Sur le pont des Arts, la fin des cadenas d'amour brise le cœur des touristes
Ce lundi 1er juin, entre 700 000 et 1 million de ces "lovelocks", soit 45 tonnes de ferraille, ont été retirés des rambardes du célèbre pont parisien.
Le pont des Arts est enfin délesté de ses trop célèbres cadenas d'amour. Depuis 8 heures du matin, ce lundi 1er juin, entre 700 000 et 1 million de ces "lovelocks", soit 45 tonnes de ferraille, sont retirés des rambardes. Interloqués, touristes et badauds assistent à ce drôle de spectacle. Les grilles qui servaient de support aux cadenas sont déboulonnées une par une avant d'atterrir dans un camion-benne.
"C'est triste, juge Ronen, un Britannique qui vit depuis deux ans à Paris. Il y a un million d'émotions sur ce pont !" L'argument de la sécurité, avancé pour justifier cette décision, est recevable, reconnaît-il. "Mais avec les super ingénieurs que vous avez en France, on aurait pu trouver une solution, non ?" s'interroge-t-il, smartphone à la main, avant d'envoyer une photo sur Twitter.
Les touristes étrangers de passage devant le pont regrettent tous la fin de ce "symbole caractéristique de Paris", qui est pourtant devenu une mode il y a seulement quelques années. "C'est assez triste. Pour beaucoup de gens, cela signifiait l'amour éternel", témoigne une Canadienne de Vancouver. Sarah, une Australienne venue avec un groupe d'amis, se dit "très déçue" en tombant nez à nez avec les barrières fermant l'accès à la passerelle. Le cadenas qu'elle tient dans sa main, sur lequel elle a inscrit son nom, la date du jour, et un cœur, ne pourra pas être fixé sur le mythique pont des Arts. Elle ira donc le fixer ailleurs, promet-elle.
Peut-être sur la passerelle Léopold-Sédar-Senghor ? Depuis plusieurs mois, ses grillages servent de refuge aux cadenas que le pont des Arts ne peut plus supporter, faute de place. C'est ici qu'un couple d'Américains, Sunny et Bill, ont fixé leur cadenas, après s'être acquittés de 4 euros auprès d'un vendeur à la sauvette.
Lorsqu'ils ne râlent pas contre le détour engendré par la fermeture temporaire du pont, les Parisiens voient plutôt d'un bon œil cette grande opération de nettoyage. "C'était horrible, il fallait les retirer", appuie Françoise, qui habite près du Louvre. "Il y avait là comme une forme de vandalisme", estime une autre passante. La décision d'enlever les cadenas a surtout été prise pour des raisons de sécurité, après qu'une grille a cédé sous leur poids, il y a quelques mois.
Dans l'immédiat, les grilles et leurs cadenas vont être remplacés par des panneaux en bois décorés par quatre artistes. Cette exposition éphémère laissera place, à l'automne, à des panneaux vitrés sur lesquels il sera techniquement impossible de fixer quoi que ce soit.
La mairie espère que cette opération enverra un message suffisamment clair pour dissuader la pose de cadenas sur les autres ponts de la capitale. Le remplacement des grilles par des vitres est également prévu dans les prochaines semaines sur le pont de l'Archevêché, autre lieu de prédilection pour les amoureux de cadenas, près de Notre-Dame. Ailleurs, les cadenas seront détachés "un par un", affirme Bruno Julliard, premier adjoint à la maire de Paris.
Reste à savoir ce que deviendront les 45 tonnes de ferraille de cadenas décrochés du pont des Arts. Devant une foule de journalistes, dont beaucoup issus de la presse internationale, Bruno Julliard a précisé que les cadenas seraient pour l'instant stockés dans des entrepôts. "On ne pourra pas les faire fondre, a-t-il expliqué, car il y a trop de métaux différents." En attendant, il lance un vibrant appel : "Paris veut rester la capitale de l'amour, mais, de grâce, sans cadenas, car cela abîme le patrimoine."
Que les touristes se rassurent : l'entorse à cette règle ne leur vaudra pas une amende.
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