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Présidentielle : quels sont les candidats qui répondent le plus aux attentes du Medef ?

Mondialisation, Europe, modèle social... Mercredi, le syndicat patronal continue d'interroger les candidats à la présidentielle. Franceinfo fait le point sur la compatibilité entre le Medef et les différents programmes.

Article rédigé par franceinfo - Mathilde Goupil
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6 min
Le candidat à la présidentielle François Fillon et le président du Medef, Pierre Gattaz, le 28 mars 2017 à Paris. (ERIC PIERMONT / AFP)

C’est à leur tour. Après Marine Le Pen, François Fillon, Emmanuel Macron et Jacques Cheminade le 28 mars, ce sont Nicolas Dupont-Aignan et François Asselineau qui sont auditionnés par des entrepreneurs réunis par le Medef à Paris, mercredi 5 avril. L’occasion pour les patrons de questionner les candidats à l'élection présidentielle sur leur programme économique. 

Fillon et Macron : les plus compatibles

Dans un grand nombre de domaines, François Fillon et Emmanuel Macron font des propositions proches de celles formulées par le Medef dans son "Livre bleu" (PDF).

Le candidat de la droite et l’ancien ministre de l’Economie prévoient ainsi, s'ils sont élus, d’assouplir les 35 heures (voire de les supprimer pour François Fillon) et de remplacer le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (PDF) par une baisse des charges des entreprises. Au niveau des retraites, si l'ancien Premier ministre souhaite repousser l’âge de départ à 65 ans, le candidat d'En marche ! maintient un âge légal à 62 ans. Toutefois, il plaide pour une réforme qui aboutirait en dix ans à un "système universel de retraites". Les régimes spéciaux devraient donc être harmonisés avec le régime général.

Côté dépenses publiques, François Fillon prévoit d’économiser 100 milliards (PDF). C’est presque deux fois plus que le leader d’En marche !, qui s’engage à réduire la dépense publique française de trois points de PIB en cinq ans, soit 60 milliards d’euros d’économies. Tous deux veulent également réduire le nombre de fonctionnaires, dans des proportions différentes puisque le premier souhaite supprimer 500 000 postes alors que le second vise 120 000 postes.

Interrogé par franceinfo après le passage des deux candidats, le 28 mars, devant le Medef, Pierre Gattaz, le président de l'organisation patronale, a assuré que le programme de François Fillon allait "vers la croissance". S’il avait salué les positions d’Emmanuel Macron, il avait néanmoins regretté que le candidat d'En marche ! n’aille "pas jusqu'au bout des réformes, notamment sur la baisse du coût du travail, sur la fiscalité, sur la fiscalité sur le travail, sur la fiscalité des charges."

Le Pen et Dupont-Aignan : incompatibles... mais pas tant que ça

Le principal reproche adressé par le Medef aux candidats du Front national et de Debout la France est leur volonté d'abandonner la monnaie unique. A la différence de Marine Le Pen, qui vise un retour au franc, Nicolas Dupont-Aignan ne souhaite pas quitter l’euro, mais retrouver une monnaie nationale, à côté de la "monnaie commune". Des mesures difficiles à avaler pour les patrons. A la fin mars, après avoir reçu la candidate frontiste, Pierre Gattaz estimait qu'elle était "dans le repli".

"Si les Français votent pour la sortie de l'euro, on risque de se retrouver dans un scénario comparable à l'Argentine d'il y a quinze ans : appauvrissement des classes moyennes, des classes populaires, surinflation, taux de croissance atone, chômage élevé…", s'alarme le patron du Medef.

Pourtant, Marine Le Pen ainsi que Nicolas Dupont-Aignan ont fait des propositions qui peuvent séduire Pierre Gattaz. Marine Le Pen permettrait ainsi aux salariés de travailler 39 heures en cas d’accords de branche en ce sens. Elle entend aussi réserver aux patrons de PE ou PME une partie de la commande publique – "si l’écart de prix est raisonnable" avec la concurrence étrangère – et d'alléger les charges sociales – sous réserve du "maintien de l’emploi" dans les entreprises. Du côté de Nicolas Dupont-Aignan, le passage à un régime de retraite par points ou encore une baisse des charges salariales en les réduisant de 30% sur cinq ans devraient aussi séduire les patrons, lors de ce grand oral.

