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La valse folle des dépassements d’honoraires

La Sécurité sociale sait. Elle dispose de l’arsenal nécessaire pour sanctionner les dépassements d’honoraires illégaux, mais elle ne le fait pas. L’enquête menée par un collectif d’associations est édifiante, les pratiques semblent sans limite…
Article rédigé par franceinfo
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La machine s’est emballée et rien ne semble pouvoir l’arrêter.
_ C’est ce qui ressort d’une étude nationale menée par le Collectif interassociatif sur la santé (CISS), un état des lieux sur la pratique des dépassements d’honoraires dans le secteur médical. Le CISS a écrit à 88 Caisses primaires d’assurance maladie (CPAM). Sur les 22 qui ont répondu, 9 seulement ont fourni des données exploitables.

Et le constat est tout simplement édifiant. Surtout dans le cadre conventionnel du secteur 1, où les dépassements d’honoraires ne peuvent être que très exceptionnels et justifiés par une demande particulière du patient.
Ainsi, depuis début 2008 en Corrèze, près de 2.500 actes réalisés par des généralistes ont déjà fait l’objet d’un dépassement sans motif, dont le montant peut atteindre 542 euros ! Dans la Drôme, plus de 96% des généralistes facturent des dépassements d’honoraires non autorisés. Et dans la Meuse, le nombre de généralistes surfacturant les visites à domicile est passé de 26 en 2004 à 98 en 2006.

Le "tact" et la "mesure"

Dans le secteur 2 (médecins conventionnés à honoraires libres), "la dérive continue", relève le CISS, alors que les dépassements doivent respecter le "tact" et la "mesure". Ainsi à Longwy (Moselle), un stomatologue a facturé à lui seul près de… 286.000 euros de dépassements en 2007.
_ Championne de France, la spécialité chirurgicale forme un peloton où les médecins ont l’habitude de pratiquer d’importants dépassements. Voire très importants : 10% des chirurgiens du secteur 2 présentent un taux de dépassement supérieur à 229% du tarif conventionné.

Au total, les dépassements tarifaires ont représenté six milliards d’euros en 2006. Pour enrayer cette pandémie, la ministre de la Santé Roselyne Bachelot veut obliger les praticiens à informer leurs patients par écrit quand la consultation dépasse les 80 euros. Le CISS préconise de renforcer les sanctions, en dressant systématiquement un procès verbal à tout professionnel "contrevenant". Et en "déconventionnant" tout praticien qui persiste dans l’illégalité. Les CPAM disposent de cet arsenal répressif. Pourquoi ne l’utilisent-elles pas ?

Car ces honoraires dont l’envolée est exponentielle rendent évidemment très délicat l’accès aux soins pour les populations les moins favorisées. Dans le Gard par exemple, aucun chirurgien général n’exerce en secteur 1, que ce soit à l’hôpital ou en clinique. Et partout, face à ce que représente la blouse blanche, les patients ont beaucoup de mal à résister aux exigences financières de leur médecin. A fortiori dans les déserts médicaux, les zones très rurales, où l’absence de "concurrence" entre praticiens ne contribue pas à faire baisser les tarifs.

Gilles Halais avec agences

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