Accueillir tous les étudiants sans tirage au sort : le casse-tête de l'université de Strasbourg
A l'heure de la rentrée dans les facs, les amphis sont bondés et le programme doit s'adapter. Ainsi, l'université de Strasbourg, qui a refusé le tirage au sort, explore toutes les solutions possibles pour assurer les cours.
Avec 30 000 étudiants supplémentaires arrive le casse-tête de l'organisation de la rentrée universitaire. Les universités ont donc dû accepter en urgence d'ouvrir des places, mais souvent sans locaux supplémentaires. À Strasbourg, l'université a refusé le tirage au sort, mais elle a dû déployer des trésors d'imagination pour accueillir tous les candidats.
À Strasbourg, la rentrée à la fac s'est déroulée, mardi 5 septembre, avec une très forte affluence. L'université a accepté de pousser les murs pour accueillir tous les candidats. Le tirage au sort, pratiqué dans certains campus, a été refusé, en raison de son caractère injuste. Mais le résultat est là : 650 étudiants en Staps, la filière des sports, soit 200 de plus que la capacité d'accueil maximale. Il n'existe pas d'amphi assez grand pour rassembler tous les étudiants de première année, le jour de la rentrée. Deux amphis ont été prévus. C'était la première surprise réservée aux étudiants. La deuxième surprise, annoncée par le doyen, concerne l'emploi du temps : des créneaux supplémentaires, avec des cours le soir et le samedi matin. L'adaptation n'arrange pas les nombreux étudiants qui ont déjà des samedis déjà bien chargés, en club. C'est le cas de Zac, membre de l'équipe Espoir de la SIG, le club de basket de Strasbourg.
On aura des matches tous les samedis. S’il faut faire un déplacement éloigné, on devra partir le matin. Je ne sais pas encore comment on va faire.
Zac, étudiant en Stapsà franceinfo
Autre conséquence de la fréquentation surchargée de la fac, les équipements sportifs de la ville sont saturés. Jean Saint-Martin, doyen de la faculté Sciences du sport explique avoir exploré de nombreuses solutions. Elles passent, dit-il par "une ouverture culturelle des pratiques".
Ne disposant pas d’infrastructures classiques, gymnases, piscines, nous nous ouvrons à des pratiques originales qui sont plus des pratiques urbaines. Par exemple, le parcours. C’est une pratique gymnique et acrobatique qui se fait en milieu urbain.
Jean Sain-Martin, doyen de la fac sciences du sport à Strasbourgà franceinfo
Les étudiants, interloqués, ont du mal à traduire concrètement ce langage universitaire. L'un pense que c'est de "l'humour". D'autres traduisent le cours par de la gym dans la rue. C'est ce qu'ils feront, en même temps que de la marche nordique.
Du bricolage aussi en psychologie
Le jour de la rentrée, des étudiants de première année sont assis sur les marches dans l'amphi. Ils sont une centaine de plus que la capacité d'accueil maximum. Il va falloir s'habituer à l'inconfort et aux sièges d'appoint, déplore la doyenne de la faculté de psychologie, Eva Louvet. Les étudiants de première année auront essentiellement des cours magistraux, en amphi.
Le nombre d'étudiants, en première année nous a progressivement amené à réduire le nombre d'heures d'enseignement, en particulier les travaux dirigés, les travaux pratiques.
Eva Louvet, doyenne de la faculté de psychologieà franceinfo
L'alternative était connue : accueillir tous les candidats ou procéder au tirage au sort. "On préfère qu'ils aient moins d'heures, moins de TP et de TD, mais que tous aient leurs chances de démarrer un cursus", tranche la doyenne.
Sans hausse de budget, la pratique du surbooking
Staps, psycho, sciences de la vie, droit, toutes les filières sont en augmentation du côté des inscriptions. La fac explose mais pas les moyens, regrette Michel Deneken, président de l'université de Strasbourg, qui fait "des divisions et des soustractions".
En augmentant tous les ans, le nombre d'étudiants en première année, avec le même nombre d'enseignants, le même nombre de mètres carrés et la même dotation, on comprend, sans être prix Nobel, que le budget est difficile à boucler.
Michel Deneken, président de l'université de Strasbourgà franceinfo
Les amphis sont bondés et, dans le même temps, le taux d'abandon s'avère très important dans les premières semaines. Eva Louvet, la doyenne de la faculté de psychologie, reconnaît le cynisme du système auquel elle fait face. "Comme on sait qu'il y a des abandons, on fait du surbooking. Au lieu de faire les 16 groupes de TD nécessaires, on en fait 12. On met les groupes à 55 étudiants au lieu de 40, dans l'attente des désistements", a-t-elle calculé. Les professeurs en sont réduits à prévoir le découragement des élèves.
Une réflexion sur les chemins saturés de la fac
L'an prochain, avec la suite du baby-boom des années 2000, environ 30 000 étudiants supplémentaires frapperont encore à la porte des universités. Emmanuel Macron a estimé il y a quelques jours que tous les jeunes n'avaient pas vocation à aller à l'université. Une concertation vient d'être lancée sur l'accès aux universités. Faut-il fermer le robinet et si oui, comment ? Le système sera réformé, promet le gouvernement. Mais ça, c'est pour l'année prochaine. En attendant, des étudiants vont faire cette année de la marche nordique et de la gymnastique de rue.
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