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Crash dans les Alpes : six questions sur les raisons de l'accident

Francetv info revient sur les questions techniques que soulève cet accident, le plus important survenu en France depuis le crash du Concorde, en 2000.

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Un avion de la compagnie Germanwings à l'aéroport de Cologne (Allemagne), le 16 octobre 2014. (MAXPPP)

Les moyen-courriers A320 sont les plus vendus au monde avec les Boeing 737. Selon Airbus, cette famille d'avions décolle ou atterrit toutes les 2,5 secondes chaque jour. Mardi 24 mars, l'un de ces appareils, affrété par la compagnie Germanwings, s'est écrasé dans la région de Barcelonnette, dans les Alpes-de-Haute-Provence. Cent cinquante personnes se trouvaient à bord.

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Alors que la boîte noire retrouvée n'a pas encore livré ses secrets, francetv info revient sur les différentes questions techniques posées par cet accident, le plus important survenu en France depuis le crash du Concorde, à Gonesse (Val-d'Oise), en 2000. 

L'avion était-il trop vieux ? 

L’A320 était en activité depuis vingt-quatre ans. Avant de voler sous les couleurs de Germanwings, il a été utilisé à partir de 1991 par la maison mère, Lufthansa, avant de rejoindre sa compagnie low cost. "C’est un âge très élevé pour un avion ", a déclaré un technicien de Lufthansa, contacté par Les Echos. "Au sein du groupe Lufthansa, les machines ont un âge moyen inférieur à 10 années, alors qu’il est de 13,5 ans chez Germanwings et est également plus ancien chez Condor, une autre filiale de Lufthansa", rappelle le site du journal économique. 

Les avions modernes sont conçus pour voler 30 à 40 ans, rappelle toutefois Bertrand Mouly-Aigrot, associé chez Archery Strategy Consulting et spécialiste des transports aériens. A 24 ans, un avion "est relativement vieux et probablement dans ses dernières années de service commercial".

Lors d'une conférence de presse, le directeur de Germanwings a indiqué que "le dernier check-up de l'avion [avait] été effectué en mars à Düsseldorf" par les équipes techniques de Germanwings. "Le dernier C check [un check-up plus important et complet] a eu lieu à l'été 2013, comme cela est prévu par les procédures Airbus."

L'A320 d'Airbus est-il un avion fiable?

L'A320 est le concurrent direct du Boeing 737. Il est l’un des avions de ligne moyen-courriers les plus vendus au monde, notamment grâce à son système d’aide électronique mais aussi grâce à sa fiabilité, note Slate. Selon les données du constructeur Airbus, 3 660 exemplaires de ce modèle circulent actuellement dans le monde.

Interrogé par BFMTV, Gérard Feldzer, spécialiste des questions aéronautiques, a affirmé que l'A320 est "certainement l'avion le plus sûr du monde, en passagers-kilomètre transportés". Le spécialiste rappelle que "c'est l'avion (...) le plus vendu. Il circule beaucoup et évidemment, plus l'avion vole, plus il y a une chance (...) d'avoir un accident".

Une panne informatique est-elle envisageable ?  

Interrogé sur l'éventualité d'un problème informatique, un expert de la compagnie a assuré que "l'ordinateur qui posait problème [avait] été changé". "Il n'y avait rien d'anormal sur l'appareil, a poursuivi le directeur de Germanwings. Nous allons regarder précisément l'historique de ces dernières semaines sur cet avion, mais pour l'instant, nous ne pouvons faire aucune spéculation."

François Suchel, commandant de bord sur Airbus A320, cité par le site de Paris Match, "la question de l'interaction entre le pilote automatique et le pilote peut se poser". Il détaille un incident survenu sur un Airbus en novembre 2014 et présentant, selon lui, des similitudes avec le crash de mardi : "Lors de cet accident, un avion a perdu de l'altitude suite à un blocage de deux sondes qui ont fourni de fausses informations à l'ordinateur. L'ordinateur de commande de vol, pensant que l'avion était en décrochage, a commandé un ordre à piquer. L'avion n'était pas en train de décrocher mais la conception des Airbus et les lois de protection de commandes de vol donnent parfois des ordres qui peuvent être contraires à ceux du pilote", a-t-il expliqué.

