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Le Boléro de Ravel ou la cacophonie autour de ses droits d’auteur

Les ayants-droits du compositeur ont saisi la justice pour demander le retour de l’œuvre dans le domaine privé. À la clef, beaucoup d’argent.

Article rédigé par Gilbert Chevalier
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Le Bolero de Ravel interprété lors de la "Folle journée" de Nantes par l'Orchestre Lamoureux dirigé par le Français, Fayçal Karoui, le 3 février 2013. (FRANK PERRY / AFP)

Le Boléro de Ravel continue de faire jaser. L’œuvre, qui est tombée dans le domaine public en mai 2016, fait l'objet d'un nouveau rebondissement judiciaire. En France, les orchestres qui la jouent ne payent plus de droits d'auteur mais les ayants-droits de Maurice Ravel veulent un retour arrière et ont saisi la justice en juin dernier. Les sommes en jeu pourraient atteindre des dizaines de millions d’euros. C’est en tout cas le montant des droits d’ici 2039 si l’œuvre retombait dans le domaine privé.

Ravel ne serait pas le seul auteur

Pour argumenter leur demande, les plaignants affirment que le Boléro n’est pas l’œuvre du seul Maurice Ravel, mais également celle d'un autre, un décorateur. L'affaire commence un mois avant que le morceau composé en 1928 ne tombe dans le domaine public. Les héritiers d’Alexandre Benois, alliés à la succession Ravel, demandent à la Sacem de considérer ce décorateur comme co-auteur du Boléro. Alexandre Benois a en effet décoré le ballet commandé à Ravel par une célèbre danseuse. Cet homme talentueux a surtout l’avantage d’être mort en 1960. S’il était reconnu coauteur, cela repousserait l'entrée du Boléro dans le domaine public. Il y  a donc convergence d’intérêt entre la succession Ravel et les héritiers Benois. 

La Sacem a examiné les pièces apporté par les ayants-droits mais elle a rejeté a deux reprises leur demande, et, le 1er mai 2016 le Boléro est tombé dans le domaine public. En 2017, les héritiers Benois et succession Ravel apportent de nouvelles expertises… mais qui ne convainquent toujours pas.

Benois était incontestablement un très grand décorateur, un homme de grand talent qui ne fait pas pour autant de lui le co-auteur de l'œuvre.

Laurent Petitgirard, compositeur, chef d’orchestre et ancien président de la SACEM

à franceinfo

Les héritiers des ayants-droits affirment que "l’idée qu’il y ait dans une auberge espagnole une danseuse est d’Alexandre Benois", poursuit Laurent Petitgirard qui souligne que le décorateur "n'a jamais rien réclamé de son vivant, n'a aucune correspondance avec Maurice Ravel, n'a aucun dépôt et sur l'affiche de la première du Boléro dont dispose la SACEM, il est simplement indiqué comme décors ou costumes." C’est pour cela qu’en juin dernier, les héritiers de Benois, associés à ceux de Ravel, attaquent la Sacem en justice. Le tribunal de Nanterre devrait examiner ce dossier l'an prochain. Le retour d’une œuvre dans le domaine public après être tombée dans le domaine privé est rarissime.

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