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La campagne "droitisée" de Sarkozy divise l'UMP

Ambiance tendue au sein de la majorité, entre partisans de la droitisation de la campagne de leur candidat, ceux qui la relaient du bout des doigts et ceux qui la condamnent. Revue des troupes.

Article rédigé par Salomé Legrand
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Nicolas Sarkozy chasse les voix des électeurs de Marine Le Pen, ce qui n'est pas du goût de l'ensemble de la majorité. (JOEL SAGET / AFP)

Le virage à droite est assumé. Revendiqué. Martelé. A longueur de meetings, Nicolas Sarkozy multiplie les appels du pied en direction des électeurs frontistes, quitte à reprendre des propositions développées par Marine Le Pen elle-même - et jusqu'à son vocabulaire. Et si une partie de l’UMP soutient avec plus ou moins d’enthousiasme ce choix de campagne, il n’est pas du goût de nombreux ténors de la majorité.

La Droite populaire, ravie

Le très droitier courant de l’UMP, créé après la défaite aux régionales de 2010, souhaitait déjà que "la droite revienne à ses fondamentaux". C'est-à-dire, à son sens, à des thèmes comme la nation, la sécurité et l’immigration. Et ont vu dans le score élevé du Front national au premier tour la validation de leur stratégie.

Mardi 24 avril, les membres de la Droite populaire se sont réunis pour un déjeuner, avant de publier un communiqué intitulé "Immigration, insécurité : Hollande, c'est Jospin en pire". Et d’alerter les électeurs : "La France ne peut plus se permettre de revivre le laxisme de la gauche en matière d'immigration et d'insécurité, sauf à remettre en cause notre pacte républicain." Quant à la position de la majorité en cas de duel PS-FN aux législatives, ils sont clairs : "La Droite populaire ne votera jamais, jamais socialiste", a notamment déclaré sur Europe 1 Lionnel Luca, cofondateur du collectif.

Le gros des troupes, discipliné

Quand faut y aller, faut y aller. Voici en somme ce que pense une grande partie de députés, qui jette ses dernières forces pour faire réélire son président, à la peine dans les sondages. C’est le cas de Marc Le Fur, député de la 3e circonscription des Côtes-d'Armor et vice-président de l’Assemblée nationale, qui a digéré les éléments de langage et les répète dans l’ordre : "Nous avons entamé un autre match (…), nous sommes passés de neuf contre un à deux candidats face à face".  Tout y passe. Et de demander à François Hollande "d’aller jusqu'au bout de sa logique" et de dire que sa candidature "est celle du droit de vote des étrangers, du mariage homosexuel". "Il faut que ce soit très explicite", récite sans grande conviction le député, joint par FTVi.

Pour lui, le "premier tour a fait passer un message" et il salue au passage la stratégie "Buisson", ce conseiller très droitier de l’Elysée, sans qui "le score de Marine Le Pen aurait été encore plus élevé", estime-t-il. "Ces thèmes ont intéressé les Français, on a bien fait de les aborder. Et on fait bien de continuer." Mais, tout en soulignant, comme pour se rassurer, que "Nicolas Sarkozy n'est pas seul, François Hollande aussi se tourne très explicitement vers les électeurs du FN", il soupire que dans sa circonscription, il rencontre souvent des "gens (qui) en ont assez d'être embêtés dans leur vie quotidienne".

Les modérés, consternés

Et puis il y a ceux qui louvoient, comme Jean-Pierre Raffarin. Interviewé par Le Monde, l'ex-Premier ministre a préféré botter en touche : "Si j'exprimais aujourd'hui des réserves, j'affaiblirais mon camp." Mais il "exclut tout accord avec le FN" et salue la stratégie de Nicolas Sarkozy du bout des doigts : "La réponse européenne du président me convient totalement."

D’autres sont plus directs, comme Dominique Paillé, ex-porte-parole de l’UMP qui regrette sur Twitter que "la campagne s'enfonce dans la fange".

Ou Renaud Donnedieu de Vabres, secrétaire national de l’UMP, qui estime dans La Nouvelle République que "la stratégie choisie va à l'échec !".

Enfin, il y a Etienne Pinte, membre du courant des "humanistes", qui ne décolère pas : "La droitisation est une erreur. Que le président dise qu'il n'y aura pas d'alliance, c'est bien, mais si c'est pour reprendre tous les thèmes du FN à notre compte…" Et d’analyser : "La priorité des Français, et les sondages l'ont montré, c'est l'emploi et le pouvoir d'achat. L'immigration et la sécurité viennent bien après." Le député des Yvelines, qui espère que la campagne s'oriente vers des thèmes plus centristes, appelle d'ailleurs dans une interview à Mediapart (article payant) ses collègues à "montrer ce sur quoi ils ne sont pas d'accord".

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