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Plan social chez Nokia : "C'est vraiment une trahison", estime le maire de Lannion, où plus de 400 postes sont menacés

"C'est toute l'économie locale, l'école, les services publics, qui vont être impactés", se désespère Paul Le Bihan. Pour l'élu des Côtes-d'Armor, les suppressions d'emploi n'ont aucune justification industrielle.

Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Manifestation aux Invalides, à Paris, contre les suppressions de postes chez Nokia en France, le 8 juillet 2020.







 (JEAN-FRANÇOIS FERNANDEZ / RADIO FRANCE)

"C'est vraiment une trahison", a réagi mercredi 8 juillet sur franceinfo Paul Le Bihan, maire PS de Lannion, dans les Côtes-d'Armor, alors que plusieurs milliers de salariés de Nokia, dont une bonne partie venus de la ville bretonne, ont défilé à Paris contre la suppression de 1 233 emplois en France, dont plus de 400 au centre de recherche de Lannion.

franceinfo : Partagez-vous le sentiment de trahison, de dégoût, des salariés qui manifestaient aujourd'hui ?

Paul Le Bihan : Tout à fait. C'est un sentiment de trahison, de cynisme d'une entreprise qui a pris des engagements et qui, à peine la date passée, s'assied sur ses engagements. C'est vraiment une trahison. On y a cru, tous, les salariés bien sûr, mais les collectivités locales aussi, quand on a rencontré les dirigeants de Nokia, pas plus tard qu'il y a deux ans, pour l'inauguration du site.

Il y a eu des aides de l'Etat, de la région, de la commune pour ce centre de recherche flambant neuf ?

Nokia bénéficie du crédit impôt recherche, qui finance 30% de la masse salariale. La communauté d'agglomération avait racheté la moitié du site de Lannion, pour pouvoir leur permettre de réorganiser le site et d'avoir des bâtiments tout neufs. Donc ça a quand même été un engagement important de la communauté d'agglomération. Et là on nous a dit, la main sur le coeur, Lannion est un site important pour Nokia et le restera. Aujourd'hui on s'aperçoit que tout cela n'était que des paroles.

Comment Nokia justifie ces suppressions de postes ?

Ça n'a absolument rien à voir avec la crise sanitaire, il faut que les choses soient claires. Au contraire, pendant la période de la crise sanitaire, les salariés de Nokia ont continué en télétravail, et ça s'est très bien passé. Ils ont même eu les félicitations de leur direction, pas plus tard qu'il y a trois ou quatre semaines. Et là, quinze jours après, on leur a dit "voilà il y a un plan social".

Ils n'ont pas souffert de la crise du Covid, par contre il y a une stratégie qui nous échappe un peu.

Paul Le Bihan, maire de Lannion

à franceinfo

Nokia a racheté Alcatel-Lucent : est-ce que c'était pour avoir les marchés, les brevets ? Ils vont licencier des jeunes ingénieurs qu'ils ont embauché tout récemment. Certains sont encore en période d'essai et risquent d'être licenciés, pour embaucher au Canada ou en Finlande, ou dans des pays qui ne sont pas dits "low-cost". Il y a une stratégie qui est curieuse. Nokia n'est peut-être pas suffisamment performant par rapport à d'autres entreprises de télécoms, mais il n'est pas en difficulté financière.

Il n'y a donc, à vos yeux, aucune justification industrielle ?

Industriellement, il n'y en a aucune. Financièrement, il y en a peut-être quelques-unes, encore faudrait-il qu'on nous l'explique, parce que Nokia a toujours du cash. La stratégie est incompréhensible. J'ai eu le directeur du site lorsque le plan a été annoncé.

On savait qu'il y allait avoir une annonce de plan, mais pas à cette hauteur-là, parce que là c'est la moitié du site.

Paul Le Bihan

à franceinfo

On pensait qu'il y aurait, comme les années passées, des plans concernant 40, 50, 60, 70 salariés, et là il y a moyen de négocier pour faire baisser ce chiffre. Mais là 402 sur 772, 40 ou 50 emplois de sauvés, ça ne changerait pas grand-chose dans la donne, car c'est la survie du site de Lannion qui est directement en jeu.

Que représentent ces suppressions de postes à l'échelle d'une ville comme Lannion ?

C'est le troisième employeur de la ville, derrière l'hôpital et Orange. Avec les conjoints, la restauration qui a lieu sur site, l'entretien du site, ça fait beaucoup d'emplois mis en jeu. Sur une ville de 20 000 habitants, c'est énorme. C'est différent des précédents plans sociaux, où souvent c'était des mesures d'âge, donc des gens en fin de carrière. On a aussi la technopole qui est en croissance et qui pouvait absorber quelques dizaines d'emplois. Là on voit mal la technopole pourrait absorber 400 emplois, voire plus si le site est vraiment menacé. Ce sont des jeunes qui vont partir, des jeunes à peine formés ou que Nokia est en train de former sur des nouvelles technologies comme la 5G, la cybersécurité, la cyberdéfense. Des gens qui vont partir, qui ne resteront pas là. C'est toute l'économie locale, l'école, les services publics, qui vont être impactés.

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