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Salon de l'agriculture : agriculteur est "un métier qui peut se choisir et ne se subit plus forcément"

Avant le Salon de l'agriculture (du 25 février au 5 mars), le sociologue François Purseigle, analyse vendredi les évolutions récentes des métiers de l'agriculture et décrit un secteur aux réalités multiples. 

Article rédigé par franceinfo
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Un agriculteur passe devant un parc éolien, en août 2016. (Photo illustration)  (JEAN-FRANCOIS MONIER / AFP)

À la veille de l'ouverture du Salon international de l'agriculture, le sociologue François Purseigle décrit, sur franceinfo vendredi 24 février, un secteur aux réalités multiples, "à trois, voire quatre têtes". Selon le spécialiste du monde agricole, le métier d'agriculteur est en pleine mutation. Il "se pense dans le cadre de carrières beaucoup plus mobiles". Une diversité qui "rend beaucoup plus difficile la construction d'un projet politique" et laisse présager une abstention forte à la présidentielle.

franceinfo : Y a-t-il une crise de la vocation dans le monde agricole ?

François Purseigle  : Non, aujourd'hui il y a un désir d'agriculture. Je pense que les jeunes savent que l'agriculture cristallise un certain nombre d'enjeux forts : l'enjeu alimentaire, environnemental, territorial. Ils savent aussi que c'est un métier qui peut se choisir et ne se subit plus forcément. Ce n'est pas parce qu'on est né dans une famille agricole qu'on doit devenir agriculteur. En plus, on peut y entrer tardivement. Les jeunes hommes s'installent autour de 28 ans et les femmes autour de 29 ans. C'est un métier qui se pense dans le cadre de carrières beaucoup plus mobiles. On peut se dire qu'on va être agriculteur à un moment de sa vie professionnelle, et pourquoi pas faire autre chose plus tard. Environ 30% des jeunes de moins de 40 ans qui s'installent ont un projet à côté de celui de l'exploitation, ils sont pluriactifs.

L'agriculteur peut-il aller de l'avant malgré les lourdeurs administratives dans ce secteur ?

Oui, et je pense que les agriculteurs, notamment les plus jeunes, ne cessent d'innover. Ce qui est très intéressant c'est qu'il n'y a pas forcément un seul modèle agricole aujourd'hui, même à la française.

On voit bien que les agriculteurs n'attendent pas tout des politiques ou de leurs organisations professionnelles pour innover sur le plan marchand de la qualité des produits.

François Purseigle, sociologue

à franceinfo

En fait, ils cherchent à se départir d'un certain nombre de contraintes en imaginant de nouvelles façons de penser l'agriculture, et en ayant des compétences de plus en plus élevées. Il ne faut pas oublier que 39% des jeunes de moins de 40 ans ont un niveau supérieur au bac, le plus souvent un BTS, voire une école d'ingénieur. On a donc des métiers de l'agriculture complètement renouvelés dans la manière de faire.

Y a-t-il deux mondes qui s'opposent : celui de "l'agro-alimentaire business", et celui des petites exploitations, souvent bio ?

Il faut faire attention aux approches binaires. Il y a un processus d'abstraction-financiarisation qui conduit à l'émergence d'une agriculture de firme, et un processus de précarisation-paupérisation qui va affecter de très petites exploitations en difficulté, pas uniquement en bio. Mais les exploitations moyennes, elles aussi, sont touchées par des difficultés financières, dues à des investissements lourds. On n'a donc pas forcément une agriculture à deux têtes, mais à trois voire quatre têtes. Et l'agriculture, c'est tout à la fois : sous le vocable "agriculteur" se cache une grande diversité de situations de vie, ce qui rend beaucoup plus difficile la construction d'un projet politique. Les agriculteurs ont du mal à savoir quelle est l'offre, de droite comme de gauche. Cela crée beaucoup d'incertitudes et accroît les risques d'abstention dès le premier tour de la présidentielle.

Salon de l'agriculture : agriculteur est "un métier qui peut se choisir et ne se subit plus forcément", selon le sociologue François Purseigle

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