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Camouflet pour Boeing, difficultés pour les compagnies... Quelles conséquences économiques après le crash en Ethiopie ?

Après le drame de dimanche, qui a fait 157 morts, les 737 Max sont bannis temporairement d'un grand nombre de pays. Pour le constructeur américain Boeing, les retombées financières pourraient être très importantes.

Article rédigé par franceinfo avec AFP et Reuters
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Temps de lecture : 4 min
Un Boeing 737 Max vole au-dessus du Bourget, près de Paris, le 21 juin 2017. (MUSTAFA YALCIN / ANADOLU AGENCY / AFP)

En janvier, Boeing prédisait que 2019 serait une année record pour ses bénéfices et pour ses livraisons d'avions. En partie grâce au 737 Max, version modernisée du best-seller 737. Moins de deux mois plus tard, l'avionneur traverse une des crises les plus graves de son histoire. Le constructeur aéronautique américain est en effet confronté depuis lundi 11 mars à une avalanche d'immobilisations du 737 Max, après le crash, dimanche, d'un appareil d'Ethiopian Airlines de ce type. Le drame a fait 157 morts. En octobre, un 737 Max de Lion Air s'était aussi écrasé, tuant les 189 personnes à bord. Quelles conséquences économiques pour le constructeur américain et les différents acteurs du ciel ? Réponse dans notre article.

Pour le constructeur américain Boeing

Les 737 Max sont la locomotive des ventes et des bénéfices de Boeing. Entré en service en mai 2017, le 737 Max était une réponse à l'A320 Neo d'Airbus, qui avait permis au constructeur européen de passer devant Boeing dans le secteur du moyen-courrier.

Ce modèle a représenté, l'an dernier, un tiers des bénéfices de Boeing. Fin janvier, 4 661 exemplaires avaient été commandés, soit environ 80% du carnet de commandes d'avions de ligne de Boeing. L'avionneur, qui en produit 52 exemplaires par mois, prévoyait de monter à 57 cette année. 

Mais le crash de l'avion d'Ethiopian Airlines a conduit, pour l'instant, à l'immobilisation de plus de la moitié des 737 Max en service. Le ciel mondial est en train de se fermer complètement à ce modèle. 

D'après Le Monde, "l’affaire pourrait coûter au groupe entre 1 milliard et 5 milliards de dollars (entre 890 millions d’euros et 4,5 milliards d’euros), selon la société de conseils à Wall Street, Melius Research, si tous les 737 Max étaient cloués au sol". 

C'est aussi l'image de Boeing, avionneur ayant fêté son centenaire en 2016, qui sort écornée de cette affaire. Car cet accident suscite les doutes du grand public sur ses appareils. Le constructeur aéronautique, qui fabrique également des avions de combat, des avions de ravitaillement (tankers), des équipements aérospatiaux et Air Force One, l'avion transportant le président des Etats-Unis, est un fleuron industriel américain.

Pour les équipementiers

Outre Boeing et ses 150 000 salariés, de nombreux fournisseurs directs et indirects du 737 Max devraient être affectés par la controverse entourant cet avion. Parmi eux, General Electric (GE) et les sociétés américaines United Technologies (capteurs) et Spirit AeroSystems (fuselage, cockpit).

Mais l'addition pourrait également être lourde pour plusieurs entreprises françaises. En effet, selon Les Echos (article payant), une trentaine d'équipementiers tricolores sont "en première ligne à bord" de ce modèle. Le journal cite notamment Safran, dont la coentreprise CFM fabrique le moteur LEAP équipant l'appareil, Thales, qui fournit une "large palette de composants avioniques et de systèmes de divertissement et de télécommunication" mais aussi Michelin, qui fabrique les pneus. "Une interdiction de vol prolongé des 737 Max, qui aurait des conséquences sur le rythme de production et sur les commandes, pourrait donc impacter la filière aéronautique française", résume le quotidien économique.

Pour les concurrents du constructeur

Avec l'un de ses modèles banni du ciel, Boeing a chuté en Bourse. En deux jours, le titre de l'entreprise a lâché de plus de 11%, soit près de 27 milliards de dollars de capitalisation boursière. Face aux déboires de Boeing, son principal concurrent Airbus gagnait, lui, 1,43% en Bourse mardi. Toutefois, le constructeur européen a "refusé de se réjouir des malheurs de Boeing", notamment "quand la sécurité des passagers est en jeu", rapporte Le Monde.

Le journal explique qu'Airbus "détient déjà plus de 60% de parts de marché des moyen-courriers de nouvelle génération" et "n’a pas les moyens, à court terme, de chiper des clients à son rival américain"

Pour les compagnies aériennes

L'interdiction de vol pour un avion récent est un camouflet inédit dans l'histoire de l'aviation civile. Cependant, elle ne devrait pas perturber outre mesure le trafic aérien mondial. Selon Flightglobal (lien en anglais), 371 appareils de cette famille volent dans le monde aujourd'hui. Un nombre important, mais à comparer aux 19 000 avions d'au moins 100 passagers qui sont en service au niveau international, tous modèles confondus, selon des données d'Airbus.

La plupart des compagnies aériennes peuvent donc encore assurer toutes leurs liaisons en s'appuyant sur d'autres appareils. Ou en louant d'autres avions. "Il existe en effet sur le marché des agences de location, et des courtiers qui mettent en relation ces agences avec les compagnies aériennes", explique Europe 1, qui avance que "la quasi-totalité des compagnies va devoir" utiliser cette méthode.

"C'est un casse-tête pour les compagnies aériennes que de mettre des avions hors service, avec de probables annulations de vols et un impact sur le chiffre d'affaires", analyse John Strickland, consultant aéronautique. Norwegian Air Shuttle a ainsi déclaré, mercredi, qu'elle réclamerait à Boeing une indemnisation pour la perte de revenus et les coûts supplémentaires liés à l'immobilisation de sa flotte : "Nous nous attendons à ce que Boeing prenne en charge cette facture.

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