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Union des démocrates musulmans français : quel est ce parti derrière la 34e liste aux européennes ?

Le ministère de l'Intérieur a validé jeudi la candidature de la liste "Une Europe au service des peuples", portée par un tout jeune parti : l'Union des démocrates musulmans français. 

Article rédigé par franceinfo
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Capture d'écran de la page présentant la liste de "Une Europe au service des peuples", portée par le parti de l'Union des démocrates musulmans français.  (UNION DES DEMOCRATES MUSULMANS FRANCAIS)

L'Union des démocrates musulmans français (UDMF) a pris le train des élections européennes en marche. Jeudi 9 mai, le parti, créé en 2012, a obtenu l'aval du ministère de l'Intérieur pour présenter sa liste – "Une Europe au service des peuples" – lors du scrutin du 26 mai. Ce qui porte à 34 le nombre de listes soumises au vote des électeurs français.

Selon Nagib Azergui, fondateur du parti et tête de liste, contacté par franceinfo, il manquait une mention manuscrite à certains documents remis par les candidats de l'UDMF. La liste a donc été invalidée dans un premier temps, avant d'être autorisée à participer à l'élection après régularisation.

Rejeter l'étiquette communautaire

L'Union des démocrates musulmans de France est née à la fin de l'année 2012, alors que François Hollande est au pouvoir depuis quelques mois. Nagib Azergui, originaire de Nanterre (Hauts-de-Seine), travaille alors dans la formation informatique, selon Le Parisien. Son engagement provient d'un "constat tragique", écrit-il dans la biographie de son blog, hébergé par Mediapart : "Le 'musulman' était devenu un argument électoral majeur et récurrent dans la vie politique de notre pays." Crise économique, accroissement de la dette publique, explosion du chômage... Ces "problèmes de fond" sont, dit-il, mis au second plan, éclipsés par la question de l'islam, "l'unique sujet, tant économique que sociétal, de la classe politique française." L'Union des démocrates musulmans français entend, entre autres, lutter contre l'islamophobie d'une partie du discours politique hexagonal.

Un défi que le parti veut toujours porter, sept ans après sa création : "Nous en avons marre d’être instrumentalisés. Nous nous sommes fait avoir derrière de belles paroles mais on nous montre toujours du doigt comme des ennemis de l’intérieur. Il faut créer une réponse politique", a argumenté Nagib Azergui, cité par Le Figaro, le 1er mai. Au Muslim Post, il se défend d'être à la tête d'un parti communautaire, le décrit comme "laïque, respectant les lois de la République" et en appelle aussi aux voix des non-musulmans. Et de répondre aux critiques de l'extrême droite : "Nous ne sommes pas là pour mettre en place le 'grand remplacement' de la République par la charia", assure-t-il. 

Dans les interviews, il compare souvent sa formation au Parti chrétien-démocrate (PCD) de l’ex-ministre Christine Boutin. Une comparaison que n'a d'ailleurs pas goûtée Jean-Frédéric Poisson, candidat du PCD à la présidentielle de 2017 : "Nous ne sommes pas du tout dans le même état d'esprit, car l'inspiration de l'UDMF semble tout droit issue d'une application stricte d'un certain nombre de principes du Coran dans l'espace public", expliquait-il au Figaro en 2015.

Le parti ne revendique pas de couleur politique, si ce n'est la couleur "or", indique son site internet, mais il défend un positionnement à gauche. Son slogan : "Agir pour ne pas subir". Et son idéologie : "Anti-impérialisme, antisionisme, anticolonialisme", indique encore la page. Toujours selon Le Figaro, "le mouvement compte un bureau de trois personnes, 800 adhérents à jour de cotisation et une quinzaine de relais locaux en France représentant 250 sympathisants sur le terrain."

Une (petite) expérience des élections

C'est la première fois que le parti se présente aux européennes, mais il a déjà l'expérience d'élections locales. En 2014, l'UDMF entend se présenter aux municipales, à Bobigny (Seine-Saint-Denis). Le dossier est déposé, mais la candidature est rejetée à la dernière minute, car le candidat n'est pas inscrit lui-même sur les listes électorales, raconte Le Parisien. Le jeune parti apporte toutefois son soutien au candidat UDI, Stéphane de Paoli. Une fois élu, avec 53,99% des voix, le centriste intègre à son équipe le premier élu du parti, Hocine Hebbali.

