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Crise du logement : les solutions des candidats

La Fondation Abbé Pierre invite, mercredi, les prétendants à la présidentielle à présenter leurs mesures en faveur du logement. Voici un tour d'horizon de ce que proposent les principaux partis.

Article rédigé par Gaël Cogné, Vincent Daniel
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 8min
Chantier de construction d'un immeuble à Calais, le 26 janvier 2012. (PHILIPPE HUGUEN / AFP)

Le logement est le premier poste de dépenses des ménages. En temps de crise, c’est forcément un thème majeur de la campagne présidentielle. La Fondation Abbé Pierre appelle quatre candidats à la présidentielle - François Hollande (Parti socialiste), Eva Joly (Europe Ecologie-Les Verts), Jean-Luc Mélenchon (Front de gauche) et François Bayrou (MoDem) - à signer, mercredi 1er février, lors de la présentation de son rapport annuel sur le mal-logement, un "contrat social" qui les engagerait sur la question. FTVi vous présente les mesures phares des principaux partis qui lanceront un candidat dans la course à la présidentielle, et les critiques de leurs détracteurs.

• UMP : augmenter la surface constructible de 30 %

Parmi les sept mesures pour "redresser l'économie française" présentées par Nicolas Sarkozy : l’augmentation du coefficient d'occupation des sols (COS). "Tout terrain, toute maison, tout immeuble verra sa possibilité de construction augmenter de 30 %", a annoncé le chef de l’Etat. La mesure remplit deux objectifs, aux yeux du président de la République : produire plus de logements et faire baisser les prix. Benoist Apparu, secrétaire d'Etat au Logement, attend "à peu près 40 000 logements supplémentaires par an" grâce à ce dispositif.

Ce qui coince : Le dispositif laisse les professionnels de l’immobilier plus que sceptiques. "Les propriétaires apprécient rarement qu'on construise des immeubles plus hauts dans leur quartier, explique François Bertière, PDG de Bouygues immobilier, au Figaro. On risque donc d'assister à une explosion des recours contre les permis de construire." La bataille pourrait aussi se jouer au niveau local : les conseils municipaux ont la possibilité de s’opposer à ces augmentations de surface en votant des délibérations spéciales. Autre bémol : "En raison de l’augmentation des droits à construire, les propriétaires de terrains vont être tentés de vendre plus chers", regrette Marie-Noëlle Lienemann (PS), ancienne ministre du Logement, interrogée par Capital.fr.

• PS : doubler le plafond du livret A pour financer des logements

Après avoir promis de durcir la loi SRU (solidarité et renouvellement urbains), qui impose 20 % de logements sociaux dans chaque ville, François Hollande affiche la volonté de construire 2,5 millions de logements intermédiaires, sociaux et étudiants. Soit "300 000 de plus que lors du quinquennat précédent, dont 150 000 logements très sociaux (à loyer très bas) grâce au doublement du plafond du livret A". Il passerait de 15 300 euros à 30 600 euros. La collecte doit permettre à la Caisse des dépôts de prêter plus (à des taux privilégiés) aux organismes sociaux de l’habitat.

Ce qui coince : "Ce n’est pas parce que on augmente le plafond du livret A que le financement du logement social sera mobilisé si l’Etat n’amorce pas la pompe", estime le député UMP Etienne Pinte. Le secrétaire d’Etat au Logement, Benoist Apparu, assure pour sa part qu’un peu plus de 124 000 logements sociaux ont été financés en France en 2011, et 600 000 depuis cinq ans, contre 265 000 entre 1997 et 2002, sous le gouvernement socialiste de Lionel Jospin. Par ailleurs, selon La Tribune.frle ministre de l'Economie et des Finances, François Baroin, juge la mesure "déstabilisante pour l'économie", en ce qu'elle "détournerait les épargnants de placements positionnés pour financer notre dette, ce qui est le cas de l'assurance-vie. Nous avons aussi besoin de fiancements pour nos entreprises."

•  FN : "priorité nationale" pour l'attribution des logements sociaux

Si Marine Le Pen prône un changement sémantique, pas de changement dans le fond. La candidate frontiste préconise la "priorité nationale" (au lieu de la "préférence nationale" de son père) pour l’attribution de logements sociaux. "La priorité nationale n'est autre qu'un protectionnisme social", déclare-t-elle. "En jouant la carte hypocrite d'une pseudo-générosité avec la Terre entière, qui consiste trop souvent à donner la priorité à des familles tout juste débarquées sur notre territoire et parfois même illégales car polygames, on asphyxie le logement social", explique Marine Le Pen au Monde.

Ce qui coince : L’instauration du concept de préférence nationale pour le logement social, comme dans tout autre domaine, devrait franchir un obstacle de taille : la Constitution. L’article 1er de la Constitution de la Ve République indique en effet que la France "assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d'origine, de race ou de religion". La France devrait aussi dénoncer la Convention européenne des droits de l'homme, signée en 1950.

Construction d'un immeuble au Havre, en 2005. (ROBERT FRANCOIS / AFP)

 • MoDem : une mutuelle pour libérer des logements

Le candidat du MoDem s'est peu exprimé sur le logement. Et pour cause : il attendait ce mercredi et le rapport de la Fondation Abbé Pierre pour présenter son programme sur la question. Selon des éléments livrés par le MoDem, pour libérer au plus vite "les 500  000 logements inoccupés en France", le candidat doit proposer "la mise en place d'une mutuelle initiée par l'Etat qui garantira auprès des propriétaires le risque d'impayés des loyers". Plus encore, la mutuelle "permettra aussi de supprimer vraiment les cautions".

Ce qui coince : Rien de neuf dans la proposition. Alors candidat de l'UDF, François Bayrou proposait déjà en 2007 des "assurances mutuelles". A l'époque, certains observateurs ont estimé que ses propositions étaient en marge de dispositifs déjà existants et ne permettraient pas de résorber la crise du logement.

 • Front de gauche : contraindre à baisser les loyers élevés

La cible de Jean-Luc Mélenchon, candidat du Front de gauche, c’est le prix des loyers. Radical, il propose non pas de geler des loyers, comme Eva Joly, mais de baisser, par la contrainte légale, les loyers élevés. Son idée est la suivante : "On calcule la moyenne des loyers dans le bassin et on ne permet à personne d’être au-dessus. Et voilà comment on fait une baisse."

Ce qui coince : L’idée n’a pas fait grand bruit, mais la proposition d’encadrer les loyers quand le marché est tendu, suggérée en décembre par Michel Sapin, chargé du projet du candidat socialiste, a été qualifiée de "stupide" par le secrétaire d’Etat au Logement, Benoist Apparu. "Le droit de propriété, ça veut dire quelque chose en France, c'est un droit qui est reconnu sur le plan constitutionnel", indique le secrétaire d’Etat, qui pointe un effet pervers : les propriétaires risqueraient d’arrêter de louer.

• Europe Ecologie-Les Verts : encadrer les loyers

Eva Joly, propose d’encadrer les loyers. La candidate écologiste veut également "instaurer un moratoire de trois ans sur les hausses de loyer" et "baisser les loyers de 20 %" à Paris. Il s’agit, selon Eva Joly, d”une régulation "plus juste, qui consiste à capter une partie de la rente pour lutter contre le mal-logement et à instaurer des mécanismes qui découragent la hausse des prix, en taxant les plus-values, les héritages et les donations, en arrêtant de faire des cadeaux fiscaux sans contrepartie sociale".

Ce qui coince : L’encadrement des loyers prôné par Eva Joly est exclu par la droite, qui partage les arguments des propriétaires. "Le blocage ou la réglementation des loyers n'ont jamais fonctionné dans le passé et ont aggravé les crises du logement, au détriment direct des locataires", estime le président de l’Union nationale de la propriété immobilière, Jean Perrin, sur Sicavonline.fr. "Remettre en cause le principe de liberté des prix fera fuir les bailleurs privés, derniers investisseurs aujourd'hui présent sur le marché locatif", prévient le représentant des propriétaires.

 

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