Retraites : "il n'y a pas de réforme de gauche quand il n'y a pas de démocratie sociale qui fonctionne", estime Bernard Cazeneuve
Le ministre du Travail a confirmé mardi que la piste d'une réforme par un amendement au budget de la Sécurité sociale faisait partie des scénarios envisagés. un déni de démocratie, estime l'ancien Premier ministre.
"Si on veut une réforme [des retraites] qui soit une réforme de gauche, il faut que plusieurs conditions soient réunies", affirme mardi 20 septembre sur franceinfo Bernard Cazeneuve. L'ancien Premier ministre - questionné sur l'allongement de la durée des cotisations à 43 ans voulue par François Hollande et accélérée aujourd'hui par le gouvernement actuel - détaille ces conditions. Elisabeth Borne doit recevoir mercredi et jeudi les présidents des groupes parlementaires pour discuter du projet de réforme du gouvernement.
"Tout cela est totalement incohérent"
En premier lieu pour Bernard Cazeneuve, "il n'y a pas de réforme de gauche quand il n'y a pas de démocratie sociale qui fonctionne." Pour lui ce dialogue doit s'établir entre "les organisations syndicales et patronales et les ministères concernés, de manière à faire en sorte que la réforme soit juste." Celui qui a aussi été ministre de l'Intérieur de François Hollande s'appuie également sur "le rapport du Comité d'orientation des retraites" qu'il qualifie de "complexe" et qui n'est "pas tout à fait conclusif" pour étayer son propos. "Il faut donc soumettre les conclusions de ce rapport au dialogue social", ajoute Bernard Cazeneuve.
"La réunion de la Convention nationale de refondation était le témoignage de la volonté du président de la République d'organiser le dialogue le plus large autour de ces enjeux", poursuit l'ancien maire PS de Cherbourg, avant d'ajouter : "On réunit donc la Convention nationale puis on explique qu'on va passer la réforme par un amendement au PLFSS [Projet de loi de financement de la Sécurité sociale présenté le 26 septembre en Conseil des ministres et examiné ensuite au Parlement] à coup de 49-3. Tout cela est totalement incohérent."
Malgré l'opposition unanime des syndicats, le ministre du Travail a en effet confirmé mardi que la piste d'une réforme par un amendement au budget de la Sécurité sociale "fait partie des scénarios" envisagés par l'exécutif.
"L'âge pivot est inacceptable"
Pour Bernard Cazeneuve, la deuxième condition nécessaire est la bonne compréhension de la réforme par les Français : "Il ne peut pas y avoir de réforme des retraites qui soit perçue à juste titre par les Français comme un recul."
"Si quand on dit réforme, les Français comprennent recul, c'est qu'elle est mauvaise".
Bernard Cazeneuveà franceinfo
Et l'ancien Premier ministre de préciser sa pensée : "L'âge pivot est pour moi inacceptable parce que ça voudrait dire que quiconque à commencer à travailler tôt dans des métiers pénibles, ne pourra pas prendre sa retraite dans des conditions qui tiennent compte de la pénibilité du travail qu'il a accompli et des difficultés auxquelles il a été confrontées."
"Il est temps de revenir à la démocratie sociale"
Enfin, pour l'ancien député, "il faut un contenu dans la réforme qui permette d'engranger - par le compromis - des progrès en matière de pénibilité, de départ anticipé, de reconnaissance des conditions de travail difficiles etc." Toutefois, ajoute Bernard Cazeneuve, "il n'y a pas de possibilité d'avoir des retraites par répartition si on ne rétablit pas l'équilibre des comptes." Selon lui, "toutes les pistes doivent être mises sur la table".
Bernard Cazeneuve résume ainsi sa position : "Il ne peut pas y avoir d'allongement de la durée de cotisation si, en contrepartie, il n'y a pas des progrès sociaux significatifs engrangés." Et pour trouver cet équilibre, selon lui, il faut engager un dialogue social : "Ça s'appelle la démocratie sociale, c'était un principe reconnu dans la Constitution de 1946. La démocratie est en panne depuis plusieurs années, il est temps de revenir à la démocratie sociale, sans laquelle il n'y a pas de réforme possible".
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