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Attentats du 13-Novembre : il faut reconnaître "le préjudice d'angoisse" des victimes, le "préjudice d'attente" des proches

170 avocats du barreau de Paris réclament la prise en compte du "préjudice d'angoisse" dans l'indemnisation des victimes du 13 novembre. Pour Me Frédéric Bibal,  il s'agit de reconnaître "la souffrance supplémentaire d'être conscient d'une mort imminente".

Article rédigé par Bastien Deceuninck
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
L'hommage national pour les victimes des attentats du 13 novembre 2015 aux Invalides. (STEPHANE MORTAGNE / MAXPPP)

À quelques jours du premier anniversaire des attentats du 13 novembre 2015, 170 avocats du barreau de Paris publient un livre blanc dans lequel ils réclament la prise en compte du "préjudice d'angoisse" dans l'indemnisation des victimes, et du "préjudice d'attente" pour leurs proches. Des demandes que la secrétaire d'Etat chargée de l'Aide aux victimes, Juliette Méadel, s'est engagée personnellement  à soutenir. 

Pour Maître Frédéric Bibal, l'un des avocats signataires du livre blanc,  cela permettrait de reconnaître "la très grande détresse" des victimes, qui ont "basculé en quelques secondes d'un moment de loisir ou de fête à une scène de guerre".

franceinfo : Comment définir le préjudice d'angoisse ?

Frédéric Bibal : C'est ce qui est vécu par les personnes pendant un attentat terroriste. On prend conscience d'être dans un danger de mort absolu, d'assister à des faits absolument inouïs dans l'horreur qu'ils représentent. Cela commence dès que les terroristes entrent en action, et dure jusqu'au moment où les personnes vont soit malheureusement décéder, soit être prises en charge après l'attentat.

Vous réclamez aussi la reconnaissance du "préjudice d'attente", qui concerne plutôt les proches ?

Oui, c'est ce qui est vécu par les proches de la personne : la famille, les amis, à partir du moment où ils apprennent que la personne se trouve prise au piège d'un attentat, et jusqu'au moment où la vie peut reprendre son cours, mais qui ne sera plus jamais un cours normal. Généralement, il prend fin lorsque l'on apprend la mort de la personne, ou lorsque l'on retrouve un contact humain avec la personne qui a été blessée.

Ne pas reconnaître ce préjudice pour les victimes des attentats du 13 novembre, est-ce ne pas respecter leurs droits ?

En tout cas, c'est ne pas les mettre au niveau de ce qui a déjà été fait pour d'autres catastrophes. Lors de l'accident de car de Puisseguin en octobre 2015, les assureurs ont mis en place une plate-forme indemnitaire qui reconnaît amiablement les préjudices d'angoisse et les préjudices d'attente des proches. Nous demandons simplement cette même mise à niveau pour les victimes des attentats du 13 novembre et leurs proches. 

À combien peuvent être évalués ces préjudices ?

C'est forcément variable car nous ne voulons pas faire rentrer les victimes dans des cases. C'est aussi ce qu'attendent les victimes, qui ne veulent pas avoir à comparer leur souffrance à un barème. Le travail des avocats va être de proposer des critères justes, équitables, pour pouvoir prendre en compte des cas aussi différents. On ne peut pas indemniser de la même manière quelqu'un qui va succomber en quelques secondes sur une terrasse avec un préjudice d'angoisse relativement bref mais extrême, et quelqu'un qui va rester otage au Bataclan pendant trois heures. Mais, pour le moment, aucun de ces dossiers n'a été pris en compte par le Fonds de garantie des victimes d'actes de terrorisme.

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