"S'il y a récidive, on va passer à une étape au-dessus" : à Saintes, des stages sur l'environnement plutôt qu'une amende pour pollution
À la place d'une contravention, les justiciables peuvent suivre une journée de sensibilisation. Un projet inédit en France qui pourrait s'étendre dans plusieurs départements.
C'est une première en France. Plutôt que de faire de l'écologie punitive, le parquet de Saintes en Charente-Maritime a mis en place des stages de citoyenneté environnementale. Il s'agit d’un partenariat avec l’Agence française de biodiversité et l'Office national de la chasse et de la faune sauvage. Au lieu de payer une amende, les justiciables suivent une journée de sensibilisation à l’environnement pour comprendre l’impact de leurs petites pollutions du quotidien.
La mauvaise foi souvent de mise
Durant la journée de stage, les participants ont tous reconnu les faits. Mais ils ont tous une bonne excuse et trouvent souvent leur sanction injuste. C'est le cas de Jean-Marc, il est président d’un club de motocross et il a été pris en flagrant délit de balade interdite dans les bois. "Très clairement, l'agent qui m'a verbalisé m'a dit qu'ils avaient du mal à attraper des motards. Là, ils en tenaient un et ils étaient ravis d'en faire un exemple".
Parmi les 12 justiciables présents, il n'y a pas que des hommes. Ils ont entre 30 et 70 ans, certains ont jeté les débris d’un déménagement dans la nature, d’autres ont pêché hors saison légale. Il y a surtout des agriculteurs qui irriguaient trop ou dont les compteurs d’eau n’avaient pas été changés. C'est le cas d’Olivier, qui voit surtout cette journée de stage comme le moyen d'éviter une peine plus lourde. "J'avais une contravention de 1 500 euros par compteur défectueux. C'est plus rentable pour moi de payer 150 euros pour faire un stage de sensibilisation".
Objectif : préserver l'eau en pleine sécheresse
Avec la sécheresse qui sévit depuis plusieurs années en Charente, la tension est forte sur la question de l’eau. Et malgré les explications des agents de l’Office de la chasse et de l’Agence de la biodiversité sur l’impact des activités humaines sur les ressources naturelles, Denis n’est toujours pas convaincu : "C'est toujours intéressant de discuter avec des gens qui ne connaissent pas les problèmes des agriculteurs. Ils ne vivent pas de ça tout simplement, c'est ça le problème !"
Les stagiaires concluent la journée par une visite de la réserve naturelle de la Massonne ou ils découvrent les tortues cistudes et les visons d’Europe. "Là, ça fait découvrir la nature", reconnaît Jordi, verbalisé pour avoir brûlé des déchets plastiques. Selon lui, cette journée de sensibilisation a été utile. "Moi je pensais qu'un chemin c'était un chemin. Je l'admets, j'ai fait une connerie, je l'assume."
"On a toujours fait comme ça"
Même si ce stage est une alternative financièrement intéressante pour certains, Armel Thilliez, délégué du procureur de Saintes chargée de cette médiation, rappelle qu’il vaut mieux qu’ils évitent la récidive. "Pour une première fois un stage, ils peuvent estimer qu'ils s'en sortent bien, mais s'il y a récidive, on va passer à une étape au-dessus, prévient-il. Ça pourrait devenir plus compliqué. L'excuse qu'on entend souvent c'est : 'on a toujours fait comme ça'. Aujourd'hui, avec l'état de la planète, on ne peut plus se satisfaire de cette excuse".
Cette année, une cinquantaine d’infractions environnementales ont été traitées par le procureur de Saintes, il espère que ce type de stage désengorgera les audiences du tribunal. Une dizaine d’autres parquets en France l’ont contacté pour mettre en place ce type d’alternatives aux sanctions pénales.
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