La crise du logement cache "une crise sociale sous-jacente extrêmement forte", alerte Véronique Bédague, patronne de Nexity
Le constat de Véronique Bédague est sans appel, derrière la crise du logement se cache "une crise sociale sous-jacente extrêmement forte", estime la PDG de Nexity, premier groupe immobilier français, invitée lundi 24 avril sur France Inter. Avec "100 000 personnes mal logées de plus, 10% de plus de personnes à la rue et 100 000 demandeurs de logements sociaux en plus l'an dernier", elle appelle les autorités à se saisir pleinement de cette crise, "un poison lent, mais extrêmement sûr".
Alors que le marché de l'immobilier est à la fois marqué par l'effondrement des logements neufs d'une part et par "le blocage complet" du marché de la location d'autre part, elle déplore le fait qu'Emmanuel Macron parle de tout sauf du logement tandis que Bercy "analyse ce qu'il se passe avec des tableaux Excel (…) sans jamais regarder ce que vivent vraiment les Français". Concernant le marché du neuf, Véronique Bédague constate que cela fait "des années" qu'il n'y a pas assez d'offres. "On ne construit pas assez" de logements, déplore-t-elle, alors que plusieurs professionnels du secteur ont rappelé ces derniers jours la nécessité de construire 500 000 logements neufs par an, contre 375 000 en 2022. "On est loin du compte et je pense qu'il va y avoir un réel effondrement de la maison individuelle", estime la patronne de Nexity.
L'influence de la hausse des taux d'intérêt sur l'accès à la propriété
Elle pointe du doigt la hausse des taux d'intérêt qui sont passés de 1 à 3% en moins de deux ans, dégradant nettement la situation. "Cette hausse des taux d'intérêt a diminué d'à peu près 25%, d'un quart, le pouvoir d'achat immobilier des Français", explique Véronique Bédague. "Les jeunes, les plus modestes, ont vraiment beaucoup plus de mal qu'autrefois à accéder à la propriété", regrette-t-elle, alors que "le désir de logement, d'être propriétaire, reste là".
À cela s'ajoute la réglementation sur les passoires thermiques, interdites à la location depuis le 1er janvier, avec un élargissement prévu pour les biens classés G en 2025, puis F en 2028 et E en 2034. "On s'est rendu compte qu'en Île-de-France, 46% des logements loués aujourd'hui dans le secteur privé sont des passoires thermiques donc potentiellement ces logements risquent de sortir du marché de la location. Vous imaginez l'effet que ça peut avoir en Ile-de-France ?", lance Véronique Bédague, craignant que le marché locatif se tende encore davantage.
>> Crise énergétique : où se trouvent les passoires thermiques en France ?
"Si nous ne lançons pas nos chantiers, l'emploi dans le BTP va forcément refluer", prévient-elle convaincue que le chiffre de 100 000 emplois en moins dans le BTP l'an prochain est certainement "sous-évalué". Véronique Bédague appelle par ailleurs à "revisiter les règles du Haut Conseil de stabilité financière qui bloquent l'initiative des banques". Le gouvernement présentera le 9 mai prochain des propositions issues des consultations du Conseil national de la refondation (CNR) pour répondre à la crise du logement.
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