Mort du petit Emile : comment les enquêteurs vont-ils tenter de déterminer les causes et les circonstances du décès de l’enfant ?

La découverte d'une partie des ossements, samedi, constitue une étape décisive dans cette affaire. Mais les investigations s'annoncent encore longues pour faire la lumière sur ce qui est arrivé au petit garçon de 2 ans et demi.
Article rédigé par Catherine Fournier - avec AFP
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Publié Mis à jour
Temps de lecture : 7min
Un accès fermé au hameau du Haut-Vernet (Alpes-de-Haute-Provence), le 27 mars 2024. (CHRISTOPHE SIMON / AFP)

Une partie du mystère est levée, mais l'enquête s'annonce encore longue. L'identification d'une partie des ossements du petit Emile, dimanche 31 mars au Haut-Vernet (Alpes-de-Haute-Provence), ouvre une nouvelle page dans les investigations menées depuis neuf mois pour retrouver ce petit garçon de 2 ans et demi, disparu en juillet dernier alors qu'il était gardé par ses grands-parents.

Cette découverte, effectuée par une promeneuse, est survenue deux jours après une reconstitution des faits, sans qu'un lien entre les deux événements puisse être établi à ce stade. Un travail de fourmi est désormais réalisé par les experts et les enquêteurs de la gendarmerie pour tenter de reconstituer le scénario du drame.

Un large périmètre bouclé pour éviter de polluer la zone de découverte

Les ossements retrouvés, dont le crâne de l'enfant, gisaient dans une zone au sud-est du lieu de la disparition, "à 2 km, entre le Haut-Vernet et le col du Labouret", au-dessus du hameau, a expliqué à l'AFP le maire de la commune, François Balique. Afin de préserver le travail des gendarmes sur place, l'édile a de nouveau pris un arrêté pour interdire l'accès au Haut-Vernet, à l'exception de ses habitants et des services publics, jusqu'au dimanche 7 avril à midi.

Afin de veiller au respect de cet arrêté municipal, plus de 70 gendarmes, issus d'un escadron de gendarmerie mobile et des effectifs du département, ont été mobilisés pour effectuer des contrôles, fixes et mobiles, a expliqué lors d'un point-presse sur place Pierre-Yves Bardy, commandement du groupement de gendarmerie des Alpes-de-Haute-Provence.

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Pierre-Yves Bardy, commandant du groupement de gendarmerie départementale, s'exprime sur le travail des enquêteurs après la découverte d'ossements du petit Emile, le 1er avril 2024. // (FRANCEINFO)

Objectif : "Permettre aux enquêteurs de travailler dans les meilleures conditions" et "éviter que des personnes viennent polluer le site." 

Des experts, dont un anthropologue, pour dater la présence de ces ossements

Six experts de l'Institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale (IRCGN) se sont rendus sur place lundi. Parmi eux, un "coordonnateur des opérations criminalistiques", qui supervise "les analyses scientifiques" menées sur le site de la découverte, ainsi qu'un anthropologue, chargé plus particulièrement de l'étude du sol, a expliqué à franceinfo et France Télévisions Marie-Laure Pezant, porte-parole de la gendarmerie nationale. 

Ces spécialistes vont sonder la terre sur laquelle les ossements reposaient afin de dater leur présence, grâce à des "méthodes proches de celles de l'archéologie", a précisé la porte-parole. Si ces restes sont depuis longtemps sur place, la terre en portera des "traces", en raison de la "porosité entre un corps et le sol", a ajouté Marie-Laure Pezant. Si tel n'est pas le cas, la porte-parole de la gendarmerie liste les hypothèses à approfondir.

"Ces ossements ont pu être amenés là par une tierce personne, un animal ou par les conditions météorologiques, qui auraient pu dégrader le sol et acheminer une partie du corps ici."

Marie-Laure Pezant, porte-parole de la gendarmerie

à franceinfo et France Télévisions

Un déplacement des ossements, naturel ou volontaire, semble l'option privilégiée. La possibilité que les battues officielles et citoyennes soient passées à côté du corps lors des nombreuses fouilles menées dans le secteur est en effet "assez infime", selon la gendarme, même si la "végétation abondante du mois de juillet" a "pu compliquer les recherches". Les deux principales pistes, accidentelle ou criminelle, restent donc explorées.

Des chiens pour tenter de retrouver le reste du corps

Des équipes cynophiles du Centre national d'investigation cynophile de Gramat (Lot) sont également arrivées sur place. "Ces chiens experts, spécialisés dans la recherche de restes humains, vont être capables d'apporter un concours précieux" pour tenter de retrouver le reste des ossements, a expliqué Pierre-Yves Bardy. La découverte de premiers ossements a en effet considérablement resserré le périmètre des recherches.

"Il faut maintenant aller rechercher l'ensemble du squelette", a pointé dimanche sur franceinfo Jacques Morel, général de gendarmerie et ancien patron de la section de recherche de Versailles, s'étonnant du fait que "les nombreuses équipes cynophiles" précédemment envoyées pour retrouver Emile n'aient "pas marqué à l'endroit où il a été trouvé"

D'autres indices vont également être recherchés, notamment les vêtements du petit garçon, vêtu au moment de sa disparition d'un haut jaune, d'un short blanc et de chaussures de randonnée. 

"S'il est arrivé par ses propres moyens là-bas, on devrait retrouver des pièces vestimentaires, même si elles sont détériorées ou en lambeaux."

Jacques Morel, général de gendarmerie

sur franceinfo

Pour ne négliger aucun élément et en "récolter le maximum", "ces recherches minutieuses" peuvent prendre un certain temps afin de "ratisser la zone" et "établir les circonstances du décès", a souligné de son côté Marie-Laure Pezant. Afin de créer "un double numérique de la scène", les gendarmes de l'IRCGN travaillent avec "trois drones différents positionnés au centimètre près" et "équipés de capteurs spécifiques permettant de voir des choses invisibles à l'œil nu", a détaillé sur BFMTV Aurélien S., responsable au sein de l'institut. "On restera le temps nécessaire pour fixer la scène. L'objectif est de cartographier en 3D l'ensemble des lieux", a-t-il ajouté, justifiant cette démarche par le fait que ces derniers peuvent être dégradés par des piétinements ou la météo.  

Des analyses des ossements pour essayer de déterminer les causes de la mort

Les premiers ossements prélevés sur le site ont été "acheminés par hélicoptère jusqu'à Pontoise", site de l'IRCGN, afin d'être analysés le plus rapidement possible, a fait savoir le commandant de gendarmerie Pierre-Yves Bardy. Le but était d'abord de confirmer, grâce à l'ADN, qu'ils appartenaient bien à Emile. La suite des analyses doit tenter de déterminer les causes de la mort, en détectant d'éventuelles traces de coups ou de morsures d'animal.

Selon le médecin légiste Bernard Marc, interrogé sur franceinfo, "l'imagerie 3D permettra d'analyser les lésions même neuf mois après". "Les dents peuvent révéler une asphyxie", a ajouté le responsable de l'unité médico-judiciaire de Compiègne, émettant toutefois plusieurs réserves : les "tissus mous" (la peau) ont été détruits, et aucun "os long" n'a pour le moment été retrouvé. 

"Si l'enfant est mort d'une hypoglycémie ou de froid, il sera difficile de le mettre en évidence juste grâce aux os."

Bernard Marc, médecin légiste

sur franceinfo

"On n'est pas certains de découvrir la cause ou les circonstances de la mort, a prévenu la porte-parole de la gendarmerie, Marie-Laure Pezant. On a une partie des ossements, on n'aura peut-être pas tous les éléments pour définir les circonstances du décès." Le procureur d'Aix-en-Provence, Jean-Luc Blachon, a également insisté auprès de l'AFP : l'enquête sera encore longue, car elle est "complexe". 

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