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"Pour qui se prennent-ils ?" : les huit porte-parole officiels des "gilets jaunes" ne font pas l'unanimité

Lancée lundi, cette délégation se propose d'entrer en contact avec le gouvernement et l'Elysée. Mais localement, beaucoup de manifestants n'apprécient pas cette initiative et ne reconnaissent pas la légitimité des représentants.

Article rédigé par Raphaël Godet
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 3 min
Des "gilets jaunes" dans les rues de Rochefort (Charente-Maritime), le 24 novembre 2018. (XAVIER LEOTY / AFP)

"Il fallait passer sur BFM pour se faire remarquer ?" Au bout du fil, Alexandre Compère ne cache pas sa colère. C'est en écoutant la radio, lundi 26 novembre, qu'il a appris l'existence d'une "délégation" de huit "communicants officiels" chargée "d'engager une prise de contact sérieuse et nécessaire avec les représentants de l'Etat et de son gouvernement". Mobilisé depuis le début du mouvement de"gilets jaunes", le Drômois n'apprécie que moyennement la méthode. "On sait qu'il faut se structurer pour continuer la bataille. Mais ces huit personnes, comment ont-elles été désignées ? Qui sont-elles ?" s'interroge-t-il.

On a l'impression qu'ils font ça dans notre dos. Ce n'est pas très agréable. Ils la jouent perso. Pour qui se prennent-ils ?

Alexandre Compère, "gilet jaune" à Valence

à franceinfo

Jacline Mouraud, l'une des voix qui ont lancé le mouvement mi-octobre, ne prend pas beaucoup plus de gants. "Il paraît même qu'il y a eu une réunion dimanche soir. Bizarre, personne n'était au courant, s'étonne la Bretonne de 51 ans. Et qu'on se comprenne bien, il n'y a pas de jalousie de ma part, je ne voulais pas faire partie de la délégation. C'est juste qu'on parle d'un mouvement citoyen, et là, je ne vois pas ce qu'il y a de citoyen quand on fait les choses dans un coin." Elle raconte avoir rencontré l'un des huit membres de la fameuse délégation "il y a quelques jours, sur le plateau de Cyril Hanouna", sur C8. Mais "on ne s'est pas parlés, il ne m'a pas laissé son numéro de téléphone". 

"Les ronds-points, ça va un temps..."

Qu'importe, beaucoup de meneurs vont continuer de s'organiser localement... "sans faire attention aux huit qui ne représentent strictement personne". Avec ses collègues de l'Ardèche et de l'Isère, le Drômois Alexandre Compère est par exemple en train de "mutualiser les moyens". "On a conscience qu'il faut se fédérer pour pouvoir durer dans le temps, reconnaît le porte-parole du mouvement à Valence. On était encore au téléphone ce matin. Les ronds-points, ça va un temps. Maintenant, on veut taper plus fort avec des actions communes au niveau régional. Les centres d'impôts, les préfectures..."

A 140 kilomètres de là, dans le Vaucluse, les choses bougent "dans le bon sens" aussi. Depuis quelques jours, chaque commune du département organise des assemblées citoyennes pour désigner deux porte-parole, un homme et une femme. "Ces référents ont pour rôle de tout faire remonter au niveau départemental, détaille à franceinfo Christophe Dutalloir. On va gagner en temps, donc en efficacité." Lui est convaincu que son modèle est exportable ailleurs. "Si des gens veulent nous imiter, qu'ils m'appellent !"

Nos voisins du Gard sont intéressés, on va les aider à faire comme nous. Ça doit faire boule de neige.

Christophe Dutalloir, "gilet jaune" dans le Vaucluse

à franceinfo

Ce n'est pas tout : un compte Twitter Le Parti jaune a également vu le jour le 25 novembre. Il comptait 350 abonnés au moment d'écrire ces lignes. Qui se cache derrière ? "Aucune idée", répondent en choeur les porte-parole que franceinfo a contactés.

Sur l'île de La Réunion, où le mouvement prend aussi de l'ampleur, un collectif donne l'impression d'un glissement vers une organisation politique. Son nom : Tous unis pour La Réunion-coordination des gilets jaunes. Il a été lancé dimanche 25 novembre. 

D'autres, comme Benjamin Cauchy, ont carrément décidé de se lancer seuls. Après avoir squatté les plateaux télés (notamment lundi matin sur BFMTV), le cadre de 38 ans lance son propre mouvement. Son nom : Citron. "On en a marre d'être pressés, on ne veut pas de pépins et on est jaune aussi", explique-t-il. Le meneur toulousain faisait de moins en moins l'unanimité au sein du mouvement des "gilets jaunes". Certains lui reprochent ses convictions politiques. Selon France 3, il fréquenterait des membres d’un groupuscule de l’ultradroite. Ce que l'intéressé dément.

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