Lassalle : finalement plutôt incompatible

Longtemps, le mystère a régné sur les positions de Jean Lassalle car le député des Pyrénées-Atlantiques n'avait pas fini de rédiger son programme. Mais il a fini par le dévoiler, mercredi 5 avril. Le centriste, ancien proche de François Bayrou, semblait, a priori, plus proche du patronat, mais plusieurs mesures de son programme (PDF) ont de quoi faire sérieusement tiquer le Medef.

Si l'ancien entrepreneur souhaite réduire le taux d’endettement du pays, comme le demande l'organisation patronale, il prévoit dans le même temps le recrutement de 200 000 agents publics, principalement dans la santé, l’enseignement, les forces de l’ordre et la justice. Il propose également de nationaliser partiellement les entreprises du CAC40, afin d'éviter que des pays étrangers n'en prennent le contrôle. Ou encore de séparer les "activités spéculatives" des "banques de l'économie réelle", une proposition récurrente depuis la crise de 2008 à laquelle le Medef est opposé.

Mélenchon et Hamon : incompatibles et "dangereux"

Il voit rouge. Pierre Gattaz considère les programmes de Jean-Luc Mélenchon et de Benoît Hamon comme "extrêmement dangereux". Dans son viseur, les nouvelles dépenses publiques qu’ils engendreraient (respectivement 173 millions et 71 millions d'euros selon les candidats), qui entraîneraient, selon lui, une hausse d'impôts "pour les ménages et les entreprises".

Et même en cherchant, difficile de trouver un point d’accord entre les candidats de gauche et le patronat. Ils souhaitent abroger la loi Travail pour rétablir la hiérarchie des normes préalable à son adoption ? Le Medef aurait préféré une mouture plus dure du texte. Le patronat réclame un allégement des charges (PDF) des entreprises ? Benoît Hamon veut créer une "taxe robot" pour financer la protection sociale. Le Medef veut diminuer le nombre de fonctionnaires (PDF), en ne remplaçant pas deux départs à la retraite sur trois ? Jean-Luc Mélenchon et Benoît Hamon prévoient d'en embaucher plus. Le candidat de la France insoumise veut 200 000 emplois supplémentaires, tandis que Benoît Hamon, s'il ne donne pas de chiffrage global, souhaite recruter 40 000 enseignants et 5 000 policiers et gendarmes (PDF).

Mais s’il y a une mesure que Pierre Gattaz ne digère pas, c’est le revenu universel d’existence proposé par Benoît Hamon. "Ce qui me gêne chez Benoît Hamon, c'est que pour lui, le travail, c'est la souffrance. Il n'aime pas le travail et l'entreprise", estimait ainsi le “patron des patrons” sur le plateau de LCI le 15 mars.

Poutou, Arthaud, Asselineau et Cheminade : incompatibles par nature

Impossible de trouver une seule proposition commune entre les candidats du Nouveau parti anticapitaliste (NPA) et de Lutte ouvrière (LO), et le Medef. Philippe Poutou et Nathalie Arthaud veulent rehausser le smic, réduire le temps de travail légal, interdire les licenciements, exproprier les grandes banques (PDF) et nationaliser les grandes chaînes de distribution. De quoi faire hurler Pierre Gattaz.

Côté fonction publique, ils plaident tous les deux pour augmenter le nombre de fonctionnaires. Phillippe Poutou promet 120 000 emplois supplémentaires dans les hôpitaux, tandis que Nathalie Arthaud utiliserait tous les fonds dévolus au CICE pour embaucher dans les services publics (PDF).

Incompatibilité aussi pour François Asselineau et Jacques Cheminade, qui veulent tous deux quitter l’Union européenne. Et leurs autres mesures ne risquent pas, non plus, de plaire aux patrons. Mercredi 5 avril, le candidat de l’Union populaire républicaine devra ainsi défendre la revalorisation du smic (compensée par une baisse des cotisations) ou la nationalisation de certaines entreprises et des autoroutes. Jacques Cheminade souhaite, lui, la séparation des banques de dépôt et des banques d’investissement (au grand dam du Medef), mais aussi l’indexation des retraites sur le coût de la vie.

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