Que penser de sa chute ? 

Le spécialiste aéronautique, Gérard Feldzer a assuré, sur BFMTV, qu'il ne s'agissait pas d'un décrochage. "[L'avion] n'est pas tombé à pic. Il serait descendu de 10 000 à 2 000 m d'altitude en environ 8 minutes, ce n'était pas une descente de secours. C'est une descente forte mais qui a l'air d'être contrôlée", a-t-il analysé, notant toutefois qu'une descente à une vitesse de 3 000 pieds/minute (soit environ 900 mètres/minute) était anormale.  

"Quand l'avion commence à descendre, il est 10h35", a poursuivi Jean Serrat, un autre spécialiste interrogé par BFMTV. "Il arrive à 2 000 mètres d'altitude à 10h41. C'est une descente forte mais relativement linéaire, on ne sent pas de précipitation. D'ailleurs, à ce moment-là, il n'y a pas de message de l'équipage." Il a relevé que l'avion était resté "environ trois minutes en palier à 2 000 mètres" : "Dans une zone montagneuse avec des pics à plus de 3 000 mètres d'altitude, cela interpelle."

Pour François Suchel, "soit ils étaient obligés de descendre à cause d'une panne - a priori, c'est une dépressurisation ou une panne des deux moteurs. Soit ils n'avaient plus vraiment le contrôle de l'avion. En tant que pilote, je ne vais pas spéculer là-dessus."

Y a-t-il eu un appel de détresse ?

L'équipage n'a pas émis d'appel de détresse, a indiqué à l'AFP la Direction générale de l'aviation civile (DGAC). "L'équipage n'a pas émis de 'mayday'. C'est le contrôle aérien qui a décidé de déclarer l'avion en détresse car il n'avait plus aucun contact avec l'équipage et l'avion", a-t-elle expliqué.

Lorsque des pilotes de ligne rencontrent un problème technique au cours d'un vol, ils peuvent émettre un "mayday", appel de détresse qu'ils prononcent trois fois de suite en donnant l'indicatif de l'appareil. Cela permet par exemple aux contrôleurs aériens de dégager l'espace aérien pour leur donner une priorité d'atterrissage et prévoir une assistance technique à leur arrivée. Un "mayday" est généralement le signe que l'équipage comprend la situation dans laquelle il se trouve.

Toutefois, en cas de panne, "on va d'abord s'occuper de piloter l'avion et de faire les actes qui doivent être faits le plus rapidement possible, en concertation avec le copilote. Ce sont des actions qui sont prioritaires", a relativisé Jean Serrat, sur BFMTV. Et Gérard Feltzer de confirmer : "Qu'il ait ou non lancé un message de détresse, cela ne change pas grand-chose" à ce stade pour comprendre ce qui a mené au crash.   

"Concernant l'appel d'urgence, je ne peux rien dire pour le moment, nous sommes toujours en train de vérifier ce qu'il s'est passé", a indiqué l'expert de Germanwings. Le directeur de la compagnie avait pour sa part rappelé que le commandant de l'avion avait plus de dix ans d'expérience au sein de Lufthansa et Germanwings, et plus de 6 000 heures de vol sur Airbus.  

La météo est-elle en cause ? 

Au moment de l'accident, en fin de matinée, le ciel était totalement dégagé, et les conditions météorologiques particulièrement bonnes, a indiqué La Chaîne Météo. L'hypothèse d'un crash lié à la météo est donc peu probable, même si l'appareil avait au préalable traversé une zone instable en Méditerranée. L'information a été confirmée par Alain Vidalies, secrétaire d'État chargé des Transports, qui a affirmé que "les conditions météo n'étaient pas spécialement mauvaises".

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