Nouvelle-Calédonie : "L'État doit rétablir une paix civile avant d'envisager de rétablir un dialogue politique", estime Christian Belhôte

L'ancien chargé de mission auprès du gouvernement de l'archipel était l'invité jeudi de France Inter.
Article rédigé par franceinfo
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Un policier municipal surveille une rue à Nouméa lors des émeutes en Nouvelle-Calédonie, le 15 mai 2024. (DELPHINE MAYEUR / AFP)

"ll est indispensable pour l'État de rétablir une paix civile avant d'envisager de rétablir un dialogue politique", a affirmé jeudi 16 mai sur France Inter Christian Belhôte, magistrat honoraire, chargé de mission auprès du gouvernement de Nouvelle-Calédonie de 2012 à 2014, puis de 2018 à 2021. La Nouvelle-Calédonie fait face à des émeutes qui ont fait quatre morts, dont un gendarme, et des centaines de blessés.

La France a décidé de déployer l'armée pour rétablir un semblant d'ordre : "Nous sommes dans une situation de violence extrême actuellement sur la Nouvelle-Calédonie. Il est indispensable pour l'État de rétablir une paix civile avant d'envisager de rétablir un dialogue politique. Donc la paix civile, elle, passera nécessairement par un appel aux forces de l'ordre", a estimé Christian Belhôte.

Selon lui, "il est naturel que le haut-commissaire fasse appel à l'armée", mais "il va falloir faire attention et rester dans une intervention proportionnée". Le souvenir de la prise d'otages d'Ouvéa en 1988 après des violences sur l'archipel hante encore l'État français.

"L'impartialité de l'État a été mise à mal"

Christian Belhôte se dit surpris par la "violence" des émeutes, mais, selon lui, la réaction était "prévisible". L'Assemblée nationale a adopté le projet de révision constitutionnelle qui prévoit l'ouverture du corps électoral à toutes les personnes domiciliées sur place depuis au moins dix ans pour les élections provinciales. Les indépendantistes kanaks y voient dans cette réforme un moyen de réduire l'influence du peuple autonome kanak qui représente 41% de la population de l’archipel.

Mais pour le magistrat, l'origine des tensions se situe bien avant, depuis la troisième consultation référendaire sur l'indépendance de la Nouvelle-Calédonie prévue par l'accord de Nouméa. Les indépendantistes du FLNKS avaient appelé à ne pas participer à ce référendum en raison du Covid-19. "On a senti naître des tensions et de fait, le dialogue s'est distendu. L'impartialité de l'État a été mise à mal et confiance et consensus, ce sont des mots qu'on a perdu de vue alors que ce sont les mots essentiels qui ont permis de construire les accords de Matignon et l'Accord de Nouméa", a-t-il. Le "non" l'avait emporté à 96,5%, mais l'abstention avait été massive.

Christian Belhôte a lancé une pique en direction de l'État français : "À vouloir pousser les acteurs de Nouvelle-Calédonie dans le dos, on ne leur laisse pas le temps d'aboutir à un consensus et de trouver une issue satisfaisante à une continuité à l'accord de Nouméa", a-t-il regretté. Emmanuel Macron a décrété l'état d'urgence en Nouvelle-Calédonie et appelé les loyalistes et indépendantistes à dialogué dès ce jeudi. C'est "bien sûr une bonne chose, mais c'est avant qu'on aurait dû prendre à bras-le-corps ce dossier", a-t-il affirmé.

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