Trois questions sur les incendies qui ravagent le sud-est de la France
Les pompiers sont mobilisés sur de nombreux fronts, cet été, mais les choses s'accélèrent depuis lundi, avec plus de 5 000 hectares partis en fumée.
Un nouvel incendie s'est déclaré près de Bormes-les-Mimosas (Var), dans la nuit du mardi 25 au mercredi 26 juillet, dans un département déjà très touché par le feu. Plus largement, en deux jours, 5 000 hectares ont été brûlés dans le Sud-Est et en Corse et plus de vingt secouristes ont été blessés.
>> Incendies dans le Sud-Est : suivez l'évolution de la situation dans notre direct
Quel est le bilan de la situation et quelles sont les causes de ces feux ? Cet épisode est-il exceptionnel ? Voici quelques éléments de réponse.
Quels sont les dégâts ?
• Des sites ravagés. Le feu a dévasté des sites exceptionnels dans plusieurs départements. Dans le secteur de La Croix-Valmer et d'Artigues, dans le Var, la forêt du Conservatoire du littoral a payé un lourd tribut. "On venait de fêter dix années sans incendie majeur, déplore à l'AFP François Fouchier, délégué régional. Il est à craindre que, localement, la survie de la population de tortues terrestres d'Hermann soit hypothéquée. On va retrouver des carapaces brûlées." La zone abrite aussi des lézards verts et une végétation remarquable, comme la barbe de Jupiter.
• Des pompiers blessés. Un pompier a été victime d'un fracture en combattant le feu à Bormes-les-Mimosas. Au total, sept pompiers ont été légèrement blessés à La Croix-Valmer et deux autres à Artigues. Quinze policiers, dont onze CRS, ont été légèrement intoxiqués par des fumées en Corse. Dans le Luberon, cinq pompiers venus en renfort d'Isère ont été blessés, sans que leur pronostic vital ne soit engagé. A Carros (Alpes-Maritimes), un pompier a été blessé et brûlé à la main. A La Bastidonne (Vaucluse), l'incendie a fait cinq blessés parmi les 500 pompiers. Deux d'entre eux ont été gravement brûlés au visage et aux mains.
• De nombreux dégâts matériels. Une scierie a été touchée et dix véhicules ont été brûlés à Olmeta-di-Tuda (Haute-Corse). Dans le Var, le feu a également détruit un cabanon à La Croix-Valmer et une maison à Ramatuelle. A Carros (Alpes-Maritimes), trois véhicules et un entrepôt ont brûlé et le préfet à également évoqué une "maison incendiée". Un garage automobile a été endommagé à Castagniers (Alpes-Maritimes)...
élan de solidarité pour le garage ravagé par l'incendie de Castagniers près de Nice https://t.co/8o9iLBaG2a
— France Bleu Azur (@francebleuazur) 20 juillet 2017
Pourquoi ça brûle autant ?
• Un épisode de sécheresse. "La région est toujours dans une intense période de sécheresse, explique Thomas Curt, de l’Institut national de recherche en sciences et technologies pour l’environnement et l’agriculture (Irstea). Un épisode conjugué à celui de l'année passée, qui "avait laissé beaucoup de végétation morte accumulée au sol et dans les arbres, des combustibles idéaux, souligne Michel Vennetier, ingénieur-chercheur. Et cette année, les pins ont perdu leurs aiguilles plus tôt que d’habitude."
• Le mistral fait courir les pompiers. Certaines années sont plus propices au mistral que d'autres. Dès dimanche, Météo France avait placé le Var en "risque incendie de forêt exceptionnel" et les Bouches-du-Rhône en "risque très sévère", en raison du vent violent et de rafales pouvant atteindre 90 km/h. "Avec ce vent, le feu se propage très vite, explique Michel Vennetier. Si les pompiers ne l’arrêtent pas dans les premières minutes, il devient un grand incendie".
• Le loup ? "Cette année, la forêt n'a pas été entretenue, il n'y a pas eu de débroussaillement", se désole mardi Gabriel Magne, le maire d'Artigues (Var), d'où est parti un important incendie. Et selon un éleveur local, Gilbert Villa, c'est peut-être à cause du loup. "On ne peut plus aller en forêt et faire le débroussaillement. Avec les troupeaux, on était payé pour débroussailler les pare-feu. Cela fait deux ans que j'ai arrêté", à cause de l'animal.
• Recul de l'agriculture et progression des forêts. "Depuis les années 1970, les paysages du Sud-Est deviennent plus favorables aux incendies, relève Thomas Curt, directeur de recherche à l'Irstea. L'agriculture recule, la forêt s'étend naturellement et les terres 's'embroussaillent'." Par ailleurs, "les gens ont envie d'habiter près de la forêt", et les constructions à risque, en bordure des forêts ou des garrigues, pullulent. "Plus vous avez de maisons, de lignes électriques, de routes, et plus vous avez de départs de feu."
Est-ce exceptionnel ?
• 2003, année noire. L'année 2003 reste dans toutes les mémoires. Cette année-là, plus de 73 000 hectares sont partis en fumée et 200 bâtiments ont été touchés, selon la Sécurité civile (PDF). Plusieurs incendies d'origine criminelle avaient notamment ravagé le massif des Maures (Var), causant la mort de quatre personnes. Pour la première fois, les autorités avaient dû faire appel à des renforts étrangers. On estime depuis que 10 000 hectares environ partent en fumée chaque année.
• 0,5% de feux supérieurs à 100 hectares. En France, près de 95% des incendies parcourent moins de cinq hectares et 0,5% des feux de l'été dépasse le seuil des 100 hectares. Ces données sont obtenues grâce à l'outil Prométhée, mis en place en 1973, qui offre une lecture précise des sinistres dans quinze départements méditerranéens. A la fin juillet, le nombre de feux dans les Alpes-de-Haute-Provence et en Lozère est déjà supérieur à la moyenne des années passées.
• Les Bouches-du-Rhône, département le plus touché. Observons cette fois la superficie de terres partie en fumée. Le département des Bouches-du-Rhône a déjà payé un lourd tribut, avec 888 hectares incendiés, à la fin du mois de juillet. Le département du Var devrait lui aussi s'illustrer, car ces données ne prennent pas encore en compte les récents incendies de Bormes-les-Mimosas.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.