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"La plupart des salariés partent complètement cassés avant l'âge" : dans cet abattoir, on se prépare aussi à la grève

Le gouvernement s’attend à une forte mobilisation dans les entreprises et les services publics le 5 décembre. La grande inconnue reste la mobilisation du secteur privé car, faute d'obligation de déclaration, elle est difficile à anticiper.

Article rédigé par franceinfo, Grégoire Lecalot
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Un abattoir à Saint-Gaudens, dans le département de la Haute-Garonne (illustration). (REMY GABALDA / AFP)

Ces dernières semaines, des salariés d’entreprises qui font peu parler d’elles sur le plan social, se sont manifestés auprès des centrales syndicales en prévision de la grève du 5 décembre sur la réforme des retraites. Depuis 36 ans, Alain Gaborit travaille dans un abattoir du groupe Bigard, en Vendée. Et quand on lui demande s’il sera en grève demain, la réponse fuse : "Ah mais bien sûr ! De toute façon, pour nous, c'est une grande hypocrisie puisque la plupart des salariés partent complètement cassés avant l'âge. J'invite M. Macron à venir travailler une semaine sur une chaîne d'abattage. Il verra très bien les problèmes que rencontrent les salariés à finir leur journée, à finir leur semaine. Je peux vous dire qu'à la fin de la semaine, il n'y a plus personne."  

La pénibilité au cœur des inquiétudes chez Bigard

Ce mois-ci, il a encore assisté deux salariés licenciés pour inaptitude médicale. Son collègue, Dominique Douin, coordinateur FO pour ce groupe de 14 000 personnes, numéro un français de la viande avec des marques comme Charal, confirme que la question des retraites est très sensible pour ces salariés au travail pénible.   

Beaucoup n'arrivent pas jusqu'à la retraite en bon état. Déjà à 45-50 ans, on a des salariés qui partent en licenciement pour inaptitude.

Dominique Douin, coordinateur FO chez Bigard

à franceinfo

"Et quand on est en inaptitude dans l'agroalimentaire, pour retrouver un emploi ailleurs, c'est très compliqué, confirme le syndicaliste. Donc des trimestres validés mais pas cotisés forcément. Toutes ces choses-là font que le 5 décembre, il y aura aussi des salariés du privé. Il ne faut pas les oublier."  

Les salariés vont faire grève

Au siège national de la fédération FO de l’agroalimentaire et de l’hôtellerie-restauration, un service dédié renseigne les salariés sur les modalités de grève, des salariés qui se montrent inquiets pour leurs futures pensions. "Je crois qu'il y a un point que les salariés ont très bien compris, précise Richard Rose, en charge de la branche agroalimentaire, c'est que la retraite sera calculée sur une carrière complète au lieu des 25 meilleures années. C'est un des points-clé de la réforme. Cela veut dire que toutes les interruptions de carrière pour chômage seront prises en compte et cela fera diminuer la pension."  

Et Dejan Terglav, secrétaire général de la fédération, pressent une mobilisation du privé au-delà du cadre syndical : "Je n'ai jamais vu une telle ampleur de questions. Jusqu'à maintenant, on avait les élus qui faisaient grève, très clairement. Là, ce qu'on sent, c'est que les salariés vont faire grève."  

Ça sera d'une grande ampleur, du jamais vu chez nous.  

Dejan Terglav, secrétaire général de la fédération

à franceinfo

Des appels à la grève ont été lancés dans plusieurs grandes entreprises de l’agroalimentaire comme Carrefour, Casino ou le charcutier Herta.

Grégoire Lecalot a rencontré des salariés de Bigard, en Vendée

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