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Présidentielle : #PasDeDébatPasDeMandat, l'appel à Emmanuel Macron qui se répand sur Twitter, de l'extrême gauche à Eric Zemmour

Le hashtag, lancé par une tribune publiée dans "Libération", est devenu viral sur Twitter. Il appelle le président et candidat à participer à un débat avant le premier tour.

Article rédigé par Margaux Duguet
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Emmanuel Macron en visite dans un centre accueillant des réfugiés ukrainiens à La Pommeraye (Maine-et-Loire), le 12 mars 2022. (YOAN VALAT / AFP)

#PasDeDébatPasDeMandat ? Vous avez peut-être vu fleurir sur Twitter ce hashtag né après la publication d'une tribune dans Libération, mardi 15 mars. L'idée derrière le slogan est claire : la potentielle réélection d'Emmanuel Macron serait illégitime au motif que ce dernier refuse de se prêter à un ou plusieurs débats avec ses adversaires avant le premier tour de l'élection présidentielle. Si les signataires sont issus de la gauche ou de l'extrême gauche, le hashtag a aussi été repris par l'extrême droite. Franceinfo répond à quatre questions que pose cette campagne sur les réseaux sociaux.

1Comment est né ce hashtag ?

Dans une tribune publiée par Libération et intitulée "Campagne présidentielle : #PasDeDébatPasDeMandat par Adèle Haenel, Annie Ernaux, Barbara Stiegler...", un collectif d'artistes, de philosophes et d'économistes déplorent la stratégie de la "tacite reconduction" d'Emmanuel Macron.

"Nous avions compris que Macron avait pour idéal le renouvellement de son mandat par tacite reconduction. Qu'il y aurait une guerre et qu'il s'en servirait avec le dernier degré d'hypocrisie opportuniste, nous pouvions plus difficilement le voir venir."

Les auteurs de la tribune

dans Libération

Les signataires de la tribune, dont l'écrivain Laurent Binet, le philosophe Frédéric Lordon, la militante féministe Caroline De Haas ou l'autrice Alice Zeniter, dressent un bilan extrêmement sévère du quinquennat. "La réalité après cinq ans de macronisme, c'est que l'hôpital est en ruine, la justice est en ruine, l'école est en ruine, les libertés publiques sont en ruine, la grande cause du féminisme est une blague, 'Make Our Planet Great Again' est une énorme blague – mais la police est toute-puissante et la surveillance numérique en train de passer des caps orwelliens", écrivent-ils. "Emmanuel Macron en est si satisfait qu'il a l'intention de tout prolonger et de tout aggraver – on comprend que dans son esprit il n'y ait pas lieu d'en discuter puisqu'au menu il n'y a que du même en davantage", ajoutent-ils.

Le président de la République a en effet fait savoir qu'il ne participerait à aucun débat avant le premier tour, assurant qu'"aucun président en fonction qui se représentait ne l'a fait". Emmanuel Macron privilégie des rencontres avec des citoyens dont la première à Poissy, dans les Yvelines, a été épinglée par la presse par sa trop grande préparation. "Ne le laissons pas faire. Il se planque ? #OnVaLeChercher. #PasDeDébatPasDeMandat", concluent les signataires de la tribune.

2Comment a-t-il été repris sur les réseaux sociaux ?

Lundi, à la veille de la publication de la tribune dans Libé, le hashtag est retweeté plus de 500 fois, principalement par des comptes situés à gauche, comme le journaliste David Dufresne ou l'historienne Mathilde Larrère, tous deux signataires de la tribune. Son utilisation explose le lendemain. D'après des données fournies par l'entreprise d'analyse des réseaux sociaux Visibrain, le hashtag a été tweeté ou retweeté 7 260 fois le 15 mars, près de 26 000 fois le 16. Un compte Twitter "DebatMandat" sert également à relayer les publications avec le hashtag. Comme l'ont noté plusieurs journalistes, ce compte est en réalité un ancien compte tenu par des proches du député de La France insoumise François Ruffin.

L'extrême droite s'empare elle aussi du hashtag. L'ex-bras droit de Marine Le Pen, Florian Philippot, tweete un message à ce sujet, dénonçant un "mandat illégitime". Le candidat à la présidentielle, Eric Zemmour, reprend lui aussi le hashtag en critiquant une photo d'Emmanuel Macron publiée par sa photographe officielle.

3Comment réagit l'entourage d'Emmanuel Macron ?

"Tous ces procès en illégitimité sont déplacés et dangereux", répond à franceinfo le député LREM Roland Lescure. Dans une interview au Figaro, publiée mardi, le président du Sénat, Gérard Larcher, avait lui aussi fait entendre la musique de l'illégitimité. "S'il n'y a pas de campagne, la question de la légitimité du gagnant se posera. (...) Le président de la République veut être réélu sans jamais avoir été réellement candidat, sans campagne, sans débat, sans confrontation d'idées", cinglait-il, s'attirant les foudres des macronistes.

"Prétendre que l'élection serait illégitime parce qu'on n'a pas eu un débat à douze en prime time est ridicule. On peut débattre autrement !"

Roland Lescure, député LREM

à franceinfo

"On ne va pas ne pas faire campagne et on ne va pas enjamber l'élection, ça, ce serait dangereux, explique une cadre de la majorité. Ensuite, il y a un calendrier international qui bouscule la campagne et comme il est d'abord président, il ne peut pas esquiver ce job."

4Que répondent les signataires de la tribune ?

Face à la récupération de l'extrême droite, notamment du camp d'Eric Zemmour, le collectif à l'origine de la tribune dénonce auprès du HuffPost "l'opportunisme" et "l'utilitarisme politique de bas étage" du candidat. "Eric Zemmour fait ce qu'il veut. Mais bien sûr que ça nous déplaît. Qu'on ne s'y trompe pas : ceux qui vont remonter notre fil Twitter sur deux ou trois jours verront que l'ancrage à gauche est très clair, assure le collectif. Nous sommes vraiment dans une position qui dit 'dehors les droites et leurs extrêmes'. On ne sait pas comment il va se débrouiller dans sa communication, quand il aura gratté un peu derrière le hashtag."

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