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Loi "anti-casseurs" : Amnesty international demande "l'abrogation" du texte

"Il y a un arsenal répressif en France déjà largement suffisant", a déclaré samedi sur franceinfo Nicolas Krameyer, responsable du programme liberté d'expression et défenseurs des droits humains pour Amnesty International France.

Article rédigé par franceinfo
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Les "gilets jaunes", place de la République à Paris, le 13 avril 2019. (NATHANAEL CHARBONNIER / FRANCE-INFO)

La loi "anti-casseurs", promulguée au Journal officiel jeudi 11 avril, est "une loi totalement de circonstance, votée dans la précipitation", a estimé samedi 13 avril sur franceinfo Nicolas Krameyer, responsable du programme liberté d'expression et défenseurs des droits humains pour Amnesty International France, alors qu'une quarantaine d'organisations ont appelé samedi à manifester contre cette loi. "Il y a un arsenal répressif en France déjà largement suffisant", explique Nicolas Krameyer. Amnesty international demande "l'abrogation de ce texte". "La population française est attachée au droit de manifester pacifiquement", tient à rappeler Nicolas Krameyer.

franceinfo : L'article 3 de la loi a été censurée par le Conseil constitutionnel. Malgré tout vous estimez toujours que ce texte est liberticide ?

Nicolas Krameyer : C'est toute la loi qui pose problème. On est très satisfait à Amnesty international avec d'autres organisations, que le Conseil constitutionnel ait joué son rôle et ait censuré l'interdiction administrative de manifester. Ce qui nous pose problème, c'est que c'est toute la loi qui est extrêmement problématique, et notamment la dissimulation de visage. Si une personne commet un délit, une violence, elle peut être interpellée. Il y a un arsenal législatif totalement suffisant pour permettre de mettre en garde à vue des personnes qui commettraient des délits en manifestations. Mais là, on est en train de dire aux Français, si vous vous masquez le visage même partiellement, si vous vous mettez une écharpe sur le nez parce qu'il y a de gaz lacrymogène, que vous souhaitez protéger votre vie privée ou tout simplement parce qu'il fait froid, vous êtes susceptibles d'être interpellés, placés en garde à vue, déférés en comparution immédiate et vous risquez jusqu'à un an de prison. Voilà une loi totalement de circonstance, votée dans la précipitation, qui a été dénoncée par les organisations, et aussi par les instances onusiennes et le Conseil de l'Europe.

Aujourd'hui il y a eu de la casse. Que fait-on pour lutter contre ces violences ?

Là, on désigne des personnes qui se masquent le visage et qui commettent des violences et on dit, les personnes qui se cachent le visage sont donc des personnes violentes. Dans un Etat de droit, c'est inacceptable. Il y a un arsenal répressif en France déjà largement suffisant. Il y aussi la question du maintien de l'ordre. On est face à une dérive extrêmement inquiétante. Les stratégies de maintien de l'ordre favorisent ces violences en manifestations. Elles doivent être sanctionnées selon la loi, mais pas selon de nouveaux délits qui n'ont rien à voir avec l'application de la loi et des normes internationales en matière de maintien de l'ordre. Il serait temps de réfléchir à la stratégie du toujours plus face aux violences. Ce n'est pas en inventant de nouvelles lois totalement liberticides qui menacent le droit de manifester en France qu'on va changer quoi que ce soit à la nature des violences.

Vous attendez quoi du gouvernement ?

Ce que nous demandons très clairement, c'est l'abrogation de ce texte. Ce que nous demandons avant son abrogation, c'est qu'à minima, les dispositifs ne soient pas utilisés parce que cela va conduire à des interpellations, des gardes à vue et des condamnations arbitraires en France. Nous pensons, au vue du nombre de rassemblements qui se sont tenus en France, que la raison peut l'emporter. La population française est attachée au droit de manifester pacifiquement et ce n'est pas avec des lois de circonstance que l'on peut régler des problématiques qui n'ont rien à voir avec le maintien de l'ordre.

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