"Ne pas braquer les LR", "Traduire le front républicain dans l'hémicycle"... Quel est le plan de l'exécutif pour aboutir à une coalition ?
Huit jours après les résultats des élections législatives, Gabriel Attal est toujours Premier ministre mais doit être démissionné mardi 16 juillet, alors qu'un Conseil des ministres est prévu à 11h30. L'équipe gouvernementale actuelle devrait rester toutefois un certain temps en place pour gérer les "affaires courantes" et assurer la continuité de l'Etat. Une démission enfin acceptée pour permettre aux ministres qui ont été élus députés de participer à l'élection à la présidence de l'Assemblée nationale, puis à l'attribution des postes clés au Palais Bourbon vendredi et samedi.
Gabriel Attal va pouvoir se consacrer à ces négociations. Il a tout d'abord été nommé président du groupe Renaissance de l'Assemblée nationale, désormais nommé "Ensemble pour la République". Et alors que la gauche s'enlise et s'entête autour d'un nom à proposer pour Matignon, la pression s'accentue très fort sur lui pour qu'il se tourne vers la droite.
"Il faut y aller doucement pour ne pas les braquer"
Une première manœuvre a ainsi lieu, en coulisse, pour tenter de faire élire un cacique des Républicains à la présidence de l'Assemblée nationale. Le nom d'Annie Genevard, députée du Doubs, circule pour devenir le quatrième personnage de l'État. "Ça n'est pas gratuit, si on veut une coalition avec LR, il faut les payer cher", se persuade un député à la manœuvre. Il appelle toutefois à faire preuve de subtilité : "Il faut y aller doucement pour ne pas les braquer, ne pas leur donner l'impression qu'ils ont les mains liées..." À ses yeux, jeudi 18 juillet, il s'agit de poser la première pierre d'un accord. "On n'a jamais vraiment essayé, Gabriel [Attal] est le plus talentueux pour réussir", assure un élu.
Lundi, en réunion de groupe, le toujours Premier ministre a reçu mandat de ses troupes pour entamer les discussions autour d'une position de principe : tout faire pour empêcher le Rassemblement national et le Nouveau Front populaire d'accéder au perchoir. "Quand Laurent Wauquiez parle de pacte législatif, c'est un pas de géant", se félicite un stratège. Le vote, qui se fera à bulletins secrets dans l'hémicycle, peut aider et libérer les consciences.
"Comme un enfant, le président fait pouce"
Mais l'exécutif ne ferme pas non plus complètement la porte à la gauche... à l'exception de tout accord avec La France insoumise. Pour les postes clés de vice-présidents, de questeurs ou de présidents de commissions, le camp d'Emmanuel Macron nuance sa stratégie "ni RN, ni LFI". "Il faut traduire le front républicain dans l'hémicycle", explique une petite main, qui oublie au passage que certains députés du camp présidentiel ont été élus avec des voix de gauche, que certains macronistes se sont désistés au profit d'un insoumis et que ces postes à l'Assemblée sont attribués en fonction du poids de chaque groupe, via un système de points.
"Il faut laisser tous les partis de gouvernement aller au bout de leur délire : ils ne peuvent pas gouverner sans parler aux autres"
Un conseiller de l'exécutif, qui vise les socialistesà franceinfo
Avant de nommer un Premier ministre, Emmanuel Macron compte sur ces élections à l'Assemblée pour y voir plus clair. Si le plan ne se déroule pas comme prévu, le risque redoute un élu c'est que "l'Assemblée soit complètement ingérable" et que le camp présidentiel perde aussi toute son influence au Palais Bourbon.
Dans la tête du chef de l'État, ces élections à l'Assemblée ont donc valeur de test en vue de la coalition dont il rêve. L'Élysée se persuade que la situation va s'éclaircir. C'est aussi une manière de "gagner du temps", juge un poids lourd du gouvernement. "Comme un enfant, le président fait pouce", constate-t-il froidement, avant de glisser qu'"on peut faire plein de deals à l'Assemblée", ça ne change rien à la situation politique. Une nouvelle réunion lundi a eu lieu à l'Elysée pour tâcher d'avancer sur un programme et un calendrier législatif et commencer à tendre la main.
En réalité, pour l'instant, rien n'est officiel et rien n'est "topé". Il est trop tard pour aboutir avant les Jeux olympiques, sans doute aussi avant la semaine du 15 août. "Il faut bien respirer un peu", plaisante un conseiller qui voit les négociations reprendre ou commencer pour de bon quand le soufflé sera retombé une dizaine de jours avant la rentrée scolaire. "Pourquoi pas", fait mine de s'interroger un stratège : "On risque de rester démissionnaire longtemps", anticipe un autre, qui est convaincu que "la seule vraie deadline, c'est le budget". Autrement dit : rendez-vous à l'automne.
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