Les serres chauffées, "incompatibles avec le règlement-cadre européen"
Le secrétaire national de la Fédération nationale d'agriculture biologique des régions de France, Jean-Paul Gabillard revient sur franceinfo sur les cultures en serres chauffées, selon lui incompatibles avec le règlement-cadre européen.
Alors que la Fédération nationale d'agriculture biologique des régions de France (FNAB) a lancé, mardi soir, une pétition demandant l'interdiction en France du recours aux serres chauffées pour produire des fruits et légumes bio, son secrétaire national, Jean-Paul Gabillard, affirme, mercredi 29 mai sur franceinfo, que la méthode est, aux yeux de la Fédération, incompatible avec le règlement-cadre européen. Le comité technique de la filière bio doit maintenant se prononcer en juillet sur le sujet.
franceinfo : Le marché du bio se porte de mieux en mieux : est-ce, paradoxalement, la source de tous les maux ?
Jean-Paul Gabillard : Oui. Déjà, c'est une bonne chose qu'il se porte bien. Après, évidemment, cela attire des convoitises de producteurs qui sont aujourd'hui en agriculture conventionnelle et qui ne veulent pas forcément modifier tant que cela leurs pratiques. Très clairement, il y a des grosses coopératives, plutôt spécialisées en tomates hors-sols sous serres chauffées, qui veulent faire de la bio. Ce n'est pas, en soi, un problème, sauf qu'il faut en effet qu'elles modifient leurs pratiques, notamment qu'il y ait une culture qui soit en lien avec le sol et sans chauffage, de façon à respecter les cycles naturels tels que définis dans le règlement européen.
Chauffer des serres est incompatible avec le label bio ?
C'est pour cela que le comité national de l'agriculture biologique doit se prononcer en juillet : de façon à ce que les règles soient claires. Pour nous, en effet, nous considérons que c'est incompatible avec le règlement-cadre européen, où il est bien spécifié "respect des cycles naturels" et "une utilisation responsable de l'énergie"."
Vous dites que cela nuit aussi à la diversité des cultures. Pourquoi ?
Les producteurs qui vont passer en tomates serres chauffées vont faire uniquement des cultures à fort potentiel et forte valeur ajoutée, donc ça peut être tomate et concombre, mais, par exemple, ils ne vont pas faire de mâche, de salades, d'oignon blanc… Du coup, au sein-même de l'exploitation, il y aura moins de diversité, ce qui pose problèmes en termes techniques, puisque la bio s'appuie aussi sur ce que l'on appelle la rotation des cultures, donc des successions de cultures. La monoculture est interdite en bio.
Les produits seraient-ils un peu moins chers ?
Pas forcément, puisque le chauffage coûte très cher, et ça donne surtout des produits hors saison. Il faut savoir que, sous serres non chauffées, en Bretagne, nous arrivons à avoir la tomate du mois de juin au mois de novembre, donc nous estimons qu'il y a une diversité suffisamment importante à l'hiver et au printemps sans avoir besoin forcément des légumes dits d'été.
Cela discrédite-il le label bio ?
Oui, on sent que le consommateur a confiance dans la bio parce que, justement, c'est de la diversité, de la saisonnalité, des produits faits sans pesticides : tous ces éléments mis bout-à-bout ne vont pas du tout dans le sens de vouloir qu'il y ait du chauffage dans les serres.
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