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Incendies : comment travaillent les enquêteurs chargés de déterminer l'origine d'un feu ?

Gendarmes, pompiers et techniciens des forêts allient leur savoir-faire au sein de cellules spéciales. Leur mission ? Trouver d'où sont parties les flammes. 

Article rédigé par franceinfo - Louise Hemmerlé
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Un pompier sur les lieux d'un incendie en Gironde (MEHDI FEDOUACH / AFP)

Mégot encore incandescent, briquet, foudre, cendre de barbecue ? D'où provient la première étincelle à la source des feux de forêts qui ont ravagé des milliers d'hectares de végétation dans le sud-est de la France, et forcé entre 10 000 et 12 000 personnes à évacuer leurs domiciles ? C’est ce que des pompiers, gendarmes et techniciens des forêts dépêchés sur place tentent de déterminer, en retraçant la trajectoire destructrice des flammes. Franceinfo détaille le modus operandi de ses experts des flammes.

Localiser le départ du feu

Lorsque la cause des incendies est inconnue, les enquêteurs activent une cellule RCCI (Recherche des causes et circonstances des incendies). Elle est composée d’un gendarme, d’un sapeur-pompier et d’un technicien des forêts. Dans les départements avec suffisamment de personnel formé à la RCCI, ils sont envoyés sur place dès le départ du feu. Quand il arrive sur une scène d’incendie, Michel*, technicien des forêts dans un département du sud de la France, spécialiste de la discipline, doit faire le vide devant l’étendue des terrains dévastés. "A chaque fois, il faut tout oublier, repartir à zéro. Chaque incendie est différent et particulier", explique-t-il à franceinfo.

Il s’agit en premier lieu de déterminer d’où le feu est parti, et quelle a été sa trajectoire. "Il y a d'abord un aspect classique : tout ce qui est enquête de voisinage, recherche du renseignement à travers la population, les automobilistes, l'analyse de la vidéo-protection pour comprendre ce qu'il s'est passé", détaille à l'AFP le colonel Benoît Ferrand, à la tête du groupement de gendarmerie départementale des Bouches-du-Rhône. Ces premiers éléments permettent de délimiter la zone dans laquelle le feu a pris.

Ensuite, les équipes se fient aux nombreux indices qu’ils peuvent observer sur place. "En lisant le paysage et les traces laissées par le passage du feu, sur les arbres, même sur les brindilles, j’arrive facilement à revenir sur la trajectoire de l’incendie", explique Michel. Les traces de brûlure laissées sur les végétaux, les cadavres d’insectes, même les pierres et les cailloux sont passées au peigne fin pour déterminer dans quel sens, et avec quelle force est passé le feu.

On arrive à identifier le lieu de départ du feux au centimètre près parfois, si les autres intervenants n’ont pas roulé sur les traces.

Michel, technicien des forêts

à franceinfo

Déterminer la cause de départ du feu

Le foyer permet ensuite de lancer les membres de la cellule sur la piste de la cause de l’incendie. "Il faut s'intéresser au contexte, à ce qu'il y a autour, comme des routes par exemple", détaille Michel. "En pleine nature, un feu est suspect, au bord d'une route, on peut présager que c'est accidentel", analyse également le lieutenant-colonel Nicolas Faure, des sapeurs-pompiers des Bouches-du-Rhône.

On privilégie telle ou telle cause et au fur et à mesure, on ferme les portes sur ce qui ne peut pas être… Au bout du compte, il ne reste forcément que ce qui peut être.

Michel, technicien des forêts

à franceinfo

Les membres de la cellule RCCI fournissent ensuite dans leur rapport une proposition de cause de départ du feu aux enquêteurs de police. "Si ce n’est pas nous qui identifions l’auteur des faits, c’est nous qui déterminons si le départ de feu était volontaire ou involontaire", clarifie Michel. "Lorsqu’il s’agit de malveillance, c'est souvent des coups de briquets ou bien des pièges à feu à retardement que les incendiaires laissent derrière eux sur le terrain." 

Pour trouver d'éventuels produits inflammables, qui pourraient trahir un geste criminel, les gendarmes disposent aussi de chiens spécialement dressés. A Saint-Cannat (Bouches-du-Rhône), aucun dispositif de mise à feu n’a été trouvé et le point de départ du feu a été identifié au bord d’une route. De quoi permettre au vice-procureur de rapidement exclure "a priori l'hypothèse d'un geste criminel", faute d'élément qui permette de la corroborer, et de privilégier l’hypothèse d'un mégot mal éteint.

Améliorer la prévention

Outre le frisson de la recherche "passionnante" que décrit Michel, identifier et répertorier les causes des départs de feux permettent aussi de mieux cibler les opérations de prévention à effectuer : "On ne peut mettre en place les bonnes actions de préventions que si on connaît les causes des feux", estime-t-il.

C’est aussi le message de Vincent Pastor, expert du Service départemental d'incendie et de secours dans les Bouches-du-Rhône, interrogé par Libération : "On pourrait éviter une grande partie de ces incendies accidentels. (...) Les gens doivent savoir que l’on peut tous être auteurs de grands incendies. Au-delà de l’aspect judiciaire, il y a le traumatisme que cela peut causer : il faut le porter, après. D’où l’importance d’avoir un comportement responsable."

* Le prénom a été modifié à la demande de l'intéressé. 

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