que les populations les plus poreuses aux théories du complot sont les jeunes et les classes sociales les plus défavorisées.
"Face à la complexité du monde, des phénomènes tels que les attentats par exemple, les théories du complot offrent une réponse simple, claire, qui donnent le sentiment que vous maîtrisez ces phénomènes."
Jérémie Peltier, directeur des études à la Fondation Jean-Jaurèsà franceinfo
Comment sensibiliser les jeunes à ces questions ? Leur apprendre à mieux décrypter les informations qu'ils voient ?
Il faut que cette jeune génération ait conscience que cela peut avoir des conséquences très importantes. D'abord d'un point de vue sanitaire, où l'on a vu que les théories du complot les plus plébiscitées étaient sur la vaccination. Et puis sur les démocraties. La façon dont un certain nombre de pays étrangers peuvent diffuser des fausses informations peuvent avoir des conséquences sur les choix démocratiques des jeunes.
Les jeunes sont parfois aussi au contact d'adultes sensibles aux théories du complot. Ils ne jouent pas le rôle de rempart ?
Non, puisque les adultes ne sont pas imperméables, eux non plus, aux théories du complot. Ils ne sont pas toujours une digue pour protéger les enfants. Un des éléments que l'on avait montré, avec Conspiracy Watch, c'est que le type de média par lequel on s'informe est déterminant. Plus vous indiquez vous informer via des chaînes YouTube, des réseaux sociaux, des canaux parallèles aux médias dits traditionnels, plus vous avez tendance à croire aux théories du complot. Je crois qu'il y a un fort impact des influenceurs, qui jouent un rôle de figure morale et d'autorité pour la jeune génération, mais aussi pour les adultes. Quand on voit par exemple les posts de chanteurs et d'acteurs célèbres, diffusant des théories farfelues, se disant suspicieux sur la véracité du virus, au début de la pandémie, sur les raisons pour lesquelles leur concert a été annulé, ça fait des dégâts puissants.
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