Redressement des finances publiques : Pierre Moscovici tacle une trajectoire "peu ambitieuse" et plaide pour "surtout se désendetter"
Le premier président de la Cour des comptes a jugé mardi 3 octobre sur franceinfo que la réduction du déficit public sous la barre des 3% en 2027 était un objectif "réaliste et tenable" mais "peu ambitieux" et "tardif". Le projet de loi de programmation des finances publiques 2023-2027, qui accélère les objectifs du gouvernement en matière de désendettement et de réduction du déficit public d'ici la fin du quinquennat a été adopté dans la nuit de vendredi à samedi, après le rejet de la motion de censure déposée par la Nupes.
Dans un contexte où la charge de la dette explose, le projet de loi de programmation des finances publiques prévoit notamment de ramener le déficit public de 4,8% du produit intérieur brut (PIB) en 2022 à 2,7% en 2027, sous l'objectif européen de 3%. "3 % à la fin du quinquennat, c'est réaliste et tenable. Simplement, pardon, de le dire, c'est assez peu ambitieux", a assené celui qui est par ailleurs président du Haut Conseil des finances publiques (HCFP). "3 % en 2027, c'est tard", a-t-il ajouté, alors que "la totalité des pays de la zone euro y sera en 2026". "Nous ne sommes pas aujourd'hui les bons élèves de la zone euro", a-t-il constaté.
"Il faut se désendetter pour pouvoir investir"
S'agissant de la dette publique, qui a reculé à 111,8% du produit intérieur brut (PIB) au deuxième trimestre, a indiqué l'Insee, Pierre Moscovici alerte sur le poids de la dette qui s'est alourdie depuis l'augmentation des taux pilotés par la Banque centrale européenne. "Cette dette coûte chère puisque les taux d'intérêts ne sont plus négatifs aujourd'hui", a-t-il souligné, rappelant que "nous sommes sortis de l'ère magique où on s'endettait et on touchait de l'argent". "Nous serons sur le podium, le tiercé de tête ou de queue avec la Grèce et l'Italie", a commenté le président de la Cour des comptes. Pour rappel, les règles européennes issues du Traité de Maastricht de 1992 avaient fixé pour les Etats membres une limite de dette publique à 60% du PIB, toujours dépassé par la France dès 2002. "Le combat contre la dette publique, ce n'est pas un combat de droite, ce n'est pas un combat de gauche, c'est un combat pour l'avenir", a-t-il prévenu. "Je veux lancer un cri d'alarme et un cri de mobilisation", a-t-il alerté. "Il faut se désendetter pour pouvoir investir", a-t-il ajouté, se disant loin de prôner l'austérité. "On a besoin d'investir massivement dans l'hôpital, dans l'innovation", a souligné Pierre Moscovici.
L'effort sera aussi d'autant plus difficile que d'importantes dépenses sont requises pour financer la transition écologique. Si l'ancien ministre socialiste a reconnu que "la dette pour la transition écologique est meilleure que d'autres dettes", il a alerté sur le cumul des dettes. "Si vous faites de la dette pour la transition écologique, supprimez d'autres dettes. Si vous empilez des dettes, vous les remboursez", a défendu l’ancien commissaire européen et ancien ministre de l'Économie (2012-2014) de François Hollande. "Quand vous êtes très endetté, vous n'avez pas de quoi investir. Et peu importe que la dette soit bonne ou mauvaise", a-t-il résumé. Pour lui, la seule solution pour le désendettement est une refonte des dépenses publiques et "flécher les choses sur une bonne dette, celle qui porte sur l'investissement dans l'avenir".
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