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Présidentielle 2022 : comment Marine Le Pen et Eric Zemmour se sont affrontés par meetings interposés

Les deux candidats d'extrême droite, au coude-à-coude dans les sondages, se sont affrontés à distance à quelques heures d'intervalle ce samedi, Marine Le Pen à Reims et Eric Zemmour à Lille.

Article rédigé par Antoine Comte
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5 min
Des affiches d'Eric Zemmour et Marine Le Pen, le 27 novembre 2021. (MAXPPP)

C'était le duel politique le plus attendu de ce début de campagne présidentielle. En guerre ouverte depuis plusieurs semaines, Marine Le Pen et Eric Zemmour ont donné deux grands meetings, samedi 5 février, pour tenter chacun d'apparaître comme le grand vainqueur du match en cours à l'extrême droite. Les deux concurrents sont d'ailleurs donnés à égalité (14% chacun), selon un sondage Ipsos/Sopra Steria pour franceinfo et Le Parisien.

Lors de sa "convention présidentielle" à Reims (Marne), la candidate du Rassemblement national, qui avait dénoncé en début de semaine "les nazis" gravitant autour d'Eric Zemmour, a préféré cette fois-ci s'en prendre à Emmanuel Macron.

L'ancien polémiste était quant à lui à Lille (Nord), près du fief électoral de son adversaire directe. Mais il n'a pas cité une seule fois le nom de Marine Le Pen, consacrant l'essentiel de son discours au pouvoir d'achat. Un thème sur lequel il n'avait jusque-là pas l'habitude de faire campagne.

Eric Zemmour remporte la guerre des chiffres

Avec Jean-Luc Mélenchon, les deux candidats d'extrême droite, Marine Le Pen et Eric Zemmour, au coude-à-coude au premier tour selon notre dernier sondage, sont ceux qui rassemblent le plus de sympathisants dans leurs meetings. Mais dans ce match des chiffres, c'est Eric Zemmour qui l'a emporté ce samedi. Après son grand meeting de Villepinte (Seine-Saint-Denis), qui avait rassemblé environ 12 000 personnes en décembre, l'ancien éditorialiste a réuni cette fois-ci 6 000 à 8 000 personnes à Lille.

Il devance donc numériquement Marine Le Pen, qui a réuni de son côté environ 4 000 personnes au Parc des expositions de Reims. Dans cette salle plus petite que le Grand Palais de Lille, la cheffe du RN, qui tenait son premier grand meeting dans cette campagne présidentielle, a revu le dispositif scénique de son meeting. Elle a notamment mobilisé une soixantaine d'autocars en provenance de toute la France.

Reims et Lille, des lieux de meetings symboliques

Si Eric Zemmour a choisi de tenir un meeting à Lille, c'est d'abord parce que les Hauts-de-France sont l'un des fiefs électoraux du Rassemblement national. La députée du Pas-de-Calais et ancienne conseillère municipale d'Hénin-Beaumont reste très populaire dans la région, alors qu'Eric Zemmour semble convaincre davantage de Français dans le sud du pays. C'est d'ailleurs à Cannes (Alpes-Maritimes), qu'il avait organisé un important rassemblement le 22 janvier. 

A deux heures pile de voiture de la ville de la maire PS Martine Aubry, Marine Le Pen avait quant à elle choisi Reims, dont la cathédrale a accueilli le baptême de Clovis et le sacre de la plupart des rois de France. Une référence qui parle à une partie de son électorat souverainiste, mais aussi à celui d'Eric Zemmour.

La bataille des soutiens n'est pas tranchée

"Philippe, Gilbert, Guillaume, Jérôme, Jean-Frédéric..."  Au début de son meeting, Eric Zemmour a salué l'ensemble de ses soutiens politiques et en particulier les élus qui ont décidé de le rejoindre. De Guillaume Peltier (en provenance des Républicains) aux anciens du Rassemblement national comme Gilbert Collard et Jérôme Rivière, le candidat du mouvement politique Reconquête ! a voulu mettre en avant ses ralliements politiques pour montrer l'affaiblissement du parti de Marine Le Pen, mais sans jamais citer cette dernière.

La candidate du RN a tenté de stopper l'hémorragie en dénonçant, en début de semaine dans Le Figaro, "les catholiques traditionalistes, les païens et quelques nazis" qui gravitent dans la galaxie Zemmour. Mais elle a dû également constater l'absence à Reims du sénateur Jérôme Ravier et du député européen Nicolas Bay, officiellement positifs au Covid-19, mais soupçonnés de vouloir rallier Eric Zemmour. Marine Le Pen a en revanche pu compter sur les soutiens officiels du Premier ministre hongrois, Viktor Orban, et du chef de la Ligue italienne et ancien Premier ministre Matteo Salvini, dont des vidéos de soutien ont été diffusées avant son discours. 

Le pouvoir d'achat pour Eric Zemmour, un discours anti-Macron pour Marine Le Pen

Contrairement à ses prises de parole habituelles, Eric Zemmour n'est pas resté cantonné aux thèmes de l'immigration et de l'insécurité, mais s'est aventuré sur le dossier du pouvoir d'achat. Au cours de son discours d'une heure et demie, il a prononcé 72 fois le mot "travail" et 35 fois les mots "pouvoir d'achat".

L'ancien polémiste a notamment promis d'être "le président qui mettra fin au gaspillage de l’argent du contribuable", en réduisant drastiquement les impôts et les cotisations sociales. Il a ainsi proposé la création d'une "prime zéro charge", qui permettrait à un employeur de verser chaque année jusqu'à trois mois de salaire supplémentaires à un salarié, sans payer de cotisations sociales sur la prime versée.

De son côté, Marine Le Pen n'a pas du tout réagi au discours d'Eric Zemmour et aux récentes attaques de ce dernier. Elle a en revanche sèchement taclé la politique d'Emmanuel Macron, dont elle a prononcé le nom 21 fois. Durant plus de vingt minutes, la candidate du RN a dénoncé "les erreurs, la vanité et le cynisme" du président sortant, le qualifiant de "méprisant" et "déprimant". La finaliste malheureuse de l'élection présidentielle de 2017 a également fustigé "le progressisme d'Emmanuel Macron qui ne signifie pas le progrès mais la déconstruction, pas l'avancée mais la regression".

Beaucoup plus surprenant, Marine Le Pen a décidé à la toute fin de son discours de quitter son pupitre pour se confier sur son histoire personnelle. "Petite, j'ai connu la violence politique", a-t-elle lancé, avancée sur la scène, évoquant l'attentat à la bombe qui visa le domicile familal en 1976. Après avoir rappelé son statut de mère de famille "monoparentale", la candidate du RN a cherché rassurer sur sa capacité à remporter l'élection présidentielle : "J'ai beaucoup appris, j'ai tatonné, j'ai parfois échoué, je suis tombée, mais je me suis toujours relevée. (...) Alors à l'heure où je me présente devant vous pour la fonction suprême, je suis prête !"

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