Accusation de meurtre contre refus de mariage : la famille Guerlain se déchire devant les tribunaux

Parfum de discorde. C'est un nouvel épisode dans le conflit familial qui déchire la famille Guerlain depuis 15 ans. Le fils du célèbre parfumeur est cité à comparaître lundi 17 janvier pour injures, menaces de mort, violences volontaires et harcèlement moral. La compagne de son père l'accuse d'avoir voulu tenter de la renverser en voiture. Une enquête a été ouverte par la gendarmerie pour tentative de meurtre. Lui dénonce un acharnement judiciaire. 

Jean-Paul Guerlain a aujourd'hui 84 ans, c'est un vieil homme diminué par la maladie. Une photo, prise par un huissier en novembre dernier, le montre recroquevillé sur son canapé, emmitouflé dans une couverture, qui tente de se réchauffer face à l'imposante cheminée sa résidence des Yvelines. C'est cette situation que veut mettre en avant Frédéric Bélot, l'avocat de Christina Kragh.

"L'un des plus grands noms de la parfumerie et du luxe, vit dans le dénuement, sans chauffage, ni eau chaude avec un frigo quasiment vide."

Frédéric Bélot, avocat de Christina Kragh

Christina Kragh, 63 ans, compagne du parfumeur depuis 15 ans, accuse le fils unique de celui-ci de leur rendre la vie impossible. "Tout est fait pour qu'elle se sente épiée, harcelée voire menacée. C’est une stratégie, une tentative de déguerpissement, une politique de terre brûlée, pour tenter de la chasser du foyer. Elle est épuisée, ne pèse plus que 48 kg, mortifiée par un stress permanent", s’emporte Frédéric Bélot.

"Aucun vêtement en cachemire"

L'avocat a donc fait venir un huissier, à trois reprises, entre le 16 et le 23 novembre dernier avec ce constat : "Le temps est froid. La température est fraîche dans la maison, inférieure à 15 degrés, et le taux d'humidité est élevé, note-t-il. Je visite le dressing et je constate que les tiroirs et les armoires sont pauvrement garnis en vêtements chauds et notamment aucun vêtement en cachemire", avant d'ajouter "que le bois n'a pas été ramené au plus près sous l'auvent et que Christina est incapable de porter sur une longue distance des bûches dans ses bras".

"Du grand n'importe quoi" rétorque l'avocat de Stéphane Guerlain, maître Pascal Koerfer. "La chaudière a été coupée, il a fallu quelques jours pour trouver un réparateur, Stéphane a même apporté des chauffages d'appoint pour son père".

Jean-Paul Guerlain atteint de la maladie d'Alzheimer

Pour comprendre comment le trio a pu en arriver là, il faut remonter à 2007. A l'époque le séduisant Jean-Paul Guerlain, décrit par ses proches comme "un homme à femmes", tombe sous le charme de Christina Kragh, une Franco-Danoise longiligne, passionnée comme lui de chevaux, dans une réception mondaine à Genève. Très vite elle viendra s'installer chez lui, dans la propriété familiale de 700 mètres carrés, le domaine des Mesnuls, situé près de la forêt de Rambouillet, dans les Yvelines.

Stéphane Guerlain, lui, a des doutes. Début 2013, un galeriste de la place parisienne l'appelle, bien embêté. Une dame cherche à lui vendre un tableau de Delacroix. Cette femme, c'est Christina Kragh. Or, dans ce petit milieu, tout le monde sait que l'œuvre appartient au célèbre parfumeur.

Dans la foulée, Stéphane Guerlain, qui est aussi avocat, fait une demande de curatelle renforcée, d'autant que la santé de son père décline. Il se déplace dans la propriété, fait l'inventaire de tous les biens. Sur place, il découvre que l'entourage de son père fait défection. Un à un, son chauffeur avec qui le célèbre parfumeur allait déjeuner tous les midis au bistrot du coin, sa femme de chambre, sa cuisinière, et sa secrétaire quittent les lieux, harcelés disent-ils par la nouvelle compagne de leur employeur.

Christina Kragh dénonce une tentative de meurtre

En 2018, la curatelle est transformée en tutelle par le juge vu "l'altération de plus en plus grande des facultés de monsieur Guerlain", note maître Pascal Koerfer. Jean-Paul Guerlain est atteint selon une expertise récente d’une forme de la maladie d’Alzheimer. Christina Kragh lancera près de huit procédures pour exiger un changement de tuteur mais la justice refuse. Même acharnement pour épouser Jean-Paul Guerlain, mais là aussi, la justice s'y oppose. Une justice qui l’a tout de même relaxée en octobre dernier. Le procureur de Versailles l’avait faite citer à comparaître pour "délaissement, abandon, mise en danger et défaut de soin à personne vulnérable". Si le tribunal a estimé qu'elle avait bien privé son conjoint de soins, cela ne constituait pas, juridiquement, "le délit de délaissement".

Quelques semaines plus tard, le 10 décembre dernier, Christina Kragh se rend à la gendarmerie de Montfort-L'Amaury, pour dénoncer une tentative de meurtre dont elle a été victime, selon elle, un mois auparavant. Dans cette plainte que franceinfo a pu consulter, elle raconte que la voiture de Stéphane, juste avant de rentrer dans sa propriété arrive derrière elle et vient la percuter au niveau de la hanche. Elle s'est alors jetée par-terre. Heureusement grâce au gros manteau qu'elle utilise pour les chevaux, elle n'a pas été blessée.

"Elle cherche à allumer des pare-feu"

"C'est un acharnement judiciaire, pour tenter de décrédibiliser la figure du tuteur" dénonce l'autre avocat du fils du parfumeur, maître Olivier Combe "car elle s’est cassée les dents sur le mariage". "Elle cherche à allumer des pare-feu", abonde Pascal Koerfer, qui déplore la médiatisation du conflit pour une famille qui a toujours cultivé la discrétion. "Mon client n'en peut plus et en même temps, il me dit qu'il n'a pas le droit d'abandonner."

"Il a promis à son père que, jusqu'à la fin de sa vie, il resterait dans sa maison. Il se sent une responsabilité morale et affective."

Pascal Koerfer, avocat de Stéphane Guerlain

Christina Kragh, elle, continue à multiplier les procédures judiciaires à son encontre. Ce lundi, Stéphane Guerlain doit être jugé pour menaces de mort, violences volontaires et harcèlement. Dans un enregistrement du 26 mais 2020, qu’elle a produit et confié à la justice, il la traite de "garce", et menace de lui "mettre la tête dans une botte de foin" et "de s’en prendre à ses chevaux". Et il vient d’apprendre qu’il serait bientôt, de nouveau, cité à comparaître pour violences volontaires à son égard.