Gaz : pourquoi les tarifs risquent d'augmenter à partir du 1er juillet, alors que les prix sur les marchés reculent

La Commission de régulation de l'énergie a annoncé une hausse du tarif d'utilisation du réseau de gaz pour financer son entretien et les nouvelles infrastructures nécessaires au développement du biométhane.
Article rédigé par Alice Galopin
France Télévisions
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Un chauffage au gaz dans un logement à Paris, le 18 octobre 2022. (MAGALI COHEN / HANS LUCAS / AFP)

Après l'électricité, les factures de gaz vont-elles aussi grimper ? La Commission de régulation de l'énergie (CRE) s'est prononcée, vendredi 2 février, en faveur d'une hausse du tarif des réseaux à partir du 1er juillet. Une augmentation qui peut sembler contre-intuitive dans un contexte de "baisse" de la consommation de gaz, confirmé sur franceinfo par la présidente de la CRE, Emmanuelle Wargon, et de recul des prix sur les marchés de gros.

Pour comprendre la hausse recommandée par la CRE, qui doit encore être validée par le Conseil supérieur de l'énergie, commençons par rappeler que la facture de gaz est divisée en trois composantes : "les taxes, le réseau, et le prix de la molécule de gaz", énumère Nicolas Goldberg, spécialiste de l'énergie et associé chez Colombus Consulting. Les taxes, fixées par l'Etat, ont déjà augmenté en début d'année dans le cadre de la disparition progressive du bouclier tarifaire.

Un "prix de l'entretien des tuyaux" réparti "sur une consommation plus faible"

L'augmentation proposée par la CRE est liée à la revalorisation du tarif d'utilisation des réseaux. Révisé tous les quatre ans, il couvre les coûts d'acheminement du gaz supportés par le gestionnaire du réseau, GRDF (Gaz réseau distribution France), et est facturé par les fournisseurs aux consommateurs. "Ces tuyaux, il faut les entretenir, il faut les remplacer quand ils sont défaillants", a justifié dimanche la présidente de la CRE sur franceinfo. Ces quatre dernières années, "le tarif est resté stable et n'a donc pas permis de couvrir l'ensemble des coûts de l'entreprise", fait valoir GRDF.

En outre, l'augmentation du tarif sur les quatre prochaines années doit aussi financer la transition énergétique et le développement des infrastructures nécessaires au développement du biométhane. "Il est produit de façon locale, souvent par des agriculteurs ou parfois sur des installations de gestion des déchets, et il faut bien raccorder ces installations de méthanisation jusqu'au réseau de gaz", ajoute Emmanuelle Wargon.

En parallèle, entre août et novembre 2023, la consommation de gaz a baissé de 27,7% par rapport à la même période en 2018, selon les données du transporteur d'énergie GRTgaz. Depuis la crise énergétique, "tout le monde a changé son comportement" et "les clients ont de nouvelles habitudes", explique Nicolas Goldberg. "Cette baisse des consommations et du nombre de clients de GRDF se poursuivra" dans les prochaines années, prédit la CRE.

"Il y a un effritement du nombre d'usagers du gaz, mais ce qui est significatif, c'est surtout la baisse de consommation liée à la flambée des prix, au plan sobriété."

Nicolas Goldberg, spécialiste des questions d'énergie

à franceinfo

"Tout le monde consomme moins, donc on répartit le prix de l'entretien des tuyaux sur une consommation plus faible, et unitairement ça fait un peu plus pour les consommateurs", a expliqué lundi Emmanuelle Wargon sur RMC. Concrètement, à partir du 1er juillet, "l'impact sur la facture" s'élèvera en moyenne à "+5,5 %", soit 7,30 euros supplémentaires par mois, pour les clients qui se chauffent au gaz, et de "+10,4%", soit 2,20 euros, pour ceux qui utilisent le gaz uniquement pour l'eau chaude et la cuisson, selon la CRE.

Une facture tout de même "stable" ?

Cela ne signifie cependant pas que la facture de gaz globale des consommateurs augmentera dans ces proportions. Cela "va dépendre de l'évolution des prix de marché d'ici là ; et pour l'instant, ils sont plutôt en chute libre", analyse Nicolas Goldberg. "Depuis décembre, le prix du gaz baisse alors qu'on est en plein hiver", poursuit l'expert, qui juge ce phénomène "très inhabituel".

Ainsi, le TTF néerlandais, indice considéré comme la référence européenne pour le gaz, s'établissait autour de 29 euros le mégawattheure (MWh) début février, bien loin de son pic de 249 euros le MWh atteint en août 2022, au cœur de la flambée des prix de l'énergie. "On l'explique parce que les approvisionnements de gaz en Europe sont assez sécurisés, que les stockages sont pleins, et puis on n'anticipait pas à quel point la baisse de la consommation serait persistante", éclaire-t-il. 

"L'un dans l'autre, on va payer un peu plus cher pour les tuyaux, et le prix du gaz lui-même baisse", a résumé Emmanuelle Wargon sur RMC. "Si le prix du gaz reste en juillet là où il est aujourd'hui", alors la facture "sera stable", a-t-elle ajouté. Ce mécanisme pourra s'opérer pour les clients qui ont par exemple souscrit à une offre indexée au tarif de référence du gaz, révisé chaque mois par la CRE, à la hausse ou à la baisse.

En revanche, les consommateurs qui ont souscrit à une offre à prix fixe, dont le tarif de la molécule de gaz n'évolue pas durant une durée déterminée (un an, deux ans, trois ans, etc.), ne bénéficieront pas automatiquement du recul du prix du gaz. "Quand la molécule est à prix fixe, si les taxes ou le réseau augmentent, alors vous le voyez directement sur votre facture", met en garde Nicolas Goldberg.

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