Conseiller municipal à l'histoire locale, il est chargé de plancher sur la future création d'un musée de la colonisation française, une mesure phare du programme culturel de l'UDMF (lien en PDF)Mais l'expérience se termine mal. Cité par Le Figaro, Nagib Azergui évoquait les "trahisons" qui ont suivi cette alliance politique, tandis que le nom d'Hocine Hebbali ne figurait plus sur le site de la mairie et a disparu mi-2016 des comptes-rendus du conseil municipal. 

En 2015, le parti se lance dans huit cantons à l'occasion des départementales, avant de renoncer. Pour expliquer ce retrait, il est avancé, sur le site du parti, que certains colistiers ont été "victimes d'intimidation de la part de la classe politique et au quotidien sur le terrain". Interrogé à l'époque par Le Figaro, Nagib Azergui raconte qu'"il y a eu un déferlement médiatique malsain et diverses pressions, notamment sur des mécènes anonymes qui ont finalement renoncé à nous apporter leur financement. Beaucoup ont oublié que nous étions un micro-parti en construction et divers politiciens se sont insurgés à la lecture du mot musulman dans le nom de notre parti."

A la droite et à l'extrême droite de l'échiquier politique en particulier, ces candidatures, qui font suite à la publication de Soumission, le roman de Michel Houellebecq qui imagine un parti musulman à la tête de la France, ont alimenté les fantasmes. 

Finalement, l'UDMF est parvenu à mener à terme une campagne, à l'occasion des régionales, la même année. Ancien conseiller municipal d'opposition (UDI) à Brie-Comte-Robert (Seine-et-Marne), Nizarr Bourchada et sa liste ont obtenu 0,39% des voix (soit 1 306 voix).

Quant au candidat de l'UDMF à l'élection présidentielle 2017, Kamel Messaoudi, il n'a récolté que trois parrainages d'élus. Quelques mois plus tard, les législatives ont permis à six binômes de porter les couleurs du parti. Le porte-parole, Eric Berlingen, a obtenu notamment 0,37% des voix dans la première circonscription de l'Essonne, face à Manuel Valls. C'est à Mayotte que le parti a réalisé son meilleur score : 5,10% des voix. Certains bureaux de vote des Hauts-de-Seine ont par ailleurs enregistré des scores au-delà de 10%.

Un programme en "sept défis capitaux"

L'Union des démocrates musulmans de France s'est lancée dès le 3 mars 2019 dans la campagne des européennes, lors d'un meeting à Vaulx-en-Velin (Rhône). Sur Twitter, Nagib Azergui a posté quelques instantanés de campagne et relayé les quelques interventions médiatiques de ses colistiers.

Le programme de la liste "Une Europe au service des peuples", lui, se trouve en ligne, sur le site dédié à la campagne de l'UDMF. Axé autour de "sept défis capitaux", le projet européen du parti débute par un paragraphe consacré à l'écologie, arguant que ses mesures "traiteront aussi bien de la lutte contre la pollution plastique, celle sur les perturbateurs endoctriniens ou les allergènes en passant par le défi de la transition énergétique". Contre l'évasion fiscale, le mouvement entend "criminaliser certaines pratiques, dénoncer les paradis fiscaux, lever le secret bancaire des entreprises européennes et lutter efficacement contre l'influence des groupes de pression".

Défi du vivre-ensemble, défi des libertés individuelles, défi d'une presse indépendante… Le parti finit par évoquer l'islamophobie à l'occasion d'un paragraphe visant à présenter "le défi du combat contre la haine" : "Une loi doit être inscrite au sein du Parlement européen afin de condamner toute diffusion de discours de haine envers la communauté musulmane en permettant la dissolution de toutes associations ou groupements islamophobes, tous médias qui exploitent cette littérature islamophobe pour faire du profit en véhiculant des théories complotistes anti-musulmanes", avance le programme. 

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