"La baisse du nombre de fonctionnaires risque de créer des déserts administratifs" (Christian Chavagneux, Alternatives économiques)
Les deux finalistes de la primaire de la droite s'affrontent ce jeudi soir, lors du débat d'entre deux tours. Au coeur de leurs propositions, la réduction du nombre de fonctionnaires, 250 000 pour Alain Juppé, le double pour François Fillon. Un objectif impossible à atteindre selon Christian Chavagneux, éditorialiste pour le magazine Alternatives économiques
La réduction du nombre de fonctionnaires est l'un des grands thèmes de la campagne de l'entre deux tours de la primaire de la droite : Alain Juppé et François Fillon veulent tous deux réduire le nombre de fonctionnaires, d'au moins 250 000 pour Alain Juppé et de 500 000 pour François Fillon. Christian Chavagneux, éditorialiste pour le magazine Alternatives économiques a estimé ce jeudi sur franceinfo que ces objectifs étaient impossibles à tenir, et que s'ils étaient appliqués, on risquait de créer des "déserts administratifs", parce que 80% de la baisse serait supportée par "les collectivités locales, donc les communes".
franceinfo : Est-ce que les propositions de François Fillon et d'Alain Juppé concernant la baisse de fonctionnaires sont des objectifs possibles ?
Christian Chavagneux : Non, ils ne sont pas possibles : on a environ 5,4 millions de fonctionnaires. Les hôpitaux, l’éducation et la sécurité représentent à eux trois à peu près 60% de ces fonctionnaires. Les candidats proposent plutôt d'augmenter le nombre de fonctionnaires dans le domaine de la sécurité. Cela veut dire que c’est sur le reste qu’il faudrait faire jouer la baisse. 80 % de cette baisse serait donc supportée par le reste, à savoir les collectivités locales, donc les communes. Cela risquerait de créer des déserts administratifs.
Les propositions de compensations salariales de François Fillon sont-elles crédibles ?
Le fait que les candidats, surtout François Fillon disent : je vais compenser ça en augmentant le temps de travail des fonctionnaires de 35 heures à 39 heures, ce n’est pas très clair sur la façon dont ce serait compensé sur le plan du salaire. Et si cela n'est pas compensé sur le plan du salaire, vous imaginez les révolutions de fonctionnaires ? Cela ne serait pas tenable. S'il y a compensation salariale, cela tue complètement son projet parce qu’en fait, il veut éliminer les fonctionnaires pour faire des économies budgétaires. Mais si vous les faites travailler 39 heures payées 39, vous avez 15 milliards d’euros gagnés d’un côté, 15 milliards perdus de l’autre : il perd son objectif de réduction des dépenses publiques.
L'idée d'une fonction publique trop lourde est-elle un mythe ?
Oui, c'est un mythe et la comparaison est difficile à faire avec les voisins européens. Or, dans un grand pays industrialisé, il y a besoin de grands services publics, et de ce point de vue là, la France n’est pas en avance. Prenons l’exemple des hôpitaux, de l’éducation ou encore de la sécurité : on a plutôt besoin de plus de monde que de moins de personnes. Il ne faut pas réduire le nombre de fonctionnaires. Si on veut rester un pays compétitif au niveau international, on sait bien qu’il y a une complémentarité entre le secteur public et le secteur privé, ils ne sont pas opposés, mais ils sont complémentaires.
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