Faux électeurs : les époux Tiberi devant la justice
L'affaire aura mis plus de dix ans pour arriver devant la justice. Car l'information judiciaire date de juin 1997... Mais le parquet a semble-t-il bien traîné des pieds. Lassé manifestement d'attendre ses réquisitions, les juges d'instruction avaient finalement décidé, l'an dernier, à quelques jours des municipales, de renvoyer tout le monde en correctionnelle.
Onze personnes au total comparaissent donc aujourd'hui, et pour trois jours, pour cette affaire de faux électeurs du Ve arrondissement de Paris. Un affaire révélée à l'époque (en 1997) par le Canard enchaîné, qui avait estimé que le RPR avait inscrit illégalement 3 à 4.000 électeurs dans l'arrondissement. De quoi assurer une victoire à tous les coups pour Jean Tiberi...
_ Gardiens d'immeuble, agents municipaux, ou simples électeurs : ils n'habitaient pas le Ve, mais étaient fortement incités à y voter. En contrepartie, on leur promettait une place en crèche, un logement social, ou encore un emploi à la mairie.
Des plaintes pour fraude avaient même été déposées dès 1989, par la gauche qui dénonçait à l'époque un “système Chirac” sur les IIIe, XIe, XIXe et XXe arrondissements. Mais elles n'ont jamais été instruites...
Quelle proportion la fraude a-t-elle pu prendre ? Difficile à dire. Même les juges d'instruction en ont convenu. Tout juste remarquent-ils que, du simple fait des radiations administratives, entre 1997 et 2002 le corps électoral est passé de 41.437 électeurs à 34.978 - soit une différence de 6.459...
Cette ambigüité sera en tout cas bien exploitée par les avocats de la défense. “On est partis sur des hypothèses extraordinaires pour revenir à des choses relativement dérisoires, d'autant qu'elles n'ont rien changé aux élections”, explique ainsi l'un des avocats de Jean Tiberi, Me Jean-Yves Leborgne.
_ Au contraire, la fraude a été “massive” , assène l'avocate de Mme Cohen-Solal, Me Claude Pollet-Bailleux. Elle a, dit-elle, concerné 4.000 à 5.000 électeurs, et “n'aurait pu se faire sans l'aval de Jean Tiberi”, qui était “forcément au
courant”, tout comme son épouse, omniprésente à la mairie du Ve et dont
plusieurs parents figurent sur la liste des électeurs irréguliers.
Aujourd'hui, Jean Tiberi est toujours maire du Ve arrondissement. Réélu l'an dernier, avec 225 voix d'avance sur la socialiste Lyne Cohen-Solal - l'une de celles qui avaient d'ailleurs porté plainte, en 1997... Les choses n'ont finalement pas changé.
Guillaume Gaven, avec agences
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