"Contrôles au faciès" en France : cinq associations et ONG déposent plainte auprès de l'ONU

Les requérants reprochent à la France de violer la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discriminations raciales, qu'elle a signée en 1971.
Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Contrôle de police (photo d'illustration). (VALERY HACHE / AFP)

Cinq associations et ONG déposent une plainte auprès de l'ONU jeudi 11 avril pour dénoncer les "contrôles au faciès" en France, rapporte France Inter. Amnesty International, Human rights watch, Maison communautaire pour un développement solidaire, Pazapas Belleville et Reaji, saisissent les Nations unies - plus précisément le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale (CERD) des Nations unies - sur ce qu'elles qualifient de "contrôle au faciès".

Dans leur plainte, que France Inter a pu consulter, les requérants reprochent à la France de violer la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discriminations raciales, qu'elle a signée en 1971, et demandent à ce que soient constatées ces violations, "ainsi que la nécessité et l'urgence de mettre en œuvre toutes les mesures concrètes efficaces et pertinentes pour éliminer ces discriminations raciales".

L'enjeu est une "réelle protection des personnes ciblées par ces discriminations"

Il y a six mois, en octobre dernier, le Conseil d'État avait constaté, dans son arrêt, que les contrôles d'identité discriminatoires "ne se limitent pas à des cas isolés", sans toutefois qualifier la pratique de "systémique". Il avait cependant rejeté le recours des ONG, estimant ne pas pouvoir peser sur la politique publique de lÉtat. Toutes les voies de recours offertes par le droit français étant épuisées, les requérants avaient donc la possibilité de saisir une organisation internationale.

"L'enjeu est que la France respecte ces obligations internationales, qui ne sont pas seulement de sanctionner quand il y a discrimination - c'est un point important - mais de prévenir, de détecter et de mettre en œuvre tout ce qui est possible pour que cette interdiction des discriminations raciales soit effective en France et qu'il y ait une réelle protection des victimes et des personnes ciblées par ces discriminations", détaille Myriame Matari, avocate au barreau de Lyon, qui représente trois des requérants, via l'association (Re)Claim.

"Un usage excessif de la force"

Les associations et ONG reprochent également à l'État français de n'entreprendre aucune action "pour détecter les facteurs contribuant à la persistance de cette discrimination et s'attaquer à ce problème systémique". S'appuyant sur le témoignage de 38 personnes disant avoir été victimes de contrôles jugés discriminatoires, la plainte souligne également l'absence de traçabilité, qui contribue, selon ses signataires, à empêcher une protection efficace des personnes visées par lesdits contrôles.

En juillet dernier, à la suite des émeutes qui ont éclaté dans la foulée de la mort de Nahel Merzouk à Nanterre, le CERD avait publié une déclaration dans laquelle il s’était dit "profondément préoccupé par la pratique persistante du profilage racial" et par "l’usage excessif de la force dans l’application de la loi". La France avait, par la voie du ministère des Affaires étrangères, contesté ces accusations, jugeant ces termes "excessifs" et "infondés" et appelé l'organe de l'ONU à faire preuve de "davantage de discernement et de mesure" dans ses propos, dont elle a regretté "le caractère partial et approximatif".

Si l'ONU décidait de condamner la France à la suite de la plainte, cette décision n'aurait rien de coercitif mais n'en serait pas moins importante pour Myriame Matari : "C'est avoir enfin un organe international qui va suivre ce que la France fait et exiger un niveau de mesures et d'obligations qui soient à la hauteur de la gravité du problème". La décision ne devrait pas intervenir avant plusieurs années, le temps pour les autorités françaises de faire valoir leurs arguments auprès de l'ONU.

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