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Budget de la Sécu : suspension surprise des votes à l'Assemblée

L'exécutif pourrait recourir à l'arme controversée du vote bloqué pour contrer les écologistes et les frondeurs de l'aile gauche du PS.

Article rédigé par franceinfo avec AFP
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Le secrétaire d'Etat au Budget, Christian Eckert, le 11 juin 2014 à l'Assemblée nationale. (ERIC FEFERBERG / AFP)

Coup de théâtre à l'Assemblée nationale. A la surprise générale, le gouvernement a décidé, lundi 30 juin au soir, de remettre à plus tard les votes sur les articles et amendements au projet de budget rectificatif de la Sécurité sociale pour 2014. Une décision qui a provoqué la consternation dans l'hémicycle et l'indignation d'une partie de la majorité, car elle pourrait déboucher sur l'utilisation, par le gouvernement, de l'arme du "vote bloqué" prévu par la Constitution. Explications.

En quoi consiste cette décision ?

Dès le début de la discussion, le secrétaire d'Etat au Budget, Christian Eckert, a demandé "la réserve des votes" jusqu'au moment où le gouvernement "estimera utile et nécessaire de reprendre les votes". Cette manœuvre peut laisser présager un recours au vote bloqué, prévu par l'article 44-3 de la Constitution, sur tout ou partie du texte, ce qui permettra de ne retenir que les amendements présentés et acceptés par le gouvernement.

Pour l'instant, ce dernier n'a pas dévoilé ses intentions. "Le gouvernement fera savoir [mardi] s'il fera reprendre le vote des amendements ou s'il aura recours à d'autres procédures prévues par la Constitution", a ajouté Christian Eckert. Comprendre : le recours à l'article 44-3 de la Constitution n'est qu'une possibilité.

Pourquoi le gouvernement a-t-il reporté les votes ?

Dans l'entourage du Premier ministre, Manuel Valls, on a simplement justifié cette méthode auprès de l'AFP par la volonté d'"avancer dans les meilleures conditions". En fait, il semblerait que le gouvernement ait agi en réaction au dépôt d'un amendement de 25 députés socialistes "frondeurs" et du groupe écologiste prévoyant une CSG progressive. Une perspective repoussée par le gouvernement à une éventuelle réforme fiscale ultérieure.

"C'est manifestement à cause de cet amendement que nous sommes privés de vote", a lancé Isabelle Le Callennec (UMP), dont les propos ont été approuvés par certains à gauche. Dans les rangs du PS, de nombreux "frondeurs", prêts à défendre cet amendement, étaient en effet présents.

Quelles sont les réactions dans l'hémicycle ?

Le patron des députés PS, Bruno Le Roux, a salué une décision "sage" du gouvernement afin de permettre "le débat". Mais son groupe n'est pas au diapason. Christian Paul, l'un des frondeurs du PS, a dénoncé auprès de l'AFP le recours à "des outils rouillés qui n'honorent pas le gouvernement", face à des députés "nombreux et soucieux de défendre leurs propositions". Le vice-président (PS) de la commission des Finances, Pierre-Alain Muet, s'est aussi insurgé dans un tweet contre "une caricature de démocratie qui ôte le seul vrai pouvoir des députés : le droit d'amender".

Les écologistes ont évoqué une "crise des institutions", le Front de gauche un gouvernement qui "ne recule devant rien". Dans l'opposition, le président du groupe UDI, Philippe Vigier, a pointé "un blocage institutionnel majeur" et le chef des députés UMP, Christian Jacob, "une situation totalement inédite", en demandant une réunion immédiate de la conférence des présidents de l'Assemblée.

Que va-t-il se passer désormais ?

Les débats sont prévus jusqu'à mercredi soir avant un vote global de l'Assemblée le 9 juillet. Dès ce mardi matin, Manuel Valls a prévu de se rendre à la traditionnelle réunion du groupe socialiste à l'Assemblée, une occasion de resserrer les rangs mais aussi de s'expliquer sur cette décision de "réserve des votes".

L'après-midi, les débats seront rythmés par le vote du projet de loi de finances rectificative, qui prévoit quatre milliards d'euros d'économies et pour lequel le gouvernement s'affiche "très confiant".

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