Ce que l'on sait de la cyberattaque et des menaces d'attentat qui ont visé une cinquantaine de lycées d'Ile-de-France
Une menace prise très au sérieux. Une cinquantaine d'établissements scolaires franciliens ont été visés par des menaces d'attaques à l'explosif lors d'un piratage de leur espace numérique de travail (ENT), a appris franceinfo de sources concordantes, jeudi 21 mars. Ce service en ligne rassemble des outils pédagogiques (devoirs, agendas, ressources…) accessibles à distance pour les élèves, les professeurs et les parents.
Franceinfo résume ce que l'on sait de ce piratage, qui a provoqué la suspension de l'ensemble de l'ENT des lycées d'Ile-de-France, et pour lequel le parquet de Paris a ouvert une enquête.
Un piratage et des menaces au nom de "l'Etat islamique"
L'auteur ou les auteurs de cette cyberattaque ont créé "un site frauduleux" visant à pirater l'ENT, a avancé la région Ile-de-France. A la suite de cette opération, "des mails frauduleux ont été envoyés à des lycéens d'Ile-de-France avec des menaces d'attentat islamiste" à partir de mercredi, a détaillé la région. Ces menaces ont également été transmises par "la boîte mail interne" des établissements "ou encore le site Pronote", utilisé pour communiquer les notes des élèves, a précisé le ministère de l'Education nationale.
Elèves, parents et professeurs ont ainsi pu recevoir un message dont l'auteur prétend agir au nom de "l'[organisation] Etat islamique". L'auteur du texte y affirme sa volonté de faire "exploser" les établissements jeudi entre 11 et 15 heures, après avoir déposé "du C4 [un explosif] partout dans le lycée et dans les classes". Il déclare en outre vouloir décapiter "vos corps de kuffars [nom donné aux non-musulmans] pour servir Allah le Tout-Puissant". Une pièce jointe contenant une vidéo de décapitation accompagnait le message.
Le gouvernement a dénoncé ces "menaces", accompagnées d'"apologie et de provocation au terrorisme", qui constituent "plusieurs infractions graves".
Une cinquantaine d'établissements visés
"Une cinquantaine" d'établissements sont concernés par la cyberattaque à ce stade, a annoncé à l'AFP la région Ile-de-France. Selon le rectorat de Créteil, contacté par l'AFP, "plusieurs lycées de l'académie" (qui regroupe les départements de Seine-et-Marne, Seine-Saint-Denis et Val-de-Marne) sont concernés. Dans le Val-de-Marne, "nous recensons (…) trois établissements scolaires ayant reçu des courriels d'alertes à la bombe", a précisé le parquet de Créteil, dans la matinée, à Radio France.
Des lycées de l'académie de Paris et une vingtaine dans l'académie de Versailles (Val-d'Oise, Yvelines et Hauts-de-Seine) ont aussi reçu ces menaces, ont confirmé les rectorats concernés à l'AFP. Dans les Yvelines, huit établissements ont été visés, a appris Radio France auprès de la préfecture du département. La préfecture des Yvelines a confirmé qu'une "surveillance statique" devant les lycées concernés avait été mise en place jeudi matin.
Des "levées de doute" menées depuis mercredi soir
Contacté par franceinfo jeudi matin, le ministère de l'Education nationale a condamné "ces graves menaces", prises "très au sérieux". Les services de police, "immédiatement avisés, font le nécessaire pour assurer la sécurité des élèves". "Des services d'enquête spécialisés sont mobilisés pour identifier le ou les auteurs", a poursuivi le ministère. "Plusieurs levées de doute ont déjà été effectuées" mercredi soir et jeudi matin, a assuré le ministère, qui s'assure aussi "qu'il n'y a pas de compromission des réseaux du fait de l'envoi de ces messages, parfois sur des réseaux internes".
Le ministère a proposé "un accompagnement psychologique à tous les enfants ou adultes qui ont visionné malgré eux" les images "choquantes" jointes au texte. L'académie de Versailles a de son côté "activé une cellule de crise pour accompagner les chefs d'établissement et les personnels, parfois en contact direct avec les familles qui ont reçu le message" et a annoncé être "en lien avec les services de sécurité pour des levées de doute".
Ces menaces d'attentat interviennent après une vague de fausses alertes à la bombe qui avaient touché plusieurs centaines d'établissements scolaires à l'automne, au nombre de 800 selon des chiffres du gouvernement arrêtés à la mi-novembre. Une réunion interministérielle sur la sécurité des établissements scolaires doit se dérouler jeudi après-midi sous la houlette du Premier ministre, Gabriel Attal, en présence de la ministre de l'Education nationale, Nicole Belloubet, et du ministre de la Justice, Eric Dupond-Moretti.
Une enquête ouverte après deux plaintes
Deux plaintes concernant ces cyberattaques ont été déposées auprès de la section de lutte contre la cybercriminalité du parquet de Paris, a appris France Télévisions. L'une des deux plaintes provient de la région Ile-de-France, qui a pointé des actes "d'une extrême gravité". La région a mobilisé les 12 brigades régionales de sécurité. Sur le réseau social X, la présidente de la région, Valérie Pécresse (LR), a dénoncé des "cyber attaque et cyber menaces terroristes sur les lycées d'Île-de-France". L'élue "souhaite que les auteurs soient rapidement identifiés et sévèrement sanctionnés".
Cyber attaque et cyber menaces terroristes sur les lycées d'Île-de-France : la région a saisi la police et la justice. Les brigades régionales de sécurité sont sur site pour aider à la levée de doute et à la sécurisation des sites. Je souhaite que les auteurs soient rapidement…
— Valérie Pécresse (@vpecresse) March 21, 2024
Pour le moment, l'accès à l'ENT d'Ile-de-France a été "entièrement suspendu", a assuré la région Ile-de-France, qui a précisé qu'elle mettait "tout en œuvre pour que la situation revienne à la normale" et a tenu à assurer "l'ensemble de la communauté éducative, des parents de tout son soutien".
Une enquête a été ouverte des chefs d'accès et maintien frauduleux dans un système de traitement automatisé de données, et introduction frauduleuse de données. La Brigade de lutte contre la cybercriminalité de la direction de la police judiciaire parisienne a été saisie, a appris France Télévisions auprès du parquet de Paris. Ce dernier "procède au rapprochement avec des faits similaires dont sont saisis d'autres parquets, afin d'envisager une éventuelle centralisation si des recoupements étaient avérés".
Une réunion prévue pour sécuriser "150 à 200" établissements scolaires à risque
Le gouvernement "traque" les auteurs de menaces envoyées à des lycées de la région parisienne, a déclaré Gabriel Attal. "Plusieurs dizaines d'auteurs de ces menaces, intervenues ces derniers mois, ont d'ores et déjà été judiciarisés", a précisé le Premier ministre. Il a par ailleurs annoncé la tenue le 4 avril d'une réunion sur la sécurisation de "150 à 200" établissements qualifiés de "plus particulièrement à risque", promettant de "nettoyer les trottoirs aux abords" face aux "gangs" et aux "deals".
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