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Législatives : les candidats ont-ils le droit de se payer des posts sponsorisés sur Facebook ou Twitter ?

Depuis le début de la campagne, plusieurs candidats ont eu recours aux contenus sponsorisés sur les réseaux sociaux, une technique payante... et interdite par le Code électoral.

Article rédigé par Thomas Baïetto
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Le logo Facebook, en mars 2016. (Photo d'illustration)  (JOCHEN ECKEL / PICTURE ALLIANCE / AFP)

Sur Facebook ou sur Twitter, vous êtes sans doute déjà tombé sur un post "sponsorisé". Cette mention discrète apposée au message qui s'affiche dans votre fil d'actualités signifie que son auteur a payé pour que vous le lisiez. Une pratique courante dans le commerce ou les services et que certains candidats aux législatives de juin ont reprise à leur compte. Seulement voilà : c'est de la publicité commerciale, interdite par le Code électoral, comme l'a rappelé dimanche 28 mai Projet Arcadie, une plateforme spécialisée qui compile toutes les informations sur les parlementaires français.

Cette interdiction, valable dans les six mois qui précèdent l'élection, se fonde sur l'article L52-1 du Code électoral. "L'utilisation à des fins de propagande électorale de tout procédé de publicité commerciale par la voie de la presse ou par tout moyen de communication audiovisuelle est interdite", peut-on y lire. Elle est précisée par l'article L48-1, inséré en 2011, qui étend cet interdit à "tout moyen de communication au public par voie électronique". En théorie, le contrevenant s'expose à une amende de 75 000 euros.

Un simple "tract sur internet"

Cette règle est peu connue. Contacté par franceinfo, Jean-Pierre Meynet, candidat dans la 5e circonscription du Var, tombe des nues. Lâché par La République en marche au profit d'un membre du MoDem, il pensait avoir trouvé un "moyen économe et opportun" de faire connaître sa candidature. "J'ai payé 200 euros pour deux publications envoyées à 5 000 adresses de la circonscription, explique-t-il à franceinfo.

On ne lutte jamais à armes égales avec de grands partis, mais là, nous avions un outil qui pouvait nous aider à rattraper un décalage monstrueux...

Jean-Pierre Meynet, candidat dans le Var

à franceinfo

Chez Babette de Rozières, candidate Les Républicains dans la 17e circonscription de Paris, on est un peu surpris. "On a considéré que c'était un tract comme un autre, un tract sur internet. Tout le monde le fait, assure l'un de ses community managers sans donner le nom d'autres candidats. On l'a vu pendant la primaire et les législatives." L'outil a été utilisé à deux reprises, pour promouvoir deux vidéos de la candidate. Avec un certain succès : quand les vœux de son suppléant, Pierre Liscia, totalise 136 vues, les deux clips promus, eux, atteignent 27 000 et 52 000 visionnages. Budget : moins de 500 euros.

Une jurisprudence inexistante

Les candidats insistent sur leur bonne foi. "Quand je suis sur ma page Facebook, je n'ai pas le terme publicité, il me propose de booster mon post, c’est super attractif quand même", se défend Jean-Pierre Meynet. "On m'a dit que c'était autorisé jusqu'à l'ouverture de la campagne officielle", assure le community manager de Babette de Rozières. Alertés par notre coup de fil, tous les deux vont revoir leur stratégie. "Ce serait dommage d'être recalé pour 200 euros", reconnaît Jean-Pierre Meynet.

Une telle utilisation pourrait-elle aller jusqu'à l'annulation de l'élection ? Du côté du Conseil constitutionnel, on confesse que les conséquences d'un tel geste restent à établir. "Les usages et les outils à disposition des différents candidats évoluent un peu plus rapidement que la jurisprudence", explique-t-on, avant de rappeler qu'il faudrait prouver que cette utilisation est "de nature à modifier sensiblement les résultats de l'élection". De fait, le Conseil constitutionnel ne s'est appuyé sur l'article L48-1 qu'à trois reprises pour juger une élection. Et aucune ne concerne des messages sponsorisés sur les réseaux sociaux